Irak: Le patriarche Younan décrit des villes chrétiennes «fantômes»
Le patriarche syro-catholique Ignace Joseph III Younan s’est déclaré «horrifié» par la dévastation qu’il a observée dans les zones libérées de Daech, en Irak. Il décrit notamment des «villes fantômes» où il «ne reste pas grand-chose» des communautés chrétiennes.
Le chef de l’Eglise syro-catholique a narré, dans un courriel adressé à l’agence de presse américaine Catholic News Service (CNS), sa tournée dans les zones de la plaine de Ninive récemment reprises aux djihadistes de l’Etat islamique (EI), au nord de l’Irak. Lors de son périple, réalisé fin novembre 2016, il assure avoir été choqué par les «rues sans âme qui vive, à l’exception des militaires…la dévastation, les maisons et les églises incendiées».
Inscriptions haineuses
Près de 100’000 chrétiens, dont plus de 60’000 syro-catholiques, ont été expulsés de la plaine de Ninive par l’EI, en été 2014.
«Nous avons marché à travers les villes de Qaraqosh, de Bartella et de Karamlech, nous avons pu voir l’étendue de la dévastation. C’était comme si nous entrions dans des villes fantômes», explique le patriarche dans son message. Des graffiti haineux envers les chrétiens étaient visibles partout…sur les murs le long des rues, à l’intérieur et à l’extérieur des maisons et des églises. «Les terroristes ont pillé, endommagé ou détruit les bâtiments, note Mgr Younan. Mais nous avons aussi découvert que, par haine envers la foi chrétienne, ils ont mis le feu à la plus grande partie des bâtiments, dont les églises, les écoles, les jardins d’enfants et les hôpitaux». Il relève qu’uniquement les biens des chrétiens ont été ciblés.
Messe au milieu des cendres
A Qaraqosh, habité jadis par 50’000 chrétiens, le patriarche à célébré l’eucharistie le 28 novembre sur un autel improvisé, dans une église de l’Immaculée conception incendiée. L’édifice, qui avait 2’200 places assises avant sa profanation, a été construit dans les années 1930. Peu de personnes ont pu assister à la cérémonie. Il s’agissait surtout de membres du clergé, de quelques jeunes armés et de journalistes. Toutes les autres églises visitées par le patriarche, dont certaines datent du 4e siècle, ont subi d’importants dégâts, ou ont été détruites.
Mgr Younan souligne que les réfugiés chrétiens -pour la plupart encore au Kurdistan, où il se sont réfugiés- ont actuellement un état d’esprit ambivalent. Ils sont d’une part contents que les djihadistes aient été chassés, mais de l’autre attristés par l’état «désastreux» dans lequel les terroristes ont laissé leurs communautés. L’opinion générale prévaut, en Irak, qu’ils ne rentreront pas chez eux pour reconstruire et rester, à moins qu’une zone de sécurité pour les chrétiens ne soit garantie dans la plaine de Ninive.
A la fin de son message, Mgr Younan appelle à la création d’une province auto-administrée pour les chrétiens, dans la région. Il exhorte également les pays occidentaux à fermement condamner les régimes qui continuent de discriminer les chrétiens. (cath.ch/cns/rz)