Le pape François et Diego Maradona lors d'une audience générale en 2015 | capture YouTube
Vatican

François et Maradona, les deux enfants prodiges de Buenos Aires

Le footballeur argentin Diego Maradona s’est éteint le 25 novembre 2020 à l’âge de 60 ans, après une vie marquée par des exploits sportifs mais aussi un style atypique, parfois provocateur et ses dérives. Au sommet de sa gloire, le «mauvais garçon» du football a souvent été critique – voire irrévérencieux – vis-à-vis de l’Église catholique.

Longtemps tiraillé par les démons de l’alcool et de la drogue, le «Pibe del Oro” avait récemment retrouvé sa foi, notamment après l’élection du pape François. Le pontife, informé de son décès, s’est souvenu avec affection de leurs rencontres. Le footballeur Diego Maradona a longtemps été l’Argentin le plus célèbre du monde, du moins jusqu’à l’élection en 2013 de l’archevêque de Buenos Aires, Mgr Jorge Mario Bergoglio, sur le trône de Pierre. La relation entre les deux hommes les plus médiatiques de leur pays est d’autant plus forte qu’elle s’inscrit dans une véritable admiration réciproque. 

Lors du passage de Maradona au SCC Napoli entre 1984 et 1991 – période pendant laquelle il a laissé un souvenir quasi-légendaire aux amoureux du foot campanien –  le footballeur s’était rendu au Vatican. Une visite dont il aurait gardé un souvenir amer, et qui l’aurait pour longtemps éloigné de l’Église. 

L’enfant des bidonvilles de Buenos Aires a rapporté en 2017 avoir en effet été écœuré par « l’or » exposé partout dans la Cité vaticane, quand « beaucoup d’enfants en Afrique meurent de fièvre ». Connu pour son franc-parler, la légende argentine avait aussi raillé ces cardinaux qui « gagnaient comme s’ils jouaient à l’Inter ou à Naples ». Une honte pour celui qui avait connu la misère et la faim pendant toute sa jeunesse. 

Cependant, l’arrivée du pape François à Rome en 2013 a tout changé pour lui : «Je me suis éloigné de l’Église parce que je pensais qu’elle ne faisait pas assez pour les nécessiteux, mais avec François, c’est différent», déclarait-il en 2014 au site anglophone Crux. Un changement et un signe d’espoir, assurait-il encore en 2017 : «Si un Argentin peut gagner deux championnats et une Coupe de l’UEFA à Naples, [le pape François] peut lui aussi faire du bien à l’Église car il est un Argentin de plus».

1986, le traumatisme paradoxal du pontife argentin

Jorge Mario Bergoglio, grand amateur du ballon rond, appréciait grandement le bad boy du football national, quand bien même il avait fait les grandes heures des Newell’s Old Boys ou de Boca Junior, les clubs concurrents de son club de cœur, San Lorenzo. Cette passion n’est pas une façade chez le pontife : dans son livre-confession Un temps pour changer, il a raconté que le fait de n’avoir pu partager la victoire de son équipe nationale en 1986, menée par un éblouissant Maradona, parce qu’il était en Allemagne, était un des trois plus grands moments de solitude de son existence. 

Pour le pontife comme pour le «gamin en or», le football est une affaire de cœur et de peuple. Ce sont d’ailleurs ces deux dimensions qui les ont rassemblés à Rome en 2014, lors de l’organisation d’un match interreligieux pour la paix au Stade Olympique de Rome. Le joueur argentin avait été le capitaine de l’équipe du chef de l’Église catholique, portant les couleurs de son organisation Scholas Occurentes (lancée par le pontife alors qu’il était archevêque de Buenos Aires).

«Le premier fan de François, c’est moi!»

Lors de cette rencontre très chaleureuse, le footballeur n’avait rien perdu de sa morgue irrévérencieuse : «Aujourd’hui, deux puissances ont été réunies, la main de Dieu et celle du pape», faisant malicieusement référence à la main avec laquelle il avait marqué lors d’un inoubliable match de la Coupe du monde 1986. Mais s’était aussitôt ravisé: «Le pape François est bien plus que Maradona. Il est la véritable star exceptionnelle». Lors de sa seconde visite en 2016, il avait surpris les journalistes en déclarant: «Le premier fan de François, c’est moi !»

Le pape a été informé de la mort de son compatriote, a fait savoir Matteo Bruni, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège le 25 novembre. Le pontife a repensé «avec affection aux occasions de rencontre de ces dernières années» et affirmé se souvenir de lui dans sa prière, comme il l’a fait ces derniers jours depuis qu’il a appris son état de santé.

Lors d’une audience privée avant un match de gala, les deux hommes avaient évoqué «ces enfants qui partout dans le monde n’ont rien à manger». Une réalité qui les ramenaient sans doute tous les deux à leur enfance, à cette vie d’avant où ils avaient tous les deux connus les bas-fonds de Buenos Aires. (cath.ch/imedia/cd/mp)

Le pape François et Diego Maradona lors d'une audience générale en 2015 | capture YouTube
26 novembre 2020 | 09:01
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 3  min.
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