Décès du cardinal Cottier: quand le théologien émérite de la Maison pontificale méditait sur la miséricorde

La miséricorde est «une grande inspiration du Concile Vatican II» et «nous avons besoin d’approfondir ce thème» qui est «une réponse face au mal». C’est en ces termes que le cardinal suisse Georges Cottier, décédé le 31 mars 2016 à l’âge de 93 ans, saluait l’initiative du Jubilé de la miséricorde, il y a un an. A la retraite depuis fin 2005, l’ancien théologien de la Maison pontificale et collaborateur de Jean-Paul II vivait toujours au Vatican. Voici quelques extraits des interviews que le cardinal avait accordées à I.MEDIA ces dernières années.

En 2015, le théologien réagissait ainsi à l’annonce solennelle de l’année sainte extraordinaire du Jubilé de la miséricorde voulue par le pape François : ” La miséricorde, c’est une grande inspiration du Concile Vatican II. Nous avons besoin d’approfondir ce thème. A certaines périodes de l’histoire de l’Eglise, on a beaucoup insisté sur le Salut et le risque de la perdition de l’âme. Mais fondamentalement, ce qu’il y a derrière l’enseignement de l’Eglise, c’est la miséricorde : le don du Fils de Dieu pour les hommes. (…) Comme l’ont fait ses deux prédécesseurs, le pape François exploite le capital du Concile Vatican II».

Pour le cardinal Cottier, la miséricorde est «une réponse face au mal que l’on ne comprend pas toujours». Face aux «poussées terribles de violence dans le monde musulman, faites au nom de l’Islam», face «au mal délirant», assurait aussi le théologien, «la réponse de l’Eglise n’est pas dans le ›contre-délire’ mais dans la promotion de l’efficacité de l’Evangile par des moyens évangéliques. Nous ne devons pas trop nous appuyer sur des moyens temporels : il ne s’agit pas de créer des armées chrétiennes» mais «de faire comprendre à l’humanité que sa dignité est dans la recherche de la paix par le dialogue et l’entente».

Celui qui fut l’un des proches collaborateurs de Jean-Paul II, avec qui il organisa la journée du pardon lors du Jubilé de l’an 2000, évoquait également cet événement : «Avant de poser ces actes historiques de repentance, Jean-Paul II avait soumis cette idée à un groupe de cardinaux. Beaucoup furent déconcertés : on critique déjà tellement l’Eglise, voulait-il vraiment en rajouter ? Mais la réponse du pape fut très claire : l’Eglise est sainte mais composée de pécheurs et la parole du chrétien doit être accompagnée du témoignage. (…) Attention toutefois, Jean-Paul II a demandé pardon à Dieu – le premier offensé – et aux victimes, au nom de l’Eglise, sur des faits historiques a vérés et non sur des mythes. La demande de pardon se fait à partir de faits réels, dans l’objectivité et dans le dialogue et non dans l’auto-accusation et le sentiment de culpabilité».

Gare au repli de l’Eglise

En 2012, le dominicain revenait notamment sur le pontificat de Benoît XVI : «C’est à la lumière du Concile que l’on doit regarder le pontificat de Benoît XVI. L’un des moments décisifs de son pontificat, pour nous en indiquer la ligne de fond, a été son discours des vœux à la curie romaine, en décembre 2005. Il y a offert des clefs de lecture du Concile. La proclamation de l’Année de la foi va en ce sens : c’est la poursuite du Concile».

Celui qui fut théologien de la Maison pontificale durant 16 ans parlait aussi de la nécessité que l’Eglise «ne se replie pas sur elle-même» : «Les gens ne vont pas venir à nous en masse, mais c’est à nous d’aller vers eux. Ce qui est important, c’est aussi ce mouvement, que l’Eglise ne se replie pas sur elle-même, qu’elle aille au monde, pour annoncer l’Evangile, pas pour s’y diluer». Il ajoutait à l’attention des catholiques «identitaires» : «Ne soyez pas frileux ! Cette recherche identitaire peut conduire à un repli sur soi qui n’est plus la véritable identité de l’Eglise car elle est, par essence, missionnaire !»

A la veille de ses 90 ans, se retournant sur son parcours personnel, le cardinal Cottier confiait : «Je rends grâce à Dieu, mais j’ai aussi le sentiment de la pénitence face à tout ce que j’aurai dû faire et que je n’ai pas fait, ce que j’ai mal fait». I.MEDIA

1 avril 2016 | 15:53
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
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