L'ambassadeur d'Afrique du Sud Ebrahim Rasool a été expulsé des États-Unis en mars 2025 | Wikimedia Commons
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Des catholiques critiquent les attaques de Trump contre l'Afrique du Sud

Des personnalités catholiques sud-africaines déplorent les attaques du gouvernement Trump contre leur pays. Elles rejettent notamment l’idée d’une persécution de la minorité blanche.

Le torchon brûle entre les États-Unis et l’Afrique du Sud depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, fin janvier 2025. Des tensions qui ont atteint un pic avec l’expulsion, le 14 mars, de l’ambassadeur sud-africain à Washington, Ebrahim Rasool. Il avait été déclaré «persona non grata» par le chef de la diplomatie américaine, Marco Rubio. Ce dernier l’avait accusé d’être un «homme politique raciste qui déteste l’Amérique» et le président américain.

L’expulsion d’un ambassadeur est un geste très inhabituel aux États-Unis. Mais il se place dans le cadre d’un échange de vives critiques entre Pretoria et la Maison Blanche. Donald Trump a multiplié les attaques contre l’Afrique du Sud ces dernières semaines. En février, il a annoncé couper les aides américaines au pays en dénonçant l’expropriation des fermiers blancs. Le président américain a également critiqué l’Afrique du Sud à propos de sa plainte devant la Cour internationale de justice contre Israël, accusé de mener un génocide à Gaza.

Redonner la terre volée

Donald Trump n’a exposé aucun élément probant concernant la prétendue persécution de la minorité blanche, notamment des meurtres contre les fermiers. Ces accusations avaient déjà été portées par le milliardaire en 2018 lors de son premier mandat. Elles ont été vivement démenties par le gouvernement sud-africain. Pendant la période coloniale et l’apartheid, les Sud-Africains noirs ont été systématiquement dépossédés de leurs terres. Lorsque l’apartheid a pris fin en 1994, la minorité blanche (moins de 10 % de la population) possédait la grande majorité des terres arables. Dès 2019, l’actuel président sud-africain Cyril Ramaphosa avait promis d’accélérer la réforme de la terre afin de «réparer une grave injustice historique», notait le journal Le Monde.

Fin février 2025, la Cour suprême d’Afrique du Sud a démenti les accusations de «tuerie à grande échelle» contre les blancs proférées par Donald Trump et de «génocide» contre la minorité blanche, lancées par son allié Elon Musk, rapporte la BBC.

Si des centaines de fermiers ont effectivement été assassinés ces dernières décennies, de nombreux analystes et observateurs considèrent que les motifs de ces meurtres ne sont pas raciaux mais criminels, alors que la violence sociale est une réalité endémique dans le pays.

Les blancs pas discriminés

Des personnalités catholiques sud-africaines ont assuré au média américain Crux (25 mars 2025) que la minorité blanche n’était pas discriminée. Johan Viljoen, directeur de l’Institut pour la Paix Denis Hurley, de la Conférence des évêques catholiques d’Afrique du Sud, a qualifié de «fallacieuses» les accusations selon lesquelles il y avait un génocide des blancs et de graves violations des droits de l’homme dans le pays.

Le responsable catholique s’est demandé comment un pays comme les États-Unis, qui justifie les massacres de civils à Gaza et «s’acoquine avec la dictature russe», pouvait avoir l’autorité morale de remettre en question le respect des droits de l’homme en Afrique du Sud. «Nous jouissons indéniablement de plus de droits en Afrique du Sud qu’aux États-Unis, où la liberté d’expression et la liberté d’association semblent s’être érodées», a-t-il déclaré.

Johan Viljoen, lui-même Afrikaner, a assuré avoir un droit complet de s’exprimer. «Et je peux vous dire que parmi les Afrikaners de ce pays, la grande majorité a vu les déclarations de Trump avec dérision. Ils sont allés sur les médias sociaux pour affirmer qu’il n’y avait pas de violation de nos droits. En tant que Sud-Africain né en 1961, j’ai été témoin de la transformation de ce pays, de ce qu’il était à l’époque à ce qu’il est aujourd’hui. Même 15 ans après le départ de Nelson Mandela, les progrès réalisés ici sont tout simplement phénoménaux.»

Construire une société plus respectueuse des différences

Mgr Sithembele Anton Sipuka, évêque de Mthatha (sud-est) et président du Conseil sud-africain des Églises, a confirmé à Crux que de nombreux progrès ont été accomplis. «Nous pouvons être fiers de pouvoir célébrer non seulement une Journée des droits de l’homme, mais aussi une Constitution qui donne la priorité aux droits de l’homme. Elle vise à garantir que les violations de ces droits (…) ne se reproduisent plus.»

Toutefois, des améliorations sont encore possibles, a-t-il ajouté, appelant notamment à la création d’un environnement qui permette à chacun de vivre dans la dignité. «Nous devons défendre la justice sociale et créer une société qui valorise et respecte chacun en célébrant nos différences afin de construire une nation plus inclusive et plus compatissante.» L’évêque a exhorté à agir contre le taux de chômage élevé, la violence sexiste, les mauvais traitements aux personnes âgées, ainsi que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. (cath.ch/crux/ag/arch/rz)

L'ambassadeur d'Afrique du Sud Ebrahim Rasool a été expulsé des États-Unis en mars 2025 | Wikimedia Commons
26 mars 2025 | 12:05
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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