Eglises protestantes d'Italie: Les réfugiés sont «au cœur du témoignage chrétien»
Les frontières physiques, politiques et comportementales «qui privent les individus de leurs droits, de leur dignité et de leur vie sont contraires à l’Evangile, qui nous appelle à accueillir et protéger les migrants et les réfugiés», affirme la Fédération des Eglises protestantes d’Italie (FCEI).
C’est forte de ce principe que la FCEI a organisé une conférence internationale sur la migration et l’accueil, intitulée «Living and Witnessing the Border», du 30 septembre au 2 octobre 2017 dans la ville italienne de Palerme, chef-lieu de la région de Sicile. Une bonne centaine de personnes venues d’Europe et des Etats-Unis y ont participé.
Des frontières de plus en plus impénétrables et hostiles
En introduction, le pasteur Luca M. Negro, président de la FCEI, a souligné que la question des réfugiés et de la migration était au cœur du témoignage chrétien. Il a fait remarquer que les frontières devenaient de plus en plus impénétrables: «Au lieu de constituer un point de rencontre entre les cultures, elles deviennent de plus en plus hostiles».
Diamando Vlassi, membre du Patriarcat œcuménique et représentante du Conseil œcuménique des Eglises (COE), a repris la déclaration de 2016 du Comité central du COE sur les déplacements forcés. Elle affirme que les Etats souverains peuvent contrôler les frontières, mais «dans le strict respect du droit international humanitaire». Partageant son expérience auprès des demandeurs d’asile en Grèce, à une époque de restriction accrue de la liberté de circulation en Europe, Diamando Vlassi a indiqué que la plupart des migrants souhaitent pouvoir rentrer chez eux, pour peu qu’ils puissent le faire en toute sécurité.
«C’est une chose que de voyager volontairement à la découverte de nouvelles personnes et de nouvelles cultures, mais c’en est une toute autre que d’être maltraité, persécuté, blessé et arraché de force à son pays d’origine, sans dignité ni espoir», a-t-elle déploré. «Etre privé de sa patrie est une souffrance impossible à évaluer».
65 millions de personnes déplacées de force à travers le monde
Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), en 2016, plus de 65 millions de personnes ont été déplacées de force à travers le monde. Toutefois, la plupart sont restées dans leur pays ou ont trouvé refuge dans un pays voisin. Le nombre de personnes cherchant refuge en Europe a augmenté au cours des dernières années, principalement en raison de la guerre qui fait rage en Syrie et en Irak. De nombreux réfugiés et migrants décident de traverser la Méditerranée au péril de leur vie. Des milliers sont morts en tentant de rejoindre le Vieux Continent.
Doris Peschke, secrétaire générale de la Commission des Eglises auprès des migrants en Europe (CEME), explique que les images de «vagues de migrants» diffusées dans les médias et l’utilisation de statistiques mondiales faisant état de flux migratoires sans précédent «alimentent les réactions en faveur de politiques restrictives».
«Ne soyons pas guidés par la peur»
«Nous ne nions pas l’existence de la peur, mais ne soyons pas guidés par celle-ci», a exhorté Doris Peschke. Elle a souligné la nécessité d’une analyse critique, mais également l’existence de signes d’espoir sur les plans politique et œcuménique.
Parmi ces signes d’espoir mentionnés lors de la conférence, citons l’ouverture de «couloirs humanitaires», à l’initiative de la FCEI, de la Communauté de Sant’Egidio, de la Table vaudoise (Eglise évangélique vaudoise du Piémont) et du gouvernement italien. Ce projet de coopération prévoit, sur une période de deux ans, l’octroi de visas humanitaires à 1’000 réfugiés et leur accompagnement par les congrégations et les paroisses en vue d’une pleine intégration au sein des communautés locales.
L’action de Sant’Egidio
Cette collaboration constitue un modèle que les organisateurs espèrent voir se reproduire dans d’autres pays, en particulier en Europe. Comme l’a confié Cesare Zucconi, membre de la Communauté de Sant’Egidio, «lorsque les chrétiens font face ensemble à des défis, ils sont capables de faire des choses très créatives et novatrices qui peuvent être reproduites par d’autres. Nous devons également travailler en synergie avec les autres institutions. Les Eglises ne peuvent faire face seules à la complexité à laquelle nous sommes confrontés».
Les participants à la conférence ont assisté, à Lampedusa, à une cérémonie de commémoration de la tragédie du 3 octobre 2013. Ce jour-là, une embarcation transportant plus de 500 migrants désespérés a pris feu et coulé au large de l’île italienne, faisant 368 morts. Tout au long de la conférence, les orateurs ont souligné que le désespoir causé par la guerre, les persécutions et la faim pousse les populations locales à fuir, tandis que la fermeture des frontières alimente des tentatives de plus en plus dangereuses pour trouver refuge dans un endroit sûr et démarrer une nouvelle vie. (cath.ch/coe/be)