Benoît XVI, alors souverain pontife, sur la Place Saint-Pierre | © Bernard Bovigny
Vatican

«François est l’homme de la réforme pratique», assure Benoît XVI dans un livre-entretien

Dans un livre-entretien avec le journaliste allemand Peter Seewald, intitulé «Dernières conversations», qui paraît mondialement à compter du 9 septembre 2016, Benoît XVI (2005-2013) dresse de façon inédite un bilan de son pontificat et rend hommage à son successeur, le pape François.

En Italie, le quotidien «Corriere della Sera» a publié en partenariat avec l’éditeur Garzanti, la veille, de larges extraits qu’I.MEDIA a traduits. On y découvre la grande liberté avec lequel le pape émérite aborde des sujets sensibles, de sa renonciation à l’élection de Jorge Mario Bergoglio en passant par le scandale Vatileaks, le «lobby gay» et l’impossibilité de réformer la curie.

«François est l’homme de la réforme pratique», assure notamment Benoît XVI au sujet de son successeur. L’ouvrage paraîtra en France aux éditions Fayard ce 14 septembre.

Renonciation: ni un chantage, ni une fuite

«Cela n’a pas été un chantage sous la pression des événements, ou une fuite pour l’incapacité d’y faire face. Personne n’a cherché à me faire du chantage. Je ne l’aurais même pas permis. S’ils avaient essayé de le faire je ne serais pas parti parce qu’il ne faut pas abandonner quand on est sous pression. Et cela n’est pas non plus vrai que j’étais déçu ou quelque-chose de ce genre. Au contraire, grâce à Dieu, j’étais dans un état d’esprit pacifique de celui qui a surmonté une difficulté».

L’élection de Jorge Mario Bergoglio

«Mon successeur n’a pas voulu la pèlerine rouge. Cela ne m’a pas touché le moindre du monde. Ce qui m’a touché, au contraire, est qu’avant même de sortir sur la loggia, il ait voulu me téléphoner, mais il n’a pas pu me joindre parce que nous étions devant la télévision. La façon dont il a prié pour moi, le moment de recueillement, puis la politesse avec laquelle il a salué les personnes ont fait que l’étincelle a, pour ainsi dire, jailli tout de suite. Personne ne s’attendait à lui. Je le connaissais, naturellement, mais je n’ai pas pensé à lui. Dans ce sens cela a été une grande surprise. Je n’ai pas pensé qu’il était dans le groupe restreint des candidats. Quand j’ai entendu son nom, j’ai tout d’abord été incertain. Mais quand j’ai vu comment il parlait d’une part avec Dieu, et de l’autre avec les hommes, j’ai été vraiment content. Et heureux».

«L’élection d’un cardinal latino-américain signifie que l’Eglise est en mouvement, est dynamique, ouverte, avec devant soi des perspectives de nouveaux développement. Qu’elle n’est pas congelée dans des schémas: il arrive toujours quelque-chose de surprenant, qui possède une dynamique intrinsèque capable de la renouveler constamment. Ce qui est beau et encourageant, c’est que justement à notre époque il arrive des choses auxquelles personne ne s’attendait et qui montrent que l’Eglise est vivante et déborde de nouvelles possibilités».

La réforme de la curie romaine: «ce n’était pas mon point fort»

«Chacun a son propre charisme. François est l’homme de la réforme pratique. Il a été longtemps archevêque, il connaît le métier, il a été supérieur des jésuites et a aussi l’esprit pour mettre la main à des actions de caractère organisationnel. Je savais que ce n’était pas mon point fort».”

«Lobby gay» au Vatican

«Effectivement on m’avait indiqué un groupe, qu’entre-temps nous avons dissous. Il était signalé dans le rapport de la commission de trois cardinaux que l’on pouvait identifier un petit groupe de quatre, peut-être cinq personnes. Nous l’avons dissout. S’il s’en formera d’autres ? Je ne le sais pas. Mais le Vatican ne pullule pas de cas de ce genre».

Gestion du pouvoir et Vatileaks: «je n’ai pas échoué»

«L’un de mes points faibles est peut-être ma faible résolution dans ma façon de gouverner et de prendre des décisions. Ici en réalité je suis plus un professeur, qui réfléchit et médite sur les questions spirituelles. Le gouvernement pratique n’est pas mon point fort et c’est certainement une faiblesse. Mais je ne réussis pas à me voir comme une personne qui a échoué. Pendant huit ans, j’ai rempli mon service. Il y a eu des moments difficiles, il suffit de penser, par exemple, au scandale de la pédophilie et au cas Williamson, et aussi au scandale Vatileaks; mais, en général, ce fut aussi une période pendant laquelle de nombreuses personnes ont trouvé un nouveau chemin vers la foi et cela a été aussi au grand mouvement positif».

Peter Seewald a déjà écrit deux livres avec Joseph Ratzinger, dont il est très proche: «Dieu et le monde» (2001), alors qu’il était cardinal, puis «Lumière du monde» (2010), une fois devenu le pape Benoît XVI. (cath.ch-apic/imedia/bl/be)

Benoît XVI, alors souverain pontife, sur la Place Saint-Pierre | © Bernard Bovigny
9 septembre 2016 | 09:02
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 3  min.
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