Des bénédictins ont abusé d'élèves au collège d’Uri dans les années 1960-1970
Dans les années 1960 et 1970, deux bénédictins ont abusé sexuellement d’élèves au Collège Charles Borromée d’Altdorf (UR). C’est ce qu’ont découvert les journalistes de l’émission Rundschau de la télévision alémanique SRF. Les abus ont à l’époque été étouffés.
Le collège Charles Borromée était un lycée avec internat dans lequel des moines de l’abbaye bénédictine de Mariastein (SO) ont travaillé comme enseignants de 1906 à 1981. La SRF a rapporté en avant-première le 16 avril 2025 les principaux résultats de son enquête. Selon ses informations, deux Pères ont commis les abus sexuels sur des élèves.
Le Père Félix, décédé en 1984, aurait retenu dans les douches un élève âgé de 14 ans. Après s’être dénudé et masturbé devant lui, il l’aurait forcé à une fellation. La victime a refoulé l’abus pendant des décennies avant de s’exprimer.
Le second religieux mis en cause, le Père Notker, décédé en 2024, dirigeait la fanfare en plus de ses cours. Selon les documents obtenus par la SRF, ce moine a photographié plusieurs élèves nus et touché leur pénis – sous prétexte qu’il avait besoin de tirages pour les cours d’éducation sexuelle.
Le recteur de l’époque était au courant de plusieurs cas depuis 1975, car des parents s’étaient adressés à lui, rapporte la SRF. Malgré cela, deux ans plus tard, il avait répondu à un père indigné qui demandait la suspension immédiate du Père Notker: «L’enseignant en question a commis une faute unique de gravité moyenne (…). Une récidive n’a pas pu être constatée. Nous n’avons donc aucune raison de parler d’une prédisposition pathologique».
Le directeur de l’instruction publique était au courant
Le recteur en avait informé le directeur cantonal de l’instruction publique qui partagea son avis que les «fautes» ne justifiaient pas une exclusion immédiate de l’enseignant. Le comportement du religieux doit certes être qualifié d’«indécent», mais il ne devrait «guère être punissable », avait-il estimé.
Neuf mois après cette déclaration, le Père Notker avait tout de même été suspendu après que le père de l’élève eut menacé de rendre l’affaire publique et de déposer une plainte pénale. Après sa suspension dans le canton d’Uri, le religieux fut transféré dans une école secondaire du canton de Soleure, sans être inquiété par la justice. Il y a également participé à l’encadrement de camps scolaires mais aucun abus n’est connu pour cette époque.
Le monastère se dit «consterné et honteux».
La SRF à également donné la parole à Peter von Sury, abbé de Mariastein jusqu’en janvier 2025. «Je vous demande pardon. Pour notre communauté monastique, pour les pères qui ont fait cela à l’époque», a-t-il réagi.
Dans un communiqué, le monastère souligne en outre que Peter von Sury s’est engagé pour une «enquête complète» et qu’il a travaillé en étroite collaboration avec l’équipe de Rundschau. Mais l’émission montre aussi que lui-même n’a pas déployé suffisamment d’efforts alors qu’il avait déjà eu connaissance d’un cas au printemps 2010. Sur le site de l’Abbaye, il se dit «pleinement conscient de la gravité de cette omission» qu’il regrette vivement.
L’Abbaye de Mariastein s’est dite «consternée et honteuse» face à ce qui s’est passé à l’époque dans son école à Altdorf. Elle regrette les graves injustices et souffrances infligées aux victimes
La communauté admet que les abus sexuels étaient apparemment connus de la direction de l’école et du monastère, dans les années 1960 et 1970. Elle déplore le comportement de la direction de l’époque, «qui n’a pas été pas à la hauteur des actes commis et qui n’a pas aidé les victimes ni rendu justice».
Les bénédictins de Mariastein entendent en outre saisir l’occasion de cette émission pour «se pencher activement sur les pages sombres de leur passé et offrir aux victimes tout le soutien possible». Ils appellent les anciens élèves du collège qui auraient subi des abus à s’adresser à un service d’aide aux victimes.
Le canton d’Uri veut se pencher sur les abus
Le canton d’Uri a également exprimé sa volonté d’enquêter sur les abus commis au Collège Borromée. Pour ce faire, il va collaborer avec l’Université de Zurich qui mène actuellement une étude sur les abus dans l’Église catholique. (cath.ch/kath.ch/mp)