De nombreux lieux saints auraient été victimes de déprédations dans le Tigré (Ethiopie) | photo d'illustration: un lieu de culte orthodoxe à Aksum © Rodd Waddington/Flickr/CC BY-SA 2.0
International

Ethiopie: de plus en plus d’églises et de monastères fermés au Tigré

Un nombre croissant d’églises et de monastères sont abandonnés au Tigré, au nord de l’Ethiopie, à cause du conflit sécessionniste en cours, a déclaré la Conférence des évêques catholiques d’Ethiopie (CBCE), le 2 août 2022. Les évêques ont aussi alerté sur la situation humanitaire difficile dans la région.

A la fin de leur assemblée plénière, fin juillet à Addis-Abeba, les évêques catholiques d’Ethiopie ont alerté sur le nombre croissant de départs de prêtres du diocèse d’Adigrat Hagere, chef-lieu du Tigré, ainsi que la fermeture des monastères et autres lieux de culte.

Des lieux saints pris pour cibles

Les journalistes ne peuvent pas accéder à la zone et ce qui s’y passe est encore largement inconnu. Des survivants ont toutefois rapporté des massacres de civils et de religieux, des viols, des pillages, ainsi que des détériorations de lieux saints. Louis-Marie Bonneau, chercheur associé à l’European Centre for Law and Justice (ECLJ), rapporte dans la revue de géopolitique Conflits que de nombreux civils de l’ethnie Irob, majoritairement catholique, ont été tués par les forces érythréennes et que des personnes ont fui dans les montagnes pour sauver leur vie. Les catholiques représentent une toute petite minorité au Tigré, dont 95% de la population est orthodoxe.

L’éparchie catholique d’Addigrat rapporte aussi de nombreux pillages et dégradations de bâtiments publics et privés par les forces du gouvernement fédéral éthiopien et par les forces érythréennes. Les bâtiments détenus par l’éparchie, comme la résidence des prêtres, l’université agricole Sainte-Marie de Wuqro, la clinique et l’école d’Edaga Hamus auraient été endommagés et complètement pillés. L’association non gouvernementale Europe External Program with Africa (EEPA) a également recueilli un témoignage de l’attaque du monastère de Debre-Damo à l’artillerie lourde par l’armée érythréenne en janvier 2021.

Une région coupée du monde

Comme la population locale, le clergé souffre ainsi de l’insécurité latente et de la crise humanitaire qui dure depuis le début du conflit civil entre le gouvernement éthiopien et la province du Tigré, en novembre 2020.

La situation reste en effet encore très précaire, même si les violences ont largement diminué. Une «trêve humanitaire» a en effet été décrétée fin mars par le gouvernement éthiopien, et respectée par les forces armées tigréennes. Grâce à cette accalmie, l’aide humanitaire continue d’arriver dans le Tigré. Entre le 1er avril et le 1er août 2022, 6’105 camions ont été acheminés dans la province, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’Onu (OCHA). Malgré cela, les habitants sont toujours coupés du reste du pays et luttent pour satisfaire leurs besoins fondamentaux.

Espoirs de paix

La CBCE a appelé le gouvernement et les populations à travailler ensemble pour que tous les Ethiopiens puissent vivre en paix et assurer leur survie. Les évêques ont dit prier pour que les négociations politiques prévues soient achevées avec succès. Ils ont assuré de la disponibilité de l’Eglise catholique pour faire de la discussion nationale un succès. Le 14 juin 2022, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a pour la première fois évoqué de possibles négociations de paix avec les représentants tigréens. Il a révélé la mise en place d’un «comité» sur le sujet.

Le Tigré est considéré comme un haut lieu du christianisme africain, notamment avec ses onze églises troglodytes monolithiques médiévales datant du XIIIe siècle, situées près de Lalibela. (cath.ch/ibc/ag/arch/rz)

De nombreux lieux saints auraient été victimes de déprédations dans le Tigré (Ethiopie) | photo d'illustration: un lieu de culte orthodoxe à Aksum © Rodd Waddington/Flickr/CC BY-SA 2.0
7 août 2022 | 16:05
par Ibrahima Cisse
Temps de lecture : env. 2  min.
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