Des pères de famille dans la foi en toute simplicité
Aigle, 21 juin 2015, (Apic) «Jésus a deux outils pour rassembler les hommes: les repas et la marche», explique Pascal Bregnard. Une vingtaine d’hommes de tous horizons ont choisi la marche pour le 7e pèlerinage des pères de famille qui les a conduits de Villeneuve à Saint-Maurice du 19 au 21 juin 2015. Deux jours passés entre hommes pour échanger en toute simplicité sur leur vie de père, d’époux et d’hommes actifs. Pascal Dorsaz, responsable de la pastorale de la famille de l’Eglise catholique du canton de Vaud, a animé la démarche sur le thème «La famille avec le pape François».
Parti de Roche, a l’entrée du Chablais, le samedi matin, le groupe fait étape à l’église catholique d’Aigle. L’abbé Nicolas Glasson y célèbre la messe devant le demi cercle formé par les hommes dans le chœur de l’église. La petite troupe prend ensuite la pause pique-nique au château d’Aigle. Ils ont fait connaissance la veille. Certains, fidèles du pèlerinage, se retrouvent et les discussions vont bon train. Les nouveaux venus sont accueillis chaleureusement par les habitués. Yves, 55 ans, père d’un enfant et divorcé, participe pour la première fois. «J’ai trouvé ma place sans problème ici», reconnaît-il, «on se retrouve entre papas, c’est l’occasion de confronter nos expériences de vie et je peux parler de ma foi en toute simplicité». Simplicité, le mot est sur toutes les lèvres lorsque les uns et les autres évoquent ces deux jours d’itinérance. Loin du stress de vies professionnelle, sociale et familiale qu’ils essayent de conjuguer au mieux, ils arrivent à prendre du recul et à partager leurs soucis. «Nous sommes tout le temps sur la brèche. La vie professionnelle est de plus en plus exigeante. Ici, loin de la frénésie de la société, on peut prendre du recul et faire le point. On réalise qu’on n’est pas seul à porter ces soucis» confie Christophe D., assureur de 45 ans et père de quatre enfants. Présent depuis la première édition de ce pèlerinage, il se réjouit de retrouver les habitués. Diégo dont c’est la cinquième participation, est sur la même longueur d’onde. La notion de pèlerinage intéressait cet ingénieur en électronique de 45 ans pour avec la possibilité de partager «entre pères et entre hommes avec notre sensibilité d’homme».
Prendre du recul
«Prendre du recul, faire le point, lever le nez du guidon», autant d’expressions entendues mais la démarche de ces hommes est autant spirituelle que personnelle. Diego vient pour «passer deux jours dédiés au Seigneur, sans la famille». Christophe S., 44 ans, psychiatre, «emporté dans le courant de la vie, sans possibilité de se poser» trouve l’occasion de réfléchir à la paternité et d’échanger avec des pères croyants, ce qu’il ne peut pas faire en société ou au travail : «Dans mon entourage, peu de familles sont pratiquantes». Un avis sur lequel le rejoint Christophe D.: «L’athéisme domine dans notre société, il est difficile de parler de foi dans l’entourage professionnel et social. Ce pèlerinage est une belle occasion de renforcer et partager sa foi». Stéphane, 54 ans, éducateur spécialisé et père de deux enfants souhaitait effectuer une retraite. Il a découvert le pèlerinage grâce à sa femme. Il y a trouvé du temps pour lui et pour sa relation à Dieu. «En faisant quelque chose de bien pour moi, je fais quelque chose de bien pour ma famille».
«Sans la grâce du Père, les pères abandonnent la partie»
Pascal Dorsaz,responsable du pèlerinage depuis 2012, a orienté cette édition 2015 sur le thème de «La famille avec le pape». «Plutôt que d’inviter un conférencier, j’ai choisi de reprendre des catéchèses du mercredi du pape François dédiées à la famille et plus particulièrement des extraits consacrés à la figure du père et à son absence» explique le responsable de la pastorale de la famille de l’Eglise catholique du canton de Vaud. «A bien y regarder, le défi est le même pour tous ces pères: comment concilier la vie professionnelle et la vie familiale et quel sens donnent-ils à leur vie? Dieu ne nous veut pas comme un être rêvé, un homme idéal. Mais Il nous rejoint dans les tensions de la vie quotidienne. Sans la grâce du Père, les pères abandonnent souvent la partie». Outre les temps de prière, la messe du samedi matin, celle du dimanche et les confessions du samedi soir, les catéchèses ont jalonné le pèlerinage de temps spirituels. «Le calme des églises ou des temples où nous nous sommes arrêtés, et la foi de ces pères sont propices à des échanges de belle qualité».
Une (dé)marche spirituelle
La marche, cet «outil de Jésus», permet de créer des liens. Les groupes se font et se défont au gré du parcours. Les bribes de conversation saisies parmi les marcheurs ramènent toutes aux même préoccupations: tensions au travail, soucis avec des ados, défis professionnels à relever. Les pèlerins en profitent aussi, comme Stéphane, pour prier. «La marche favorise la prière et le silence. On se met en congé du monde» explique Diego. Chauffeur de taxi à la retraite, Joseph, 76 ans, le doyen du groupe, vient pour la première fois. «C’est une combine qui m’intéressait» raconte ce Schwytzois d’origine, qui a déjà effectué six pèlerinages à Lourdes . «Cela remplace mon pèlerinage de cette année à Lourdes. Ca me permet de remercier le Bon-Dieu et je trouve tout cela très enrichissant» dit-il. Yves, à un tournant de son existence, ressent le besoin de développer sa foi. Il va commencer le parcours Siloé (Formation de laïcs pour un ministère en Eglise dans le canton de Vaud). Ces deux jours de marche représentent pour lui un temps spirituel et un défi personnel.
Le souci de la transmission de la foi
L’abbé Nicolas Glasson accompagne le groupe comme prêtre. Comment a-t-il vécu ces deux jours au milieu de ces pères de famille? «Très bien! Cela m’intéresse de me retrouver comme ‘père’ au milieu des pères. L’exercice de ma paternité est bien sûr différent. Mais en tant que responsable des séminaristes et en tant qu’aumônier, j’ai un rapport de père à enfant. Je vis une relation d’époux à épouse avec l’Eglise et je rencontre, moi aussi, des soucis dans l’exercice quotidien de mon ministère. Elle n’a pas toujours la tête des grands jours, cette Eglise! Je souhaiterais cette épouse parfois différente. C’est ainsi», admet-il. «Je participe régulièrement au pèlerinage et j’aime avant tout la simplicité de nos échanges qui me permettent de partager de manière authentique. Je retrouve ces pères de famille comme si je les avais quittés la semaine précédente». Pour lui, ce pèlerinage «est un lieu où il vaudrait la peine d’investir un peu plus». Il se dit très chanceux de côtoyer des croyants qui ont le souci de la transmission de la foi. «Ces hommes viennent avec des problématiques sérieuses et posent de vraies questions. Je trouve très bien que l’Eglise propose des temps destinés aux hommes. Si je regarde, je croise plus de femmes en pèlerinage, dans les chorales et aux messes de semaine. Les hommes sont moins présents»
Au temple d’Ollon, la catéchèse du pape dédiée à l’absence du père retient toute l’attention. Concilier vies professionnelle et familiale est une préoccupation majeure pour les marcheurs. Les silences en disent parfois plus long que les paroles.
Encadré
Un temps entre hommes
«Pastoralement, Jésus a deux outils pour rassembler les hommes: les repas et la marche», résume Pascal Bregnard. «La pastorale de la famille était centrée sur le mariage et les couples. Je voulais l’élargir avec des temps forts», explique Pascal Bregnard. Fort de ce constat, il a eu l’idée, en 2008, de créer le pèlerinage alors qu’il était en charge de la pastorale de la famille de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud. Il entre contact avec Jean-Gabriel Tornay qui avait aussi l’idée de dédier un espace pastoral aux pères de famille. Tous deux se concertent et lancent ce pèlerinage auquel Pascal participe pour la septième fois… mais en tant que père de famille ce week-end. (apic/bh)