«Coup de tonnerre dans un ciel serein», selon Angelo Sodano, doyen des cardinaux
Rome: Renonciation de Benoît XVI – Les démissions de papes dans l’histoire
Rome, 11 février 2013 (Apic) Si la démission de Benoît XVI était inattendue – Mgr Angelo Sodano, doyen des cardinaux, a parlé de «coup de tonnerre dans un ciel serein» – elle n’en était pas moins possible. Benoît XVI l’avait déjà laissé entendre dans son livre d’entretien avec le journaliste allemand Peter Seewald.
Dans ce livre d’entretien «Lumière du monde – Le pape, l’Eglise et les signes des temps», paru en novembre 2010, Benoît XVI affirmait qu’un pape avait «le droit et, selon les circonstances, le devoir de se retirer» lorsqu’il en venait «à reconnaître en toute clarté que physiquement, psychiquement et spirituellement, il ne peut plus assumer la charge de son ministère».
Au moment des entretiens, durant l’été 2010, Benoît XVI affirmait: «Quand le danger est grand, il ne faut pas s’enfuir. Le moment n’est donc sûrement pas venu de se retirer». Visiblement de plus en plus fatigué ces derniers mois et après avoir travaillé sur des sujets délicats comme les scandales de pédophilie au sein du clergé, la réconciliation avec les fidèles lefebvristes, la transparence au Vatican, mais aussi la nouvelle évangélisation et l’annonce de la foi, Benoît XVI a décidé de passer la main. Un choix inédit depuis 7 siècles.
Le sacre de Célestin V
L’éventualité de la renonciation d’un pape avait été déjà évoquée par plusieurs papes du 20e siècle, et en dernier lieu par Jean Paul II dans la Constitution apostolique «Universi dominici gregis», publiée en février 1996. Le pape y faisait référence au paragraphe 2 de l’article 332 du Code de droit canon de 1983. On peut y lire que «s’il arrive que le pontife romain renonce à sa charge, il est requis pour la validité que la renonciation soit faite librement et qu’elle soit dûment manifestée, mais non pas qu’elle soit acceptée par qui que ce soit».
La question de la renonciation à la charge pontificale s’est posée juridiquement à partir du pontificat de Célestin V, en 1294. Elu dans des conditions politiques difficiles à près de 85 ans, cet ermite abdiqua après cinq mois de pontificat et devant les cardinaux réunis. Il leur exposa en termes simples ses motifs: l’âge, la maladie, son incompétence face à la curie et le désir de se retirer dans son ermitage. Avant de quitter sa charge, il promulgua une Constitution sur l’abdication pontificale qui n’a pas traversé l’histoire jusqu’à nous.
Avant Célestin V, certains papes s’étaient déjà retirés lors de circonstances historiques particulières plus ou moins connues. Ainsi, le pape Martin Ier, arrêté puis exilé en Grèce en 653 par l’empereur d’Orient, aurait approuvé tacitement l’élection faite de son vivant d’un autre pape, Eugène Ier. 300 ans plus tard, en 964, le pape Benoît V, souvent présenté comme un antipape, était déposé par l’empereur Otton Ier, et acceptait la sentence, renonçant de ce fait au pontificat.
Le pape Jean XVIII, mort en 1009 comme simple moine
On sait par ailleurs que le pape Jean XVIII est mort en 1009 à Rome comme simple moine de Saint-Paul-hors-les-Murs, que le pape Sylvestre III, expulsé par son rival Benoît IX en 1045, ne s’est plus occupé ensuite que de son diocèse, et que le même Benoît IX abdiqua quelques mois plus tard en faveur du pape Grégoire VI. Enfin, après Célestin V, le pape Grégoire XII renonça lors du Concile de Constance en 1415, et se retira comme simple cardinal-évêque. C’était l’époque du grand schisme d’Occident. L’Eglise se trouvait alors en présence de trois papes concurrents. (apic/imedia/ami/be)