François face aux critiques venues des Etats-Unis
Lors de sa traditionnelle conférence de presse dans son avion de retour de l’Afrique, le pape François a assuré le 10 septembre 2019 ne pas avoir peur des critiques, tout en priant pour qu’il n’y ait pas de schisme dans l’Eglise.
Trois heures après le décollage d’Antananarivo, à Madagascar, sur le vol de retour à Rome, le pontife a répondu aux journalistes, notamment à propos des critiques américaines sur son pontificat. Dans son livre Comment l’Amérique veut changer de pape, Nicolas Senèze, correspondant permanent à Rome du quotidien La Croix (*), explique que certains groupes influents américains liés à de puissances financières auraient pour but de renverser le pape et de préparer l’ère post-François.
Attaques de laïcs catholiques ultraconservateurs
Ces laïcs catholiques ultraconservateurs, liés étroitement avec une frange d’évêques américains partageant leur idéologie, lui reprochent sa critique du capitalisme néo-libéral américain, sa condamnation de la peine de mort et sa non-condamnation de l’homosexualité. Si le pape a entendu parler du livre Nicolas Senèze, il ne l’a pas lu.
Les critiques ne viennent pas seulement des Américains, il y en a un peu partout, aussi à la curie, a reconnu le pape François. Au moins, ceux qui les expriment ont l’avantage de l’honnêteté de les dire. Cela, ça me plaît. Moi, je n’aime pas quand les critiques se font sous la table: ceux qui te font des sourires, et après te poignardent dans le dos. Ça, ce n’est pas humain!»
«La critique est un élément de construction»
«La critique est un élément de construction. Et si ta critique n’est pas juste, tu dois toujours être prêt à recevoir la réponse et faire un dialogue, une discussion et arriver à un point juste. Cela, c’est la dynamique de la véritable critique, non ? Au contraire, la critique malsaine dans l’article dont parlait Mgr Rueda [sur les mots comme des ›gouttes d’arsenic’, ndlr], c’est un peu lancer la pierre en se cachant la main. Cela ne sert à rien, cela n’aide pas. Cela aide de petits groupes fermés qui ne veulent pas entendre la réponse à la critique. Une critique dont on ne veut pas entendre la réponse, c’est lancer la pierre en se cachant la main».
«Au contraire, une critique loyale – je pense ceci, ceci, ceci – et ouverte à la réponse, c’est constructif, cela aide. Dans le cas du pape: ›peut-être que ce pape ne me plaît pas, je critique, j’attends la réponse, je vais le voir, je parle, j’écris un article et je lui demande de répondre’. Cela est loyal, cela, c’est aimer l’Eglise. Faire une critique sans vouloir entendre la réponse ni vouloir dialoguer, ce n’est pas vouloir du bien à l’Eglise, c’est suivre une idée fixe, non ? Comme changer de pape, changer de style, faire un schisme… je ne sais pas. C’est clair : la critique loyale est toujours bien reçue, au moins par moi».
Concernant le problème du schisme, le pontife rappelle que dans l’Eglise, «il y a eu tant de schismes».
«Je n’ai pas peur des schismes»
«Après Vatican Ier et le dernier vote sur l’infaillibilité, un bon groupe est parti. Il s’est écarté de l’Eglise et a fondé les vieux-catholiques pour être honnête par rapport à la tradition de l’Eglise. Puis, ils se sont développés différemment et maintenant ils ordonnent des femmes. Mais à l’époque, ils étaient rigides, suivant une orthodoxie qui pensait que le concile s’était trompé».
«D’autres groupes sont partis sans claquer la porte. Sur la pointe des pieds, mais sans bruit. Vatican II a connu ces choses. Peut-être le détachement le plus connu est celui de [Mgr Marcel] Lefebvre. Il y a toujours le choix schismatique dans l’Eglise, toujours. Le Seigneur laisse toujours le choix à la liberté humaine. Moi, je n’ai pas peur des schismes. Je prie pour qu’il n’y en ait pas parce qu’il y va de la santé spirituelle de beaucoup de gens, pour qu’il y ait le dialogue, qu’il y ait la correction quand quelqu’un se trompe. Mais le chemin du schisme n’est pas chrétien !»
«Pensons aux débuts de l’Eglise, comment l’Eglise a commencé avec tant de schismes. L’un après l’autre. Il suffit de lire l’histoire de l’Eglise avec les ariens, les gnostiques, les monophysites… Et puis, il faut que je vous raconte une anecdote que je raconte parfois, je ne sais pas si je l’ai déjà fait ici. C’est le peuple de Dieu qui a sauvé des schismes. Les schismatiques, systématiquement, se coupent du peuple, de la foi du peuple, de la foi du peuple de Dieu. Quand, au concile d’Ephèse [en 431, ndlr], il y a eu la discussion sur la maternité de Marie, le peuple – c’est historique ! – était à l’entrée de la cathédrale et, quand les évêques entraient pour faire le concile, il les attendait avec des bâtons et donnait des coups de bâtons en disant ›Mère de Dieu, Mère de Dieu, c’est ce que nous croyons, faites-le !’ Le peuple de Dieu aide toujours».
«Je prie pour qu’il n’y ait pas de schisme, mais je n’ai pas peur»
«Un schisme est toujours une coupure explicite: de l’idéologie déchirée de la doctrine. C’est une idéologie, peut-être juste, mais qui entre dans la doctrine et la déchire. Et elle devient une doctrine, entre guillemets, mais pour peu de temps. Pour cela, je prie pour qu’il n’y ait pas de schisme, mais je n’ai pas peur».
«Je n’ai pas peur, je réponds aux critiques. Tout cela, je le fais. Si quelqu’un me demande quelque chose, je le fais, pour aider… Mais c’est un des résultats de Vatican II. Ce n’est pas un pape, un pape et un autre pape. Par exemple, les choses sociales que je dis, c’est la même chose que ce qu’avait dit Jean Paul II. La même chose ! Je le copie. ›Mais le pape est trop communiste…’ : ils font entrer l’idéologie dans la doctrine. Et quand la doctrine ruisselle d’idéologie, il y a la possibilité d’un schisme».
Primat d’une morale ascétique
(*) Nicolas Senèze Comment l’Amérique veut changer de pape. Bayard Editions 2019
«Et aussi, il y a l’idéologie ascétique, le primat d’une morale ascétique sur la morale du peuple de Dieu. Aussi, les pasteurs doivent conduire le troupeau du péché vers la grâce, c’est cela la morale évangélique. A l’inverse, la morale d’une idéologie ainsi…disons… ›pélagienne’ te porte à la rigidité. Et aujourd’hui nous avons tellement d’écoles de rigidité à l’intérieur de l’Eglise, qui ne sont pas des schismes, mais qui sont des chemins chrétiens pseudo-schismatiques. Et, à la fin, ils finiront mal. Quand vous voyez, quand vous verrez des chrétiens, des évêques, des prêtres… rigides, derrière eux il y a des problèmes. Ce n’est pas la santé de l’Evangile. Pour cela nous devons être proches avec les personnes qui sont tentées par cela, parce qu’ils traversent des problèmes et il faut les accompagner avec attention». (cath.ch/imedia/com/be)
La conférence du pape François de retour de son voyage sur les bords de l’océan Indien (VERBATIM)
Le problème du schisme. Dans l’Eglise, il y a eu tant de schismes. Après Vatican Ier et le dernier vote sur l’infaillibilité, un bon groupe est parti. Il s’est écarté de l’Eglise et a fondé les vieux-catholiques pour être honnête par rapport à la tradition de l’Eglise. Puis, ils se sont développés différemment et maintenant ils ordonnent des femmes. Mais à l’époque, ils étaient rigides, suivant une orthodoxie qui pensait que le concile s’était trompé.
D’autres groupes sont partis sans claquer la porte. Sur la pointe des pieds mais sans bruit. Vatican II a connu ces choses. Peut-être le détachement le plus connu est celui de [Mgr Marcel] Lefebvre. Il y a toujours le choix schismatique dans l’Eglise, toujours. Le Seigneur laisse toujours le choix à la liberté humaine. Moi, je n’ai pas peur des schismes. Je prie pour qu’il n’y en ait pas parce qu’il y va de la santé spirituelle de beaucoup de gens, pour qu’il y ait le dialogue, qu’il y ait la correction quand quelqu’un se trompe. Mais le chemin du schisme n’est pas chrétien.
Pensons aux débuts de l’Eglise, comment l’Eglise a commencé avec tant de schismes. L’un après l’autre. Il suffit de lire l’histoire de l’Eglise avec les ariens, les gnostiques, les monophysites… Et puis, il faut que je vous raconte une anecdote que je raconte parfois, je ne sais pas si je l’ai déjà fait ici. C’est le peuple de Dieu qui a sauvé des schismes. Les schismatiques, systématiquement, se coupent du peuple, de la foi du peuple, de la foi du peuple de Dieu. Quand, au concile d’Ephèse [en 431, ndlr], il y a eu la discussion sur la maternité de Marie, le peuple – c’est historique ! – était à l’entrée de la cathédrale et, quand les évêques entraient pour faire le concile, il les attendait avec des bâtons et donnait des coups de bâtons en disant ›Mère de Dieu, Mère de Dieu, c’est ce que nous croyons, faites-le !’. Le peuple de Dieu aide toujours.
Un schisme est toujours une coupure explicite : de l’idéologie déchirée de la doctrine. C’est une idéologie, peut-être juste, mais qui entre dans la doctrine et la déchire. Et elle devient une doctrine, entre guillemets, mais pour peu de temps. Pour cela, je prie pour qu’il n’y ait pas de schisme, mais je n’ai pas peur.
Je n’ai pas peur, je réponds aux critiques. Tout cela, je le fais. Si quelqu’un me demande quelque chose, je le fais, pour aider… Mais c’est un des résultats de Vatican II. Ce n’est pas un pape, un pape et un autre pape. Par exemple, les choses sociales que je dis, c’est la même que ce qu’avait dit Jean-Paul II. La même chose ! Je le copie. ›Mais le pape est trop communiste…’ : ils font entrer l’idéologie dans la doctrine. Et quand la doctrine ruisselle d’idéologie, il y a la possibilité d’un schisme.
Et aussi, il y a l’idéologie ascétique, le primat d’une morale ascétique sur la morale du peuple de Dieu. Aussi, les pasteurs doivent conduire le troupeau du péché vers la grâce, c’est cela la morale évangélique. A l’inverse, la morale d’une idéologie ainsi…disons… ›pélagienne’ te porte à la rigidité. Et aujourd’hui nous avons tellement d’écoles de rigidité à l’intérieur de l’Eglise, qui ne sont pas des schismes, mais qui sont des chemins chrétiens pseudo-schismatiques. Et à la fin ils finiront mal. Quand vous voyez, quand vous verrez des chrétiens, des évêques, des prêtres… rigides, derrière eux il y a des problèmes. Ce n’est pas la santé de l’Evangile. Pour cela nous devons être proches avec les personnes qui sont tentées par cela, parce qu’ils traversent des problèmes et il faut les accompagner avec attention.
Avant tout: les critiques aident toujours. Toujours. Quand on reçoit une critique, on doit immédiatement faire son autocritique. C’est ce que je me dis : ›c’est vrai ? Ce n’est pas vrai ? Jusqu’à quel point ?’ Je tire toujours un avantage des critiques, toujours. Quelque fois cela me fâche, mais il y a des avantages.
La critique est un élément de construction. Et si ta critique n’est pas juste, tu dois toujours être prêt à recevoir la réponse et faire un dialogue, une discussion et arriver à un point juste. Cela, c’est la dynamique de la véritable critique, non ? Au contraire, la critique malsaine dans l’article dont parlait Mgr Rueda [sur les mots comme des ›gouttes d’arsenic’, ndlr], c’est un peu lancer la pierre en se cachant la main. Cela ne sert à rien, cela n’aide pas. Cela aide de petits groupes fermés qui ne veulent pas entendre la réponse à la critique. Une critique dont ne veut pas entendre la réponse, c’est lancer la pierre en se cachant la main. Au contraire, une critique loyale – je pense ceci, ceci, ceci – et ouverte à la réponse, c’est constructif, cela aide.
Dans le cas du pape : ›peut-être que ce pape ne me plaît pas, je critique, j’attends la réponse, je vais le voir, je parle, j’écris un article et je lui demande de répondre’. Cela est loyal, cela, c’est aimer l’Eglise. Faire une critique sans vouloir entendre la réponse ni vouloir dialoguer, ce n’est pas vouloir du bien à l’Eglise, c’est suivre une idée fixe, non ? Comme changer de pape, changer de style, faire un schisme… je ne sais pas. C’est clair : la critique loyale est toujours bien reçue, au moins par moi.
Je voudrais dire quelque chose de plus sur le voyage, qui m’a tant frappé : la capacité d’unité interreligieuse, de dialogue interreligieux.
La différence de religion n’est pas effacée, mais il est souligné que nous sommes tous frères et que tous nous devons nous parler. Cela est un signe de maturité de ton pays [Maurice, ndlr]. Parlant hier avec le Premier ministre, je suis resté stupéfait de comment eux ont élaboré cette réalité et la vivent comme une nécessité de coexistence. Il y a une commission inter-cultuelle qui se réunit. La première chose que j’ai trouvée en entrant hier dans l’évêché – c’est une anecdote – est un très beau bouquet de fleurs envoyé par le grand imam. Des frères. La fraternité humaine est à la base et respecte toutes les croyances. Le respect religieux est important.
Ensuite, lors du voyage aller vers Maputo, l’un de vous m’a donné un livre en français… Toi [Nicolas Senèze, ndlr]. Le titre en français était… L’Eglise américaine attaque le pape, non… Le pape face aux attaques des Américains… Voilà : Comment l’Amérique veut changer de pape. C’était le livre dont on m’a donné un exemplaire. J’avais entendu parler du livre, mais je ne l’ai pas lu.
Les critiques ne viennent pas seulement des Américains. D’un peu partout et aussi de la Curie. Au moins, ceux qui les expriment ont l’avantage de l’honnêteté de les dire. Cela, ça me plaît. Moi, je n’aime pas quand les critiques se font sous la table : ceux qui te font des sourires, et après te poignardent dans le dos. Ça, ce n’est pas humain.
Pour cela, aux missionnaires je leur dis : ne faites pas pas de prosélytisme. Le prosélytisme vaut pour la politique, pour le monde du sport, pour tout cela mais pas pour la foi. Que cela signifie-t-il pour vous, pape, évangéliser ? Il y a une phrase de saint François qui m’a tant éclairé. Saint François d’Assise disait à ses frères : apportez l’Evangile, et – si cela est nécessaire – aussi par les mots. Evangéliser et c’est que nous lisons dans le livre des Actes des Apôtres. Témoignage. Ce témoignage provoque l’interrogation : ›mais toi pourquoi vis-tu ainsi, pourquoi fais-tu cela ?’. Et là j’explique, ›en raison de l’Evangile’, ›ah’. L’annonce vient après le témoignage. D’abord vivre comme chrétien et, s’ils t’interrogent, fais-le. Le témoignage est le premier pas. Le protagoniste de l’évangélisation n’est pas le missionnaire, c’est l’Esprit Saint qui conduit les chrétiens missionnaires à rendre témoignage. Puis, les questions arriveront ou non. Mais le témoignage de vie est le premier pas, c’est important pour éviter le prosélytisme.
Quand vous voyez des propositions religieuses qui vont par les chemins du prosélytisme, elles ne sont pas chrétiennes. Elles cherchent des prosélytes, pas des adorateurs de Dieu et de la Vérité. Je profite de dire cela par votre expérience interreligieuse qui est si belle. Le Premier ministre m’a dit ›ici quand l’un demande de l’aide, nous donnons la même chose à tous et personne ne s’offense, car ils se sentent frères’. Cela fait l’unité du pays, c’est très important, très, très important. Aussi dans les rencontres. Il n’y avait pas que des catholiques, il y avait des chrétiens d’autres confessions, et des musulmans, des hindous… mais tous étaient là, des frères. Je l’ai aussi beaucoup vu à Madagascar et aussi à l’acte pour la paix des jeunes [au Mozambique, ndlr]. Ce sont justement les jeunes des différentes religions qui ont voulu exprimer comment ils vivaient leur désir de paix. La paix, la fraternité, la coexistence interreligieuse, aucun prosélytisme. Ce sont les choses que nous devons apprendre pour la coexistence.
Il faudrait une boule de cristal ! J’irai en Espagne, j’espère, si je vis. Mais la priorité des voyages en Europe sont les petits pays. C’est la priorité. Puis, les plus grands.
Je reviens sur l’Afrique. Je l’ai dit lors d’un autre voyage. Il y a dans l’inconscient collectif un motto : ›l’Afrique est exploitée’. C’est une chose inconsciente. On ne pense pas ›l’Europe est exploitée’, s’il vous plaît, non ! Mais ›l’Afrique est exploitée’. Nous devons libérer l’humanité de cet inconscient collectif.
Les points les plus forts de l’exploitation – je ne sais pas en Afrique, mais dans le monde – sont dans l’environnement. La déforestation, la destruction de la biodiversité. Il y a quelques mois, j’ai reçu les aumôniers de la mer et à l’audience il y avait sept jeunes pêcheurs qui pêchaient dans un bateau pas plus long que cet avion. Il pêchaient avec des moyens mécaniques d’aujourd’hui. Et ils m’ont dit ceci : en quelques mois nous avons pris six tonnes de plastique. Au Vatican, nous avons banni le plastique, c’est en cours. Six tonnes de plastique, mais ceci est une réalité. Surtout des mers. Le plastique dans les mers… L’intention de prière de ce mois, la prière du pape est précisément la protection des océans, qui nous donnent aussi l’oxygène que nous respirons.
Puis il y a les grands poumons , un en Centrafrique, au Brésil , toute la zone amazonienne, puis il y en a une autre je ne me souviens plus. Il y a aussi des petits poumons du même genre. Défendre l’écologie, la biodiversité qui est notre vie, défendre l’oxygène… Cela m’émerveille que le plus grand combat pour la biodiversité, pour la défense de l’environnement, est mené par des jeunes. Ils ont une grande conscience, car ils disent ›le futur est à nous. Avec le vôtre, faites ce que vous voulez, mais pas avec le nôtre’. Ils commencent un peu à raisonner avec ceci.
Je pense qu’être parvenus à l’accord de Paris a été un bon pas en avant. Le dernier de Katowice a été bon aussi. Ce sont des rencontres qui aident à prendre conscience.
Mais l’été dernier, quand j’ai vu la photo de ce navire qui naviguait au pôle nord comme si de rien n’était , j’ai ressenti de l’angoisse. Et il y a quelques mois, nous avons tous vu la photographie de l’enterrement, qu’ils ont fait – je crois au Groenland. Sur ce glacier qui n’existe plus, ils ont fait un enterrement symbolique pour attirer l’attention. Que tout cela aille différemment, non ? Nous devons en prendre conscience, en commençant par les choses petites, les petites [prises de] consciences.
Les gouvernants font-ils tout [leur possible] ? Certains plus, certains moins. Là, il faut que je dise qu’à la base de l’exploitation de l’environnement… J’ai été ému par l’article du Messaggero du 10, le jour que nous sommes partis, Franca [Giansoldati] n’a pas mâché ses mots, elle a parlé de manœuvres destructives, de rapacité. Cela n’est pas seulement en Afrique, aussi dans nos villes, dans nos civilisations. Et le mot laid, laid, laid est la corruption. ›J’ai besoin de faire ceci, mais pour cela j’ai besoin de déforester ceci… J’ai besoin d’avoir un permis du gouvernement provincial, national, et je vais voir un responsable…’ Je répète littéralement ce que m’a dit un chef d’entreprise espagnol : ›la question que nous entendons quand nous voulons mener un projet est : pour moi, combien ?’. En face. Et cela arrive en Afrique, en Amérique latine, aussi en Europe. Partout. Quand on prend une responsabilité sociopolitique comme un gain personnel, on exploite les valeurs, la nature, les gens aussi.
On pense ›l’Afrique est exploitée’ mais pensons à tous les ouvriers exploités dans nos sociétés. Le capolarato [exploitation de migrants clandestins sous-payés surtout dans l’agriculture du sud de l’Italie, ndlr], ce ne sont pas les Africains qui l’ont inventé. Nous l’avons en Europe. La femme de ménage payée à un tiers de ce qu’elle devrait avoir, ça n’a pas été inventé par les Africains.
Les femmes flouées et exploitées pour se prostituer dans le centre de nos villes, ça n’a pas été inventé par les Africains. Chez nous aussi il y a cette exploitation, pas seulement environnementale, mais aussi humaine. Ceci est en raison de la corruption. Quand la corruption entre dans le cœur, préparons-nous-y car tout peut arriver.
Une autre chose dans les trois pays, mais je prends Madagascar car nous en sommes partis. Le peuple. Dans les rues, il y avait le peuple. Le peuple, convoqué par lui-même. La messe au stade [au Mozambique] sous la pluie, il y avait le peuple qui dansait sous la pluie, il était heureux. Et aussi dans la veillée nocturne et à la messe dont ils disent qu’elle a dépassé le million … Je ne sais pas, ce sont les statistiques officielles, moi je vais un peu en-dessous, disons 800’000. Mais les chiffres ne sont pas intéressants. Est intéressant le peuple, des gens qui sont venus à pied depuis l’après-midi d’avant, ont été à la veillée, ont dormi là. Je pensais à Rio de Janeiro, [à ceux qui] ont dormi sur la plage. C’était le peuple qui voulait être avec le pape. Et à vrai dire, je me suis senti humilié et tout petit devant cette grandeur de la souveraineté populaire. Et quel est le signe qu’un groupe de gens forme un peuple ? La joie. Il y avait des pauvres, des gens qui n’avaient pas mangé de l’après-midi pour être là, mais ils étaient joyeux.
A l’inverse, quand les groupes ou les personnes se détachent de ce sens populaire, de [cette] joie, ils perdent la joie. C’est un des premiers signaux : la tristesse des seuls, la tristesse de ceux qui ont oublié leurs racines culturelles. Un peuple… Avoir conscience d’être un peuple, avoir conscience d’avoir une identité, d’avoir une conscience, un mode de comprendre la réalité et cela rassemble les gens. Mais le signal que tu es un peuple et pas une élite est la joie. Cela j’ai voulu le souligner et pour cela les enfants car les parents étaient pleins de joie.
L’Afrique est un continent jeune, qui a une vie jeune. Si nous faisons la comparaison avec l’Europe, je vais répéter ce que j’ai dit à Strasbourg : la mère Europe est presque devenue la grand-mère vieillie. Nous vivons une décroissance démographique très grave en Europe. J’ai lu, dans un pays – je ne me souviens pas lequel mais c’est une statistique officielle, du gouvernement – il y aura en 2050 plus de retraités que d’actifs. Cela est tragique. Et quelle est l’origine de ce vieillissement de l’Europe ? J’ai une opinion personnelle : je pense que le bien-être est à la racine, l’attachement au bien-être. ›Je suis bien, je ne veux pas d’enfant car je dois acheter la maison, je veux voyager, un enfant est un risque, on ne sait jamais’. Bien-être et tranquillité, mais un bien-être qui te mène à vieillir.
A l’inverse, l’Afrique est pleine de vie. J’ai trouvé en Afrique un geste que j’avais trouvé aux Philippines et à Carthagène en Colombie. Les gens me faisaient voir leur enfant. ›Voici mon trésor, ma joie, ma fierté, ma victoire’. C’est le trésor des pauvres, l’enfant. Mais le trésor d’un pays. Le même geste, je l’ai vu en Europe de l’est, à Iasi [en Roumanie, ndlr]. Surtout cette grand-mère qui montrait l’enfant ›cela est ma victoire’.
Et maintenant vous avez le défi d’éduquer ces jeunes et de faire des lois pour ces jeunes. L’éducation est prioritaire en ce moment [au Mozambique], pour faire grandir avec des lois sur l’éducation. Le Premier ministre de Maurice me disait qu’il avait à l’esprit le défi de la croissance du système éducatif gratuit pour tous. La gratuité des systèmes éducatifs est importante car il y a des centres d’éducation de haut niveau, mais il faut payer. Les centres d’éducatifs gratuits il y en a dans tous les pays, mais [il faut] les multiplier pour que l’éducation parviennent à tous. La santé et l’éducation sont des sujets clefs en ce moment [au Mozambique].
J’ai lu dans les journaux à propos de ce problème de la xénophobie, mais ce n’est pas seulement un problème de l’Afrique. C’est un problème… C’est une maladie humaine, comme la rougeole. Si une maladie arrive, elle entre dans un pays, dans un continent… Et nous mettons des murs, mais les murs laissent seuls ceux qui les bâtissent. Oui, ils laissent dehors trop de gens, mais ceux qui restent à l’intérieur des murs restent seuls et battus à la fin de l’histoire par des invasions puissantes. La xénophobie est une maladie. Une maladie justifiable entre guillemets: ›non, mais la pureté de la race…’ par exemple, pour nommer une xénophobie du siècle dernier. Et les xénophobies si souvent surfent sur les soi-disant populismes politiques. J’ai dit l’autre jour ou celle d’avant, que parfois j’entends dans certains endroits des discours qui ressemblent à ceux de Hitler en 1934. On voit qu’il y a une ritournelle en Europe, mais aussi en Afrique.
En Afrique, vous avez un autre problème culturel que vous devez résoudre. Je me souviens d’en avoir parlé au Kenya: le tribalisme. Là, il faut un travail d’éducation, de rapprochement, entre les tribus différentes pour faire une nation. Nous avons commémoré il y a peu le 25e anniversaire de la tragédie du Rwanda. [C’est] un effet du tribalisme. Je me souviens, dans le stade au Kenya quand j’ai demandé à tous de se lever et de se prendre par la main et de répéter ›non au tribalisme’. Nous devons dire non. Cela aussi est une fermeture, une fermeture et aussi une xénophobie. Une xénophobie domestique, mais toujours une xénophobie. Et oui, il faut lutter contre cela, tant la xénophobie d’un pays contre l’autre, tant la xénophobie interne qui – dans certains lieux de l’Afrique et dans le tribalisme – conduit à la tragédie du Rwanda.
C’est une fermeture, mais aussi une xénophobie, une xénophobie domestique. Tant la xénophobie d’un pays avec l’autre tant que la xénophobie… le tribalisme. Cela nous rappelle la tragédie du Rwanda, par exemple.
Oui, la famille est certainement déterminante sur ce point, pour l’éducation des enfants. C’est touchant l’expression des jeunes, à Madagascar nous l’avons vu, et nous l’avons vu aussi à Maurice, et aussi les jeunes pendant l’acte au Mozambique [la rencontre interreligieuse avec les jeunes, ndlr], les jeunes interreligieux pour la paix. Donner des valeurs aux jeunes, les faire grandir.
A Madagascar, le problème de la famille est lié au problème de la pauvreté, du manque de travail, et aussi si souvent de l’exploitation fréquente des travailleurs… Par exemple dans une carrière de granit ceux qui travaillent gagnent 1,5 dollar par jour. Le droit du travail, les lois qui protègent la famille, c’est fondamental. Et aussi les valeurs familiales: elles sont là, elles existent, mais souvent ensuite elles sont détruites par la pauvreté. Pas les valeurs, mais la possibilité de les vivre, l’éducation des jeunes pour les faire avancer…
A Madagascar, nous avons vu ceux d’Akamasoa, le travail avec les petits enfants pour faire une famille, pour que les enfants puissent grandir dans une famille, artificielle c’est vrai, mais c’est la seule possibilité.
Hier, à Maurice après la messe, en sortant, j’ai trouvé Mgr Rueda [en charge des voyages du pape, ndlr] avec un policier très grand qui tenait une petite fille par la main, qui avait deux ans environ et qui s’était perdue. Elle pleurait, car elle ne retrouvait pas ses parents. La police a fait une annonce pour qu’ils viennent et ils l’ont consolée. Et j’y ai vu le drame de tant d’enfants et de jeunes qui perdent le lien familial: parce qu’ils vivent dans une famille mais à un moment ils la perdent. Là, c’était juste un incident. Et il y a aussi le rôle de l’Etat pour les encadrer et les soutenir. L’Etat doit prendre soin de la famille, des jeunes. C’est le devoir de l’Etat, le devoir de les faire grandir.
Puis, je le répète, pour une famille, avoir un enfant est un trésor! Et vous avez cette conscience que c’est un trésor. Mais maintenant, il faut que toute la société ait conscience de faire grandir ce trésor car il fait grandir le pays, il fait grandir la patrie, il fait grandir les valeurs qui donneront sa souveraineté à la patrie. Je ne sais pas si j’ai répondu plus ou moins ?
Une chose à propos des enfants qui m’a frappé dans les trois pays c’est que les gens saluaient, mais il y avait des enfants grands comme ça qui saluaient aussi, qui entraient dans la joie. Sur la joie, je dirai quelque chose plus tard.
Premier point, le processus de paix. Aujourd’hui, le Mozambique s’identifie avec un long processus de paix – qui a eu des hauts et des bas – mais qui à la fin est parvenu à cette accolade historique. Je souhaite que cela aille de l’avant, je prie pour cela. J’invite tous à faire l’effort pour que le processus de paix aille de l’avant. Car tout se perd avec la guerre ; tout se gagne avec la paix, comme l’a dit un pape avant moi. Cela est très clair, [il ne faut] pas l’oublier. Un processus de paix qui a été long car il y a eu une première étape puis c’est retombé, puis une autre. L’effort des chefs de partis contraires – pour ne pas dire ennemis – d’aller se chercher l’un l’autre… Un effort qui a aussi été dangereux, car ils ont risqué leur vie. Mais à la fin, nous [y] sommes arrivés.
Je voudrais remercier tous les gens qui ont aidé dans ce processus de paix. Depuis le début, le tout début qui a commencé avec un café. Il y avait des gens là qui parlaient, il y avait un prêtre du mouvement Sant’Egidio qui sera fait cardinal le 5 octobre [Mgr Matteo Maria Zuppi, ndlr]. Ça a commencé là, tant de gens ont aidé – y compris de Sant’Egidio – et ils sont arrivés à ce résultat. Nous ne devons pas être triomphalistes de ces choses, le triomphe est la paix. Nous n’avons pas le droit d’être triomphalistes, car la paix est encore fragile, [au Mozambique] comme dans le monde. Elle est fragile. Il faut la traiter comme on fait avec les choses nées il y a peu, avec les nouveau-nés: avec beaucoup de tendresse, avec beaucoup de délicatesse, avec beaucoup de pardon, avec beaucoup de patience pour la faire grandir et la renforcer. Mais c’est un triomphe pour ton pays. Le triomphe de ton pays est la paix. Et cela vaut pour tous les pays qui se détruisent avec les guerres. Les guerres détruisent, elles font tout perdre.
Je m’étends un peu sur ce thème de la paix car il me tient à cœur. Il y a quelques mois, avait lieu l’anniversaire du débarquement en Normandie qui a réuni des chefs d’Etat pour faire mémoire de ce qui fut le début de la fin de la guerre, une guerre cruelle – qui a aussi mis fin à la dictature anti-humaine et cruelle comme l’est le nazisme, le fascisme. Mais sur cette plage, 46’000 soldats sont restés. C’est le prix de la guerre. Je vous confesse que quand je suis allé à Redipuglia, pour la Première Guerre [mondiale], pour voir cela, j’ai pleuré. S’il vous plaît, plus jamais la guerre. Quand j’ai été à Anzio célébrer le jour des morts, le cœur se sentait ainsi.
Nous devons travailler pour créer cette conscience que les guerres ne résolvent rien, elles font gagner des personnes qui ne veulent pas l’humanité. Excusez-moi de cet écart, mais je devais le dire devant un processus de paix. Je prie, je prie pour qu’ils fassent tout pour aller de l’avant et je vous souhaite qu’elle grandisse avec force.
Ce n’était pas une erreur [de se rendre au Mozambique peu avant l’élection présidentielle] ! Ça a été une option prise librement parce que la campagne électorale – qui commence ces jours-ci – passait au second plan par rapport au processus de paix ! L’important dans cette visite était d’aider à consolider le processus de paix, c’était plus important qu’une campagne qui n’a pas vraiment commencé, qui commence ces jours-ci, à la fin de ma visite. En faisant le bilan, l’important c’était d’abord de consolider le processus puis j’ai salué les adversaires politiques pour souligner que c’était ça l’important et pas de soutenir le Président que je ne connais pas, je ne sais pas ce qu’il pense, pas plus que les autres. Pour moi le plus important était de souligner l’unité du pays. Mais ce que vous dites est vrai, nous devons nous détacher des campagnes électorales.
Je voudrais répéter la doctrine de l’Eglise sur cela. Les organisations internationales, quand nous les reconnaissons et leur donner la capacité de juger internationalement – pensons au Tribunal international de La Haye, ou à tant d’autres, aux Nations unies – eux parlent. Si nous sommes une humanité nous devons obéir ! Il est vrai que les choses qui semblent justes pour toute l’humanité ne semblent pas toujours justes pour nos poches. On doit obéir aux institutions internationales, c’est pour cela qu’ont été créées les Nations unies ou le tribunal international. Quand il y a des luttes internes ou entre des pays, on va devant ces juridictions, on peut résoudre les problèmes comme des frères civilisés…
Et puis il y a un autre phénomène – mais je le dis je ne sais pas si c’est le cas dont on parle [la question des Chagos, ndlr] – maintenant ce cas, je laisse de côté. J’ai dit ce qui me semblait juste : aller devant les organisations internationales!
Mais il y a un phénomène quand survient la libération d’un peuple, l’Etat dominant qui doit s’en aller – en Afrique il y a eu tant de libération, de la France, de la Grande-Bretagne, de la Belgique, de l’Italie… qui ont dû s’en aller. Quelques unes se sont bien passées. Mais il semble qu’il y a toujours la tentation de repartir avec quelque chose dans les poches… Par exemple, ›je donne la libération à ce pays, mais ce qui est dans le sous-sol est à moi’. C’est un exemple, je ne sais pas si c’est vrai… Il y a toujours cette tentation. Mais je crois que les organisations internationales doivent faire un processus d’accompagnement, reconnaissant aux puissances dominantes ce qu’il a fait pour le pays, reconnaissant la volonté de ce pays de s’en aller mais en les aidant car même s’ils s’en vont totalement libres et dans la fraternité, c’est un travail culturel lent de l’humanité. En cela, les institutions internationales nous aident beaucoup et nous devons aller de l’avant, en rendant fortes les institutions internationales, les Nations unies, que l’UE soit plus forte – pas dans le sens de domination mais dans le sens de justice, de fraternité, d’unité. C’est ce qui me semble important.
Mais il y a une autre chose que je voudrais dire. Si aujourd’hui il n’y a pas de colonisations géographiques – du moins pas beaucoup, peut-être un peu là – il y a des colonisations idéologiques qui veulent entrer dans la culture des peuples et changer cette culture et homogénéiser l’humanité. C’est l’image de la mondialisation comme une sphère, tous égaux, chaque point à équidistance du centre. En fait, la vraie mondialisation n’est pas une sphère mais un polyèdre où chaque peuple, chaque nation conserve sa propre identité, mais s’unit à toute l’humanité.
A l’inverse, la colonisation idéologique cherche à effacer l’identité des autres pour les rendre égaux. Ils viennent avec des propositions idéologiques qui vont contre l’identité des peuples, contre leur histoire et leurs valeurs. Nous devons respecter l’identité des peuples. C’est une promesse à défendre toujours, respecter la culture des peuples. Et ainsi nous chassons toutes les colonisations.
Je ne sais pas comment sera la communication dans l’avenir. Je me rappelle ce qu’elle était par exemple quand j’étais petit, il n’y avait pas encore la télévision, avec la radio, avec le journal, et aussi avec le journal clandestin, qui était persécuté par le gouvernement du moment, ils venaient pendant la nuit, des volontaires le vendaient, et aussi par oral. Mais c’était une communication, si nous faisons la comparaison, précaire. Et la communication de l’avenir sera peut-être précaire. Mais ce qui demeure une constante de la communication, c’est la capacité de transmettre un fait. Et de le distinguer du récit. Une des choses qui nuit à la communication du passé et à celle du présent, et peut être celle de l’avenir, c’est le récit.
Il y a une très bonne étude de Simone Paganini, de l’université d’Aquisgrana, qui parle de la mobilité de la communication. Il prend un roman entre l’écrivain et le lecteur. Et comment après cela c’est mobilisé. Comment la communication est toujours mobilisante, il est très facile de passer du fait au récit. Et cela ruine la communication. Il est important que ce soit le fait, et il faut toujours s’ajuster au fait. Même nous, je m’en rends compte dans la Curie. Il y a un fait , il fait le tour, et il revient enjolivé, maquillé. Chacun y ajoute un peu de lui. Sans intention maligne, mais c’est la dynamique. Le communicant doit toujours revenir au fait. Le fait est ceci, mon interprétation est cela, on m’a dit que… Il faut distinguer le fait du récit. Car parfois le récit est mauvais. Il y a peu, on m’a raconté le petit chaperon rouge, mais à partir du récit, et à la fin le chaperon rouge et la grand-mère font un ragoût du loup et le mangent. Le récit change la chose. Et [ce conte] était pour montrer cela.
C’est ce qui garantira que, quel que soit le média, il faut la fidélité. ›On dit que’… peut-on l’utiliser? Oui, dans la communication, mais il faut toujours avoir la mitraillette critique de vérifier l’objectivité du ›on dit que’. Il faut toujours distinguer le fait du récit. C’est une part de l’objectivité, des valeurs qui doivent prévaloir dans la communication.
La communication doit aussi être humaine, totalement humaine, c’est-à-dire constructive. C’est-à-dire qu’elle fasse grandir l’autre. Une communication ne peut être utilisée comme instrument de guerre. Car elle est anti-humaine, elle détruit. J’ai lu un article dans une revue sur les projectiles venimeux de la langue, ›les petites gouttes d’arsenic’. Elle doit être constructive, humaine, qui construit toujours l’humanité, au service de la construction et non de la destruction. Quand est-elle au service de la destruction ? Quand elle défend des projets non humains. Pensons à la propagande des dictatures du siècle passé. Il y a eu de grandes dictatures qui communiquaient bien. En Argentine nous disions : ils te vendent une boîte aux lettres, ils te vendent la poste centrale. Fomenter la guerre, fomenter la division, c’est pour la destruction. Je ne sais que te dire car je ne suis pas qualifié en la matière. Mais quelle que soit la communication – tant de la radio que j’écoutais petit, tant de ce qui viendra – il y a des valeurs qu’il faut toujours conserver, des cohérences.
XLN