Etats-Unis: Une semaine avant la sortie du film «La Passion du Christ», la polémique fait rage
Controverses et colères alimentent les futurs bénéfices
New York, 19 février 2004 (Apic) La polémique fait rage aux Etats-Unis sur «La Passion du Christ» de Mel Gibson, une semaine avant sa sortie officielle sur les écrans aux Etats-Unis et dans le monde. La controverse est vive, les débats passionnés. Les réactions de colères sont nombreuses, à la mesure des récupérations politiques opérées par les uns et les autres. Quant au film, il pourrait rapporter gros. Très gros.
A moins d’une semaine de sa sortie sur les écrans du monde entier, le film de Mel Gibson décrivant les douze dernières heures de la vie de Jésus déchaîne les passions. Des organisations juives américaines ont déclenché une véritable campagne contre «La Passion du Christ», que les spectateurs pourront voir le 25 février, Mercredi des Cendres. Même le Vatican est interpellé, tandis que Gibson rejette toute accusation d’antisémitisme.
Ce film qui, pour certains détracteurs, flatte l’orgueil de Mel Gibson, catholique traditionaliste, pourrait devenir un succès commercial avec une large distribution et un soutien attendu de la part de la communauté chrétienne évangélique aux Etats-Unis qui représenterait un tiers de la population.
Dans ce contexte, certains observateurs de Hollywood pensent que le film, dont la sortie est programmée le 25 février, pourrait rapporter 25 millions de dollars la première semaine.
Les leaders évangéliques conservateurs ne cachent pas que la description dans le film des dernières heures de la vie de Jésus pourrait représenter une aubaine et devenir un instrument d’évangélisation; le site web de l’Association nationale des évangéliques affiche un lien avec le film et exhorte ses membres à «aider à faire de la sortie de ce film la plus grande première de l’histoire».
Un homme d’affaires du Texas, Arch Bonnema, laïc, de la Convention baptiste du Sud, a déjà dépensé 42’000 dollars pour acheter 6’000 billets d’entrée et les distribuer aux membres de sa communauté.
Morris Chapman, un leader évangélique, cité le 5 février dans le «The New York Times», a même déclaré que le film pourrait devenir «un catalyseur de l’éveil spirituel dans cette nation». «Je ne connais rien, depuis les croisades de Billy Graham, qui ait autant le potentiel de toucher autant de vies», a dit Chapman, président du Comité exécutif de la Convention baptiste du Sud.
Inquiétudes
Des inquiétudes ont aussi été exprimées par des responsables juifs et certains groupes protestants et catholiques qui collaborent dans le domaine du dialogue interreligieux. Ils craignent que la description des juifs dans le film n’alimente l’antisémitisme.
Dans un discours du 6 février, Abraham Foxman, directeur national de la Ligue anti-diffamation, un groupe juif influent, dit ne pas croire que Mel Gibson soit antisémite, mais que le film pourrait avoir de graves répercussions.
Devant une telle polémique, la Commission des relations interconfessionelles du Conseil national des Eglises des Etats-Unis, la plus grande organisation oecuménique du pays, a récemment publié un «guide de réflexion sur le film». La Commission, tout en reconnaissant que ses membres n’ont pas encore vu le film, a averti que les «descriptions dramatiques de l’histoire de la Passion ont une histoire tragique. Excités par de telles représentations, certains chrétiens ont étiqueté les juifs comme ceux qui ont tué le Christ, ce qui a parfois conduit à des actes de violences contre des juifs».
Manipulations
Maia Morgenstern, l’actrice roumaine qui joue le rôle de Marie dans le film, et dont les parents ont survécu à la shoah, ne considère pas le film comme antisémite. S’il y a un message, c’est plus celui de la manipulation du peuple par ses leaders, a-t-elle dit dans une interview accordée à «Associated Press».
Quant à Mel Gibson, il nie tout antisémite à ce film et justifie la violence montrée dans le film. «Je pense que cela dépasse ce que l’on peut supporter et que l’on peut ainsi se rendre compte de l’énormité du sacrifice (de Jésus)», a-t-il commenté. (apic/eni/pr)