«La culture française est un bien commun» pour l’Eglise et l’Etat, affirme Don Jean-Rémy Lanavère

Le prix en langue française Henri de Lubac doit être remis le 7 juin 2017 à Rome à l’abbé Jean-Rémi Lanavère, prêtre de la communauté Saint-Martin, pour sa thèse sur la loi naturelle. Agrégé de philosophie et ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure, le jeune prêtre de 37 ans développe à nouveaux frais une vision du bien commun. Interrogé par l’agence I.MEDIA, il souhaite que les catholiques ré-investissent le terrain politique et culturel.

En quoi est-ce important pour vous de recevoir le prix de Lubac?
Il s’agit d’un prix de l’ambassade de France près le Saint-Siège, donc de la politique culturelle de la France auprès du Vatican. Je crois que cela marque une conception assez ouverte des rapports entre la France et l’Eglise, d’autant que ma thèse est en co-tutelle avec l’Ecole des haute études en sciences sociales, sous la direction de Pierre Manent, et l’Universalité pontificale du Latran. C’est sans doute le contexte de Rome qui permet cela… Tout le monde se retrouve sur la présence culturelle française. En ce sens, c’est un bien commun de la France.

Pourquoi est-ce utile que la France promeuve cette recherche théologique?
C’est important parce que les forces vives vont en diminuant du côté de l’Eglise en France. Les évêques français sont accaparés par le souci d’envoyer tout de suite les prêtres sur le terrain – on peut les comprendre. Dès lors, la tentation pourrait être grande de ne pas investir dans les institutions pontificales… Or je trouve beau que les institutions publiques aident aussi l’Eglise à prendre conscience de sa mission à Rome. Si l’aide de l’Etat peut être un aiguillon, ce serait même salutaire.

Sur le fond, qu’avez-vous voulu dire sur cette question de la loi naturelle?
Mon travail s’est concentré sur la pensée de la loi naturelle chez saint Thomas d’Aquin. Quand on associe ordre politique et loi naturelle, les catholiques pensent aujourd’hui facilement à l’objection de conscience, par rapport aux lois en vigueur. Mais ce n’est sans doute pas la première fonction de la loi naturelle. Elle ne nous extrait pas de la vie politique, elle nous en fait trouver le sens.

Comment cela s’applique-t-il à la réflexion politique des catholiques aujourd’hui?
L’éducation est un bon exemple. Elle relève de la loi naturelle pour l’Eglise, parce que dérivée de la mission des familles. Au vu de la dégradation de l’enseignement en France, et puisque la loi naturelle nous donne toute latitude pour s’occuper de l’éducation des enfants, cela devrait justifier une sorte de sécession. C’est un mauvais calcul. La dimension politique de la loi naturelle consiste également à lutter de l’intérieur contre la dégradation de l’enseignement public. Autrement, l’Eglise sera la première à pâtir de la dégradation de ces institutions et du bien commun en général. Un catholique ne peut avoir comme seul horizon sa propre vie, et la vie de sa communauté confessionnelle. Je suis réticent à l ’idée de contre-culture, même son usage peut être parfois légitime, parce que le christianisme est d’abord une culture. (cath.ch/imedia/ap/rz)

 

7 juin 2017 | 17:55
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 2  min.
Culture (115), Education (78)
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