Mgr Jean-Marie Lovey, évêque de Sion, se souvient de la simplicité du pape François | © Bernard Hallet
Dossier

Des personnalités religieuses de Suisse rendent hommage à François

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Des personnalités de l’Église et d’autres religions en Suisse réagissent à la mort du pape François, le 21 avril 2025. Elles saluent la mémoire d’un pontife qui a su faire avancer la fraternité universelle et la dignité humaine.

«En partant un lundi de Pâques, le pape François laisse derrière lui, sans le vouloir, un message spirituel qui ne peut que toucher le monde», déclare à cath.ch Helena Jeppesen. La collaboratrice de l’œuvre d’entraide catholique Action de Carême a été l’une de dix délégués ‘non-évêques’ européens au Synode.

«À François, j’aimerais dire un grand GRAZIE! Sa voix pour la paix et la justice dans le monde était forte, poursuit la responsable ecclésiale. Il a été le premier pape extra-européen à changer durablement l’Église universelle. Le processus synodal de renouvellement de l’Église était important pour lui. Il y a quelques semaines encore, il avait fait annoncer une assemblée de l’Église pour 2028. Des jeunes, des femmes et pas seulement des évêques doivent y participer. Et les églises locales participeront à son organisation.»

Pour Helena Jeppesen, l’histoire de Pâques est le fil conducteur du document final du synode. «Un processus de renouvellement et de réforme de l’Église catholique qu’il a soutenu de toutes ses forces, et dans lequel le peuple saint de Dieu tout entier est le sujet de la proclamation.»

Un homme «comme tout le monde»

«Dès le soir de son élection, j’ai été surpris par son attitude, notamment lorsqu’il a demandé à la foule rassemblée sur la place Saint-Pierre de Rome de prier pour lui. J’ai senti qu’il y avait là une approche nouvelle», se souvient Jean-Marie Lovey.

«Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne s’est pas économisé», commente l’évêque de Sion à propos du décès du pape à 88 ans. Mgr Lovey évoque d’emblée sa première visite ad limina au Vatican. «J’étais nommé depuis un mois et demi et, passé le premier étonnement de voir le pape faire la queue à la cafeteria de la maison Sainte-Marthe, saluer les gens son plateau à la main, j’ai rencontré un homme ‘comme tout le monde’.»

«J’ai été très touché par le respect de l’élan populaire de la religiosité que le pape inscrit dans Dilexit Nos» – Mgr Jean-Marie Lovey

Mgr Lovey a été «ébloui» par son exhortation apostolique Evangeli Gaudium. À tel point qu’il en a fait sa devise épiscopale et qu’il a ancré son épiscopat sur la pensée du pape François. «Lorsque je lui ai dit que j’avais volé le titre de son document pour en faire ma devise épiscopale, il s’en est amusé et m’a répondu: ›faites en votre projet pastoral!’. J’ai essayé de mettre en oeuvre cette exhortation apostolique».

«Durant le pontificat du pape François, il y aura eu profusion de textes, d’orientations pastorales, de synodes et de canonisations! Au moment du bilan, je pense qu’il sera difficile de mettre un accent sur une orientation particulière», relève l’évêque de Sion. Il évoque à ce propos l’encyclique Dilexit Nos, publiée deux jours avant la clôture de la deuxième partie du Synode sur la synodalité. «Ce texte magnifique sur le Sacré-Cœur est passé inaperçu! C’est dommage. J’ai été très touché par le respect de l’élan populaire de la religiosité que le pape inscrit dans ce texte.»

«Un cadeau du ciel»

«Quand j’ai entendu l’annonce du décès de François, je me suis dit que sa mort était venue au bon moment», confie Jean-Blaise Fellay. Pour le jésuite, le pape «est allé jusqu’au bout de sa course, mais il fallait que cela s’arrête.» Le prêtre se réjouit qu’il ait pu partir un lundi de Pâques, dans la fête de la Résurrection. «C’est magnifique symboliquement, c’est un cadeau du ciel!»

«Pour moi, le meilleur de lui a été son sourire» – Jean-Blaise Fellay, sj

«Le pontificat de François a été très particulier à mes yeux, explique Jean-Blaise Fellay, non seulement parce qu’il était jésuite, mais aussi parce qu’il a été le premier pape sud-américain. Ce tournant important a souligné la mondialisation de l’Église. Elle avait déjà été amorcée avec l’élection du pape Jean Paul II, qui amenait l’Église à porter son regard vers l’Est, mais avec François, le centre de gravité s’est déplacé vers le sud.»

Certains auraient voulu qu’il soit encore plus progressiste, sur les questions des femmes par exemple, remarque-t-il. «Pour moi, le meilleur de lui a été son sourire, son sens de la fraternité, un don qui va au-delà du catholicisme et du christianisme. Il a offert un beau témoignage humain.»

Un pontificat de l’action

«Avec la mort de François, le monde perd un fervent défenseur de la dignité humaine», réagit Pascal Bregnard. Le diacre dans le canton de Fribourg salue un pontificat de «cohérence». «François traduisait en actions ce en quoi il croyait.» Directeur de Caritas Fribourg, Pascal Bregnard a été pendant longtemps responsable du département Solidarités de l’Église catholique dans le canton de Vaud. Dans ce cadre, il a collaboré avec l’association internationale Fratello, qui s’efforce d’ouvrir la porte de l’Église aux personnes pauvres et fragiles.

Il a donc suivi avec beaucoup d’attention le combat du défunt pontife pour les plus petits. «François a toujours eu à cœur ce retour aux fondamentaux de l’Évangile, en particulier la proximité envers les plus faibles, les plus pauvres. Pour lui, la foi chrétienne c’était une action concrète qui change la vie des gens.»

Il nous laisse en pèlerins d’espérance

«Sa bénédiction pascale, Urbi et Orbi, nous accompagnera toujours et nous encouragera à nous engager, malgré toutes les défaites, pour la paix, pour les plus faibles, les réfugiés et tous ceux qui sont en marge de la société», rappelle également à kath.ch Mgr Joseph Bonnemain.

 »Il mettait sa foi au service de son prochain» – Hafid Ouardiri

Pour l’évêque de Coire, «le pape François achève en ces fêtes de Pâques son pèlerinage d’espérance. Le dimanche de Pâques, le pape François a pu bénir pour la dernière fois sur terre sa ville épiscopale de Rome et le monde entier. Il a souhaité à tous les hommes ›Joyeuses Pâques’. Pâques est le passage de toutes les défaites du monde à la victoire finale de l’amour sans limites et sans fin. Dieu l’a ramené à la maison dans cet amour le lundi de Pâques. Nous restons sur terre comme des pèlerins de l’espérance.»

Aimé au-delà des religions

Hafid Ouardiri, en apprenant, le décès du pape François, a récité la Al-Fatiha, la première sourate du Coran, à son intention. L’intellectuel musulman avait rencontré le pontife lors de sa venue à Genève en 2018. Il se souvient d’un homme très accessible et ouvert. «Depuis lors, je l’ai appelé ‘le bon pape’», explique-t-il à cath.ch. «Il était aimé au-delà des religions, parce qu’il travaillait en fonction de notre identité commune. Il mettait sa foi au service de son prochain et considérait toutes les manières de croire comme autant de sagesses et de richesses à partager.»

Le directeur de la fondation de l’Entre-connaissance, à Genève, salue le rapprochement que François avait effectué avec l’islam. «C’était un homme informé sur l’islam, un érudit. À partir de là, il pouvait dépasser les murs des religions et nous permettre à tous de nous retrouver dans cet absolu spirituel qui plaît à Dieu.» Hafid Ouardiri espère que son successeur renforcera son œuvre de conciliation et de dialogue pour mener l’humanité vers la paix.

Adressant à la Communauté catholique romaine toutes ses meilleures pensées, le rabbin Eric Ackermann, de la Grande synagogue de Genève, se dit de son côté «triste pour tous mes frères et sœurs de religion chrétienne». L’annonce du décès du pape François «bouleverse toutes les communautés», affirme-t-il, qui ne peuvent que être touchées. «Je pense à ses origines modestes et combien il a prouvé au monde que ce ne sont pas celles-ci qui font l’homme, mais bien le mérite de ses actions.» (cath.ch/rz/lb/mp/bh/kath)

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