France: des évêques défient les prescriptions anti-Covid
Mgr Marc Aillet, évêque de Lescar, Bayonne et Oloron, a autorisé, le 27 novembre 2020, les prêtres de son diocèse à dépasser la limite de 30 personnes prescrite par l’Etat français pour les célébrations religieuses. D’autres évêques, notamment Mgr Aupetit, de Paris, font part de leur incompréhension face aux mesures anti-Covid.
«Devant le caractère inapplicable de cette mesure, je demande aux curés, là où c’est possible et nécessaire, de multiplier les messes et je les autorise à accueillir les fidèles jusqu’au 1/3 de la capacité de leurs églises», écrit Mgr Aillet dans un message publié le 27 novembre sur le site de son diocèse.
Le prélat du Sud-Ouest de la France assure en outre que «de nombreux évêques, à commencer par l’archevêque de Paris, ont pris la même disposition». Un communiqué de l’archidiocèse de la capitale, également daté du 27 novembre, indique que «Mgr Michel Aupetit invite tous les curés des églises de Paris à célébrer dans le strict respect des distances et des gestes barrière, comme ils l’ont toujours fait. Chacun veillera à limiter le remplissage de son église sans pour autant laisser qui que ce soit à la porte».
Contre l’avis de la CEF
Ces annonces semblent aller contre l’avis de la Conférence des évêques de France (CEF). Elle a décidé de déposer, le 27 novembre 2020, un «référé liberté» au Conseil d’État contre la jauge de 30 personnes pour les célébrations religieuses. Mais, en attendant également les résultats d’un rendez-vous, le 29 novembre, entre Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la CEF, et le Premier ministre Jean Castex, la conférence épiscopale a assuré que «les règles fixées par le Premier ministre sont en vigueur même si nous sommes tous conscients des grandes difficultés dans lesquelles ces décisions gouvernementales placent les fidèles».
La limite des 30 personnes pour les messes, à partir du 28 novembre, a provoqué une levée de boucliers dans l’épiscopat français. Après l’appel à Emmanuel Macron à l’issue de son discours du mardi 24 novembre, les évêques attendaient la mise en place d’une «jauge réaliste», qui tiendrait compte de la place disponible dans les églises. «Imposer une jauge en valeur absolue (30 personnes) est une décision qui relève de l’absurde, affirme ainsi l’archidiocèse de la capitale. Pour une ville comme Paris, avec une population dense et des paroisses qui accueillent chaque week-end plusieurs centaines de personnes, cette décision imposerait de multiplier le nombre de messes à un rythme insoutenable pour toute équipe pastorale, quelle que soit sa taille, sans pouvoir, en tout état de cause, accueillir au final tout le monde».
Sentiment d’injustice
Les évêques réfractaires ressentent un sentiment d’injustice. Ainsi, pour Mgr Aillet: «Beaucoup de catholiques ont vu dans cette disposition une forme de mépris et l’expression d’un désintérêt affiché pour la dimension religieuse et spirituelle de la vie de millions de croyants». Il s’étonne de ce que le principe de proportionnalité qui prévaut depuis le 28 novembre dans les commerces de France ne soit pas de mise pour les lieux de cultes.
«Les catholiques sont conscients de l’effort de solidarité nationale auquel il leur faut participer pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 et ils entendent prendre leurs responsabilités, en respectant des mesures sanitaires strictes, comme ils l’ont déjà montré lors du premier déconfinement, estime l’évêque de Lescar, Bayonne et Oloron. En ce sens, il est injuste de déclarer que les assemblées cultuelles sont des lieux de contamination, quand jamais aucun cluster n’y a été identifié.»
Entre-temps, le 29 novembre, le Conseil d’Etat français a suspendu la mesure de limitation des messes à 30 personnes. Il a été donné trois jours au gouvernement pour imaginer un autre dispositif, plus respectueux de la liberté de culte. (cath.ch/com/rz)