«Etre chrétien, c'est quoi ?»
Pour le carême 2016, Mgr Morerod et Mgr Gmür s’interrogent sur l’identité chrétienne, tandis que Mgr Lovey invite à franchir les portes de la miséricorde. Lors de la préparation à Pâques, les évêques publient chaque année une lettre pastorale lue dans toutes les églises de leur diocèse. Cath.ch en propose un bref panorama.
«Être chrétien, c’est quoi ?»
«Être chrétien, c’est quoi ?» Telle est la question de Mgr Charles Morerod dans sa lettre pastorale de Carême 2016. A l’heure où «beaucoup pensent que si on éliminait toute religion le monde irait mieux», l’évêque de Lausanne, Genève et Fribourg rappelle qu’être chrétien, c’est être avec le Christ.
Dans son message qui sera lu dans les paroisses le 21 février, Mgr Morerod avoue avoir écrit d’abord une autre lettre et y avoir renoncé «parce que je me suis dit que je ne pouvais pas faire comme si je n’étais pas conscient de certains faits qui ternissent notre image.» «L’actualité nous donne de la religion l’image d’un facteur de violence, à tel point que beaucoup pensent que si on éliminait toute religion (toutes ayant leur histoire de violence) le monde irait mieux. Et dans ces conditions il nous est devenu difficile de parler de thèmes moraux, parce qu’on nous invite à balayer devant notre porte et à laisser les autres tranquilles.
Faut-il pour autant se taire et cacher sa foi ? Non répond l’évêque car l’Eglise n’a jamais prétendue être une communauté de parfaits. Si elle l’était «qui de nous s’y sentirait invité?«. «Ce ne sont pas les bien portants qui ont besoin de médecins, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs», disait déjà Jésus (Marc 2,17) «Etre chrétien, ce n’est pas d’abord être une partie d’un groupe plein de défauts. C’est être avec le Christ, partager sa vie dans son Corps qui est l’Eglise, qui se nourrit de l’Eucharistie en écoutant l’Evangile. Identifier notre foi à nos fautes, c’est une erreur : ce qui est juste, c’est de nous comparer à l’Evangile.»
Et l’évêque de reprendre l’image de «l’hôpital de campagne» chère au pape François. «Le grand mouvement de l’année de la miséricorde montre où nous mettons notre espérance : dans le pardon de Dieu. […] Le pardon de Dieu renouvelle le monde de l’intérieur : sans pardon, il n’y a vraiment pas d’espoir, même entre nous.»
«Vous voulez savoir ce que c’est un chrétien ? Regardez le Christ, ne me regardez pas moi, je n’en vaux pas la peine, lui si !», conclut Mgr Morerod.
Aux portes du carême, un temps favorable
Dans son message de carême du 14 février, Mgr Jean-Marie Lovey revient aussi sur la miséricorde, à travers le symbole des portes saintes ouvertes dans les églises. «Elles attendent que nous en franchissions le seuil, pour faire l’expérience de l’amour de Dieu qui console, pardonne, et redonne l’espérance», relève l’évêque de Sion .
«Notre carême est un temps favorable parce qu’il ressemble à une porte. Cette porte ouvre sur une part d’inconnu, mais qui laisse pressentir quelque chose de mieux», note Mgr Lovey. «Nous avons tous besoin d’être consolés. De nombreuses personnes vivent dans une solitude difficile, parfois déshumanisante. Dieu console parce que, littéralement, il ›vient avec’ celui qui est seul.»
«Nous avons besoin d’être pardonnés, poursuit l’évêque de Sion. […] Se reconnaître faibles, pécheurs, n’est ni humiliant ni culpabilisant ni traumatisant ! Au contraire, . C’est un chemin qui permet de découvrir qui est Dieu dans son être même. Dans sa vie, en perpétuel jaillissement, Dieu est Miséricorde.»
Après avoir accueilli le pardon, l’èvêque de Sion invite a mettre en pratique les œuvres de miséricorde
«Ce serait merveilleux que chacun s’engage à accomplir une des œuvres proposées par le pape […] Je propose plutôt que les chrétiens se retrouvent, dans le cadre de leurs mouvements, de leurs paroisses, de leurs familles ou plus informellement encore, à deux ou trois. Avec l’aide de leurs pasteurs, qu’ils lisent le texte du pape et qu’ils se déterminent sur le choix de l’œuvre de miséricorde qu’ils entendent accomplir. Cet exercice est lié au sens même du Jubilé, qui se vit essentiellement dans sa dimension communautaire.»
Le passeport chrétien
Pour sa lettre pastorale de carême qu’il a également déclinée en vidéo, l’évêque de Bâle, Mgr Felix Gmür revient lui aussi sur la question de l’identité chrétienne. «Et nous, qui sommes chrétiens ? Quelle est notre identité ? Si nous avions un passeport chrétien, on y trouverait sûrement le symbole des Apôtres. […] C’est une partie de notre identité chrétienne, notre identité officielle, pourrait-on dire.”
Mais pour l’évêque de Bâle, cette identité n’est pas figée. Elle se renouvelle sans cesse dans la relation avec Dieu et avec les autres. ” A chaque célébration de l’eucharistie, qui est une célébration d’action de grâces, nous interprétons notre histoire avec Dieu. Nous sommes là, avec notre nom, nous professons notre foi et nous rendons grâce. Nous nous assurons de notre identité. Avec un nom, une profession de foi, une action de grâces. C’est toujours pareil. C’est nouveau à chaque fois.»
«Ce n’est pas sans conséquence. La gratitude envers Dieu se manifeste dans la solidarité envers les autres et les étrangers, poursuit Mgr Gmür. […] Celui qui a lui-même été étranger ne peut pas exclure les étrangers de la fête. Non parce qu’on ne pourrait pas fêter sans eux. Pas non plus parce que leur présence serait la garantie que la fête soit plus belle. Mais parce que les étrangers ont part, comme tous les autres, à la vie en abondance. […] L’identité chrétienne vécue est la réponse que nous donnons à notre Dieu qui, à travers toute l’histoire, se montre solidaire des étrangers, des méprisés, des pécheresses et des pécheurs et qui, finalement, s’est fait homme en Jésus Christ.
«Je nous souhaite à nous tous et toutes le souffle qui nous permet de vivre et d’affermir notre identité chrétienne, à voix forte ou peut-être à voix basse», conclut Mgr Gmür. (cath.ch-apic/mp)