Fouilles au chevet de la cathédrale de Fribourg, Samuel Abriel vient de mettre au jour ce mandibule |  © Maurice Page
Suisse

Fribourg: 900 ans sous les pieds

Le service archéologique du canton de Fribourg a présenté au public, le 11 octobre 2024, l’état des fouilles autour de la cathédrale Saint-Nicolas. Un pan de voile sur l’histoire de la cité et sur la vie au Moyen-Age est levé.

Armé de sa petit truelle puis avec ses doigts, Samuel Abriel dégage de sa gangue de terre un mandibule inférieur. «La mâchoire est encore garnie de presque toutes ses dents et elles sont bien blanches.» Pour le jeune archéologue, mettre ainsi au jour de tels vestiges au chevet de la cathédrale de Fribourg est passionnant.

«Bien que nous soyons très près de la surface, cet espace est resté intact depuis plusieurs siècles, c’est une chance assez rare en plein cœur de ville», explique Marion Liboutet, cheffe du secteur Moyen-Age archéologie du bâti du canton de Fribourg.

Les traces des toutes premières maisons de Fribourg apparaissent sous la chaussée de la place Sainte Catherine | © Maurice Page

Des fouilles ouvertes en 2022

Ouvertes en 2022, à la faveur de la requalification du quartier du Bourg, ces fouilles, qui s’étendent sur plus de 1’000 m2, permettent de plonger au début de la fondation de la cité, en 1157, sur un éperon rocheux dominant la Sarine. La ville se dote rapidement d’une première église dont il ne reste rien. Car ce premier édifice sera remplacé par l’actuelle cathédrale dont la première est bénite en 1283.

Durant le Moyen-Age et jusqu’au XIXe siècle, les cimetières entourent les églises. Le cimetière de Saint-Nicolas possédait une chapelle-ossuaire dédiée à sainte Catherine, disparue aujourd’hui, mais qui apparaît sur les gravures anciennes et dont le mur d’angle a été mis au jour. Pour construire cette chapelle et pouvoir creuser des tombes des maisons ont été arasées. On en observe des traces sous les tombes, explique Marion Liboutet.

Un cimetière en fonction jusqu’au XIXe siècle

Le cimetière de la cathédrale servira jusqu’à la première moitié du XIX siècle. Théoriquement les ossements peuvent donc dater du XIIIe au XIXe. En la quasi-absence d’objets, il est difficile de les dater avant les examens en laboratoire.

«Les objets de la vie quotidienne que nous avons retrouvés sont peu nombreux. Quelques couteaux de belle facture, une boucle de ceinture, une flûte en os, deux dés à jouer, et les clous des cercueils. Ils nous renseignent assez peu sur la vie à Fribourg au Moyen-Age», reconnaît l’archéologue.

Des tombes reçoivent parfois plusieurs corps | © Maurice Page

La disposition des corps, avec une fosse commune contenant 14 dépouilles et un secteur réservé au enfants en bas-âge se rattache probablement à une épidémie comme la peste et à une mortalité infantile élevée.

Le labo en dira plus 

Les études anthropologiques de laboratoire permettront d’en savoir plus sur la date du décès, la sexe, la taille, l’âge du défunt, ses éventuelles pathologies ou déformations osseuses, l’état de ses dents… «Ce sont ces analyses qui nous apprendront le plus sur la vie en ville à cette époque.»

Une fois les fouilles achevées, la place Sainte-Catherine retrouvera son aspect avec un sol pavé et la plantation de quatre platanes pour lui offrir de l’ombre. «Les objets et les ossements seront conservés, les murs et les fondations seront recouverts.» (cath.ch/mp)  

Fouilles au chevet de la cathédrale de Fribourg, Samuel Abriel vient de mettre au jour ce mandibule | © Maurice Page
11 octobre 2024 | 16:06
par Maurice Page
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