De l’ombre à la lumière, les vitraux de José Venturelli
Le peintre chilien José Venturelli était un artiste muraliste internationalement reconnu. Réfugié à Genève, il a réalisé sur la demande du pasteur Alain Wyler sept vitraux pour le temple de la Madeleine. Une œuvre à redécouvrir lors d’une rencontre organisée le 24 septembre prochain par l’Association Chili Genève 1973–2023.
L’artiste José Venturelli était très actif dans les milieux intellectuels et culturels de la gauche chilienne et internationale avant la prise du pouvoir par Pinochet. Ami du poète Pablo Neruda, il illustra plusieurs de ses livres. «Venturelli se trouvait à Pékin pour une rétrospective de son œuvre quand a eu lieu le coup d’État du 11 septembre 1973», se souvient Francisco Muster, du Comité Mémoire et Justice. Il s’est alors exilé à Genève avec sa famille, où il a obtenu une autorisation de séjour du fait qu’il avait aussi un passeport italien.
L’âme d’un continent
«Quand je suis rentré pour la première fois dans le temple de la Madeleine et que j’ai découvert ses vitraux, je me suis dit `c’est là l’œuvre d’un latino-américain`. Venturelli peignait l’âme de notre continent, comme le faisait le mexicain Diego Rivera», déclare Francisco Muster, réfugié en Suisse en 1976.
Les œuvres de Venturelli reflètent la réalité historique et sociale de son époque et son engagement pour les droits humains. Les femmes et les hommes des classes ouvrières et rurales ainsi que du monde indigène y ont une place prépondérante. Outre les vitraux du temple de la Madeleine, la ville du bout du lac abrite une autre œuvre du muraliste chilien, une mosaïque de 90 m2, à l’école de Balexert.
«On reconnaît les artistes à certains détails de leurs œuvres. Pour Venturelli, c’est sa façon particulière d’insister sur les mains, paumes ouvertes ou poings fermés», précise Francisco Muster. Des mains implorantes, reconnaissantes ou créatives.
Violence et miséricorde
Comme un chemin de croix, les titres et représentations de ses vitraux du temple de la Madeleine racontent, dans la lumière de l’histoire de Jésus, celle du peuple opprimé chilien sous la dictature de Pinochet, luttant pour regagner sa liberté: Bien et mal, Détresse des opprimés, Salut pour l’humanité, ou encore Libération d’un prisonnier et Recherche de la vérité… Trois de ces vitraux ne furent réalisés qu’après la mort du peintre, sur la base de ses maquettes, par le maître-verrier Georges Gamon. Une sorte de testament spirituel, dira le pasteur Wyler, un appel à l’amour et à l’espérance. (cath.ch/lb)
Faire mémoire et transmettre
La rencontre Faire mémoire et transmettre est soutenue notamment par la Plateforme interreligieuse de Genève. La Passion selon St-Jean, du compositeur Angel Parra (1943-2017), y sera jouée. Ce musicien chilien fut torturé par le régime de Pinochet, puis déporté dans un camp de prisonniers où il a écrit sa Passion selon St-Jean. Son œuvre a été jouée et enregistrée par ses co-détenus le Vendredi saint 1974.
A lire: Alain Wyler, Les vitraux de José Venturelli. Temple de la Madeleine Genève, réédition en 2023 par la Fondation Ouverture. LB
Pourquoi le canton de Genève a-t-il commémoré le coup d’État survenu au Chili en 1973? La présence de l’ONU et d’une importante communauté chilienne sur son territoire l’explique. Une histoire marquée par la brutalité militaire chilienne, mais aussi par la solidarité de la société civile et des Églises genevoises. Un exilé chilien en témoigne.