Rome le 24 octobre 2015. Le cardinal Turkson à la conférence de presse | © B. Hallet
International

COP21: l’accord «historique» ne doit pas rester sans effet, prévient le cardinal Turkson

L’accord obtenu à Paris lors du sommet mondial sur le climat est «historique», reconnaît le cardinal Peter Turkson, président du Conseil pontifical Justice et Paix. «Encore faut-il qu’il soit signé et ratifié» et appuyé par des décisions politiques afin de ne pas rester «sans effet», tempère cependant le représentant du Saint-Siège à la COP21, interpellé par l’agence I.MEDIA. Dans cet objectif, le cardinal Turkson espère ainsi «la mise en œuvre d’un système de gouvernance harmonieux et efficace».

Eminence, vous avez assisté aux travaux de la COP21, quel bilan en tirez-vous?

Cardinal Peter Turkson: J’ai assisté aux travaux au Bourget les 7 et 8 décembre, pendant le Segment de Haut Niveau. Après une première semaine qui a été ressentie par beaucoup comme une période de stagnation dans les négociations, j’ai perçu dès mon arrivée une détermination générale: il y aurait un accord en sortant de Paris. Les Etats parties se sont mobilisés pour arriver à cet accord historique. Dans ce sens, on peut dire que la COP21 a été une avancée. En effet, dans son Message pour la Journée mondiale de la paix 2016, le pape considère la COP21 comme un événement majeur qui représente «la capacité de l’humanité à œuvrer dans la solidarité au-delà des intérêts individuels, de l’apathie et de l’indifférence vis-à-vis des situations critiques».

Les travaux ont abouti à l’adoption d’un accord juridiquement contraignant pour les 195 Etats parties…

Encore faut-il qu’il soit signé et ratifié. Certains textes internationaux restent longtemps sans effet en attendant leur entrée en vigueur! La recherche d’un équilibre entre les intérêts des pays industrialisés, et ceux des pays en voie de développement, a été certainement difficile. Le temps nous dira si les décisions prises à Paris permettront la mise en œuvre d’un système de gouvernance harmonieux et efficace. L’accord de Paris, en outre, sera mis à l’épreuve de la cohérence: est-ce que ce travail diplomatique, soutenu généralement par les ministres de l’Environnement, sera dans les années à venir véritablement appuyé par les décisions des chefs d’Etat et des ministres de l’économie, de la recherche, du transport?

Quelle a été la part du Saint-Siège dans les travaux de la COP21?

Le discours du cardinal secrétaire d’Etat Pietro Parolin, le 30 novembre, ainsi que celui que j’ai moi-même prononcé le 8 décembre, résument les préoccupations, espoirs et attentes du Saint-Siège. Il ne faut pas oublier que le pape a suivi avec intérêt – et encouragé les travaux – de la COP21. Il a ainsi déclaré au cours de l’Angélus du 6 décembre qu’il suivait «avec une vive attention» la conférence sur le climat, rappelant cette question posée dans son encyclique Laudato si’: «Quel genre de monde voulons-nous laisser à ceux qui nous succèdent, aux enfants qui grandissent?» Le pape avait alors appelé à prier afin que ceux qui sont appelés à prendre des décisions importantes aient «le courage d’avoir toujours comme critère de choix le plus grand bien de toute la famille humaine». Car, en effet, on ne peut séparer deux objectifs, comme l’a rappelé le pape lui-même: «atténuer les impacts des changements climatiques et, dans le même temps, faire obstacle à la pauvreté et faire fleurir la dignité humaine».

Le discours du Saint-Siège a-t-il été entendu dans les couloirs de la COP21?

Oui, le fait que quelques ministres présents à la Conférence de Paris aient fait référence à ‘Laudato si’, y compris dans leurs discours officiels, montre l’intérêt suscité par l’encyclique à la COP21. N’oublions pas, enfin, que le pape François a salué avec satisfaction la conclusion des travaux, et ce dès l’angélus du 13 décembre. Là encore, il a jugé que la mise en pratique de cet accord demanderait «un engagement collectif et un généreux dévouement de la part de chacun», et souhaité «que soit garantie une particulière attention aux populations les plus vulnérables». (cath.ch-apic/ami/rz)

Rome le 24 octobre 2015. Le cardinal Turkson à la conférence de presse | © B. Hallet
17 décembre 2015 | 12:32
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
Partagez!