Des athlètes de l'Athletica Vaticana se retrouveront-ils au village olympique des JO de Los Angeles en 2028? | © KEYSTONE/Laurent Gillieron
Vatican

Le Vatican veut aller aux JO 2028 et affine son profil olympique

Entamée sous Jean Paul II par la mise sur pied d’une équipe de football, la politique sportive du Vatican s’est intensifiée ces dernières années avec quatre disciplines affiliées à des fédérations olympiques. Alors qu’il en manque une cinquième pour participer aux Jeux Olympiques (JO), le processus s’accélère en vue de Los Angeles 2028. Et à 88 ans, François s’impatiente. 

25 juillet 2024. A la Cité du Vatican, la participation du plus petit État du monde aux JO se fait sur papier. Le Saint-Siège, qui n’a envoyé aucun athlète dans la capitale française, s’est contenté d’une lettre adressée aux 10’500 sportifs venus du monde entier. L’Athletica Vaticana, organisation faîtière des athlètes du Vatican et auteure du message, évoque «la paix et des antidotes aux jeux de guerre», visant une virtuelle médaille d’or du «marathon de la vie». Elle y réclame une trêve olympique de paix face aux guerres qui se sont multipliées sur la planète.

Sans «crier gare» et conscient de l’influence du sport sur la conscience collective, le pape appelle à accélérer le processus de participation du Saint-Siège aux prochains Jeux Olympiques. Avec son adhésion à quatre disciplines affiliées à des fédérations olympiques – alors qu’il en faut cinq – le Vatican, seul État souverain à n’avoir jamais participé aux JO, vise le rendez-vous de Los Angeles en été 2028.

Jean Paul II, pionnier sportif

Grand sportif, le pape Jean Paul II a été à l’initiative de la création de l’équipe vaticane de football. Des gardes suisses, des fonctionnaires du Saint-Siège et des prêtres essentiellement avaient livré leur premier match en 1994 contre Saint-Marin, minuscule république enclavée en Italie. Le score nul avait rassuré Jean Paul II. «Nous sommes une jeune équipe, un match nul équivaut à une victoire», s’était-il réjouit, lui qui souhaitait déjà une adhésion rapide à la FIFA, la Fédération internationale de football association. Trente ans plus tard, l’équipe a accumulé des résultats mitigés et bien que la légende italienne Giovanni Trapattoni se soit proposée pour l’entraîner en 2010, sa retentissante défaite 4 à 21 face au Borussia Mönchengladbach a fini de doucher les rêves de titres du Vatican.

Dès lors, «les Jaunes», comme on les surnomme, se consolent avec des matchs symboliques face à de toutes petites équipes comme la Palestine, Monaco ou encore le club liechtensteinois du FC Schaan Azzuri. Et la belle victoire des «Jaunes» 5 à 1 face aux Suisses du SV Vollmond, en 2006, n’a pas suffit pour les faire émerger sur la scène du football. Depuis son élection et bien que passionné de foot, François, inaltérable supporter de l’équipe argentine du ballon rond, a préféré orienter le Vatican vers d’autres disciplines.

François, le sprinter

L’évêque de Rome sait mieux que quiconque l’impact que peut avoir une participation de la cité dont il est le souverain aux JO. A défaut, pour Paris 2024, l’Athletica Vaticana, créée en 2019 et déjà membre de l’Union Cycliste Internationale, s’est donc contentée d’adresser une lettre aux participants. Mais depuis 2021, le souverain pontife a nommé Mgr Emmanuel Gobilliard délégué au JO Paris 2024, pour «faire le lien entre l’Église et le sport». Ce dernier sait qu’au-delà du symbole le pape vise Los Angeles 2028.

Fin septembre 2022, le Conseil pontifical pour la culture avait d’ailleurs organisé un colloque sur le sport en présence du pape François et de Thomas Bach, le président du Comité olympique international. En fondant en 2016 le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, François a inscrit «le rayonnement sportif» dans les missions confiées à Mgr Kevin Farrell. Le prélat américano irlandais, élevé au cardinalat peu après sa nomination à la tête dudit dicastère, a déjà décroché l’adhésion du Saint-Siège aux fédérations olympiques de padel, d’athlétisme, de taekwondo et de cyclisme. Pour être présent aux JO de Los Angeles, le Vatican doit encore conquérir une cinquième fédération.

Le cricket et le basket

«Nous misons beaucoup sur le cricket et le basket», chuchote-t-on à San Callisto où, au chœur de la vieille Rome, siège le dicastère en charge du sport. La St. Peter’s Cricket Team «a entamé la procédure de son adhésion à la fédération du cricket», confie-t-on à ce même dicastère où l’on se réjouit de sa brillante tournée en Angleterre et où le club papal de cricket a affronté l’équipe senior de Wormsley Estate le 29 juin dernier. Le basket est une alternative dont le pape dit «qu’il nous élève vers les cieux», une autre passion de François qui a reçu les joueurs de la NBA au Vatican en 2020 et à confié «regarder quelques-uns de leurs matchs». C’est aussi une discipline sur laquelle la cité papale mise pour être au rendez-vous à Los Angeles. Les chances sont bonnes du côté du Vatican. En attendant, François, qui faiblit sous le poids de l’âge, s’impatiente.

Los Angeles en ligne de mire

Le pontife argentin qui fêtera 88 ans en décembre prochain aura du mal à se rendre à Los Angeles en 2028, même s’il est encore en fonction. Mais cet éternel voyageur qui, pour le seul mois de septembre visitera l’Indonésie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Timor oriental, Singapour, la Belgique et le Luxembourg, peut surprendre. Encore faudrait-il que le Vatican ait son comité olympique. «Nous n’avons jamais été aussi proche», constate-t-on au dicastère en charge du sport. Et Saint Sébastien n’y a certainement jamais été autant invoqué, car le secours du saint patron des sportifs reste nécessaire. En attendant, le Saint-Siège a déjà prévenu: sa participation aux Jeux Olympiques «sera un marathon des valeurs» qui manquent tant à notre monde.

A Paris, Mgr Gobilliard espère «des sportifs du pape à Los Angeles 2028». D’ici là, un président du Comité Olympique du Vatican devrait être élu. En attendant, l’Athletica Vaticana se réjouit d’avoir pris part, en juin dernier, au Championnats des Petits États d’Europe, à Gibraltar, où elle a obtenu une troisième place historique aux 110 mètres haies. Loin de se décourager, Giampaolo Mattei, présidant la faîtière sportive du Vatican, a préféré pour sa part se concentrer sur la remise aux clubs pour l’occasion du bâton de relais «signé et béni par le pape». (cath.ch/msc/bh)

Des athlètes de l'Athletica Vaticana se retrouveront-ils au village olympique des JO de Los Angeles en 2028? | © KEYSTONE/Laurent Gillieron
5 août 2024 | 17:00
par Max Savi Carmel
Temps de lecture : env. 4  min.
Cyclisme (13), Emmanuel Gobilliard (5), football (61), JO (2), Sport (86), Vatican (544)
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