Le sanctuaire de Fatima, au Portugal | © Tania Mousinho/Unsplash
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«Fatima est indissociable de l'identité des catholiques portugais»

Lors de son voyage au Portugal du 2 au 6 août à l’occasion des Journées mondiales de la jeunesse à Lisbonne, le pape François se rendra le 5 août au sanctuaire de Notre-Dame de Fatima, à une centaine de kilomètres de la capitale. Aura Miguel, journaliste portugaise qui couvre l’Église depuis plus de 35 ans pour Radio Renascença – de la Conférence épiscopale portugaise –, et autrice d’un livre sur Fatima, explique à l’agence I.MEDIA le rôle que joue ce sanctuaire pour les catholiques portugais et ses relations étroites avec les papes et leur mission.

Selon la tradition, la Vierge Marie est apparue six fois entre le 13 mai et le 13 octobre 1917 à Francisco et Jacinta Marto et à leur cousine Lucia dos Santos, trois enfants bergers, sur le lieu où est construit le sanctuaire. Les enfants ont rapporté que la Vierge Marie leur avait confié trois secrets, dont une partie a été révélée en 1941 et une autre en 2000. La Mère de Dieu a demandé de prier pour la paix dans le monde et encouragé la dévotion à son cœur Immaculé.

Que signifie le sanctuaire de Fatima pour la population portugaise?
Aura Miguel: C’est le cœur de la mère qui est là, cette présence maternelle est incontournable pour les catholiques portugais. Il existe un phénomène très intéressant: de nombreuses personnes qui ne sont pas très pratiquantes ne manqueraient pas les célébrations de Fatima. Il y a une sorte de cordon ombilical silencieux qui lie les Portugais à Fatima. Et pas seulement dans les moments de grandes célébrations, comme c’est le cas le 13 de chaque mois entre mai et octobre – les six mois des apparitions. Il y a aussi beaucoup de gens qui s’y rendent seuls la nuit, par exemple. C’est un lieu de grande paix, même en dehors des grands moments.

«Jean Paul II a dépassé Pie XII comme pape de Fatima»

Fatima est absolument indissociable de l’identité des catholiques portugais. Lorsque le pape Benoît XVI a débarqué à Lisbonne en 2010, il a déclaré qu’au Portugal, en 1917, une fenêtre d’espoir s’était ouverte sur Fatima, et c’est une grande lecture de cet événement. Cette fenêtre jaillit de ce message, si fort et si simple, avec un grand potentiel de paix pour le monde, parce qu’il a été confié à trois enfants simples et illettrés et qu’il est donc accessible à tous. C’est une belle chose à témoigner.

En avez-vous été témoin?
J’y étais en tant que journaliste pour les célébrations du 13 mai cette année. Les messes sont très longues et c’est toujours en plein soleil, sans ombre. À la fin, lors de la bénédiction pour tous les fidèles, qui avaient particulièrement rempli le sanctuaire après les années de pandémie, il y a eu un silence qui été total. J’entendais les oiseaux, c’était comme s’il n’y avait personne.

Fatima est une force silencieuse qui, je pense, révèle la foi qui existe encore dans le cœur des Portugais et qui ne fait pas la Une des journaux. Mais au fond, je pense que c’est ce potentiel qui aide le pape à être pape, et qui aide aussi chacun d’entre nous à faire face aux difficultés qui surgissent dans la vie de tous les jours. Il nous aide à avoir cette espérance que Dieu n’abandonne jamais son Église, quels que soient les problèmes qu’elle endure et qu’elle traverse.

Que signifie la visite d’un pape au sanctuaire de Fatima?
Je considère que Fatima est inséparable du pape, quel qu’il soit. Dans les apparitions du 13 juillet 1917, la Vierge Marie a révélé un secret aux petits bergers, prophétisant que le Saint-Père aurait beaucoup à souffrir. Le message de Fatima a toujours été lié au pape, nous l’avons vu dès la première heure, surtout depuis Pie XII. Il s’y est toujours senti très lié parce qu’il a été ordonné évêque le 13 mai 1917, exactement à la date de la première apparition. Il a échangé une correspondance avec Sœur Lucia et était connu comme «le pape de Fatima». Pie XII ne s’est pas rendu à Fatima car les papes ne voyageaient pas à l’époque. Paul VI est venu à Fatima pour le 50e anniversaire des apparitions en 1967, au moment des bouleversements du Concile, pour une visite rapide d’une journée.

«Fatima est une force qui génère la paix, et Benoît XVI a dit que cela l’aidait aussi à être pape»

Puis il y a eu la tentative d’assassinat de Jean Paul II, le 13 mai 1981. Il a dépassé Pie XII comme pape de Fatima. Lui-même a assuré que son pontificat n’avait duré que 3 ans, de 1978 à 1981, jusqu’au jour de l’attentat et le reste fut un miracle de Notre-Dame de Fatima, avec tout ce que cela impliquait. Jean-Paul II est ensuite venu trois fois à Fatima, l’année suivant l’attentat en 1982, dix ans après l’attentat en 1991 et en 2000, au milieu du Jubilé, pour béatifier les petits bergers. Puis le pape Benoît XVI est venu en 2010. Le pape François s’y est rendu pour le centenaire des apparitions en 2017 [et la canonisation des petits bergers, ndlr]. C’est un pontife très marial. Lors des Journées mondiales de la jeunesse à Rio de Janeiro, il s’est également rendu au sanctuaire de Notre-Dame d’Aparecida.

En quoi le sanctuaire de Fatima est-il toujours d’actualité?
Benoît XVI en a donné la clé lors de sa venue en 2010. Dans l’avion qui le conduisait à Lisbonne, il a rappelé qu’une grande partie du troisième secret était liée à la tentative d’assassinat de Jean Paul II, mais qu’il y avait aussi une autre partie. Celle-ci s’adresse toujours à tout le monde et concerne la souffrance de l’Église et celle du pape, inhérente à sa vocation de Pierre. C’est là que la phrase du pape Benoît XVI est devenue célèbre: «Les attaques contre le pape et contre l’Église ne viennent pas seulement de l’extérieur, mais les souffrances de l’Église viennent proprement de l’intérieur de l’Église».

En arrivant à Fatima, il a également rappelé que ceux qui pensent que Fatima n’est plus d’actualité se trompent, car la question de la conversion est permanente et exigeante, et toujours plus urgente. Il a même souligné que l’adhésion des petits bergers, qui ont répondu oui aux demandes de la Vierge, était nécessaire pour sauver le monde. Comme il l’avait déjà rappelé dans l’explication théologique qui a accompagné la publication du secret en 2000, alors qu’il était encore préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi, il a expliqué que quiconque adhère à Fatima, quiconque dit oui aux demandes que la Vierge a faites, génère une force pour le bien. Fatima est donc une force qui génère la paix, et Benoît XVI a dit que cela l’aidait aussi à être pape. (cath.ch/imedia/ic/rz)

Le sanctuaire de Fatima, au Portugal | © Tania Mousinho/Unsplash
30 juillet 2023 | 07:15
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 5  min.
Fatima (66), Jean Paul II (161), JMJ (239), JMJ de Lisbonne (71), Portugal (67)
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