Les dominicains: «une famille qui témoigne de la joie de prêcher l’Evangile»    

Pour clôturer le jubilé en l’honneur de ses 800 ans, l’ordre des dominicains organise un congrès international sur la mission des frères prédicateurs du 17 au 21 janvier 2017 au Vatican. 600 participants sont attendus dont une majorité de laïcs. Au terme de l’évènement, le pape François célébrera une messe en l’honneur de l’Ordre en la basilique Saint-Jean-de-Latran. A quelques heures du lancement du Congrès, l’agence I.MEDIA s’est entretenu avec le Frère Bruno Cadoré, maître des dominicains.

Que peut apporter l’expérience de l’ordre des dominicains aux réformes qui se jouent actuellement dans l’Eglise?
Frère Cadoré: Nous essayons d’inciter à continuer d’imiter la façon dont Jésus prêchait. Le pape François en parle beaucoup. La fondation de l’Ordre c’est ça, c’est un homme qui se rend compte il y a 800 ans qu’il y a besoin d’une nouvelle manière de parler de l’Evangile. Il s’interroge et réalise qu’il faut vivre comme le Christ: il faut aller à la rencontre des individus, les écouter, devenir leurs amis et leur parler de l’Evangile quand cela devient possible. L’Ordre pour l’Eglise, est une sorte de mémoire.

Nous estimons que l’Eglise va se réaliser en insufflant simplement à chaque fidèle le désir de parler de l’Evangile. Il y a trop de chrétiens dans le monde pour que l’on ne prenne pas l’audace de tous les mobiliser. Ce n’est pas seulement le pape, les évêques, les cardinaux ou les religieux, mais aussi les laïcs qui doivent être sollicités. L’Eglise est Eglise en s’y prenant ainsi.

Pourquoi organisez-vous un congrès et non pas un chapitre général?
Parce que dans un chapitre, seuls les religieux et religieuses sont conviés. Nous voulions cette fois intégrer les laïcs et réunir ainsi toute la famille dominicaine pour échanger les expériences. Nous considérons en effet que les sœurs ne parlent pas comme les hommes des évangiles, de la même façon les religieux ne parlent pas de la famille comme le font les laïcs.

Mais contrairement à un chapitre, toutes les discussions n’auront pas de validité juridique en tant que tel…
Comme dans un conseil de famille: les résolutions ne sont pas signées. La prédication, c’est une question de désir: plus on s’y mettra nombreux, plus le désir sera vif. Ce n’est pas un chapitre puisque nous ne voulons justement pas cette fois prendre des décisions mais avant tout échanger et s’enrichir.

Allez-vous aborder Amoris Laetitia et plus largement la pastorale de la famille après que le cardinal Christoph Schönborn (archevêque de Vienne et dominicain ndlr) a exprimé ses positions à ce sujet?
L’Ordre voudrait se présenter comme une famille et comme dans toute famille digne de ce nom, il y a tous les avis et parfois des conflits. Et puis à un moment, se pose la question de s’accepter comme frère et sœur, et ce sans condition. Il y a dans l’Ordre des groupes de laïcs dominicains qui échangent autour d’Amoris Laetitia, notamment pour savoir s’il faut accueillir ou non les couples qui sont dans une situation matrimoniale conforme ou pas à la doctrine de l’Eglise. Si on ne le fait pas, on ne peut pas prêcher la miséricorde. Or l’objectif est justement de témoigner de la miséricorde divine. Vivre sa foi de manière cohérente est particulièrement difficile mais comme dans toutes disciplines c’est plus facile à plusieurs.

Par rapport à la crise des vocations, l’Ordre préconise-t-il des solutions?
Je ne sais pas très bien ce qu’est la crise de la vocation, on ne le vit pas ainsi. Dans l’Ordre, nous ne sommes pas nombreux certes: quelques 6000, dont un millier en formation initiale. C’est un chiffre satisfaisant. Cela nous engage à un devoir de transmission qui nous stimule. La crise de la vie religieuse n’est pas dans le nombre de vocations mais plutôt dans le fait qu’après avoir traversé une longue période fonctionnaliste, l’Eglise doit retrouver une dimension plus spécifique.

En l’occurrence, notre spécificité c’est de vouloir créer une famille qui témoigne de la joie de prêcher l’Evangile. Il y aurait une crise si nous n’avions plus cette joie là, mais seulement envie de trouver des postes pour nos membres et faire du business. C’est précisément pour cela que l’on organise ce Congrès, pour nous donner du cœur à l’ouvrage et à la vie. (cath.ch/imedia/ah/rz)

Frère Bruno Cadoré, supérieur de l'Ordre des dominicains depuis 2010.
17 janvier 2017 | 17:54
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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