Congo RDC: les évêques ont des doutes sur la victoire de l’opposant Félix Tshisekedi
Les évêques catholiques de la République démocratique du Congo (RDC) ont émis des doutes, le 10 janvier 2019, sur la victoire de l’opposant Félix Tshisekedi, déclaré vainqueur du scrutin présidentiel du 30 décembre 2018. Ils appellent toutefois à éviter les violences post-électorales.
Avec 38,57 % des voix, Félix Tshisekedi, 55 ans, a été déclaré vainqueur du scrutin présidentiel du 30 décembre en RDC. Il devient ainsi le premier président démocratiquement élu à l’issue d’un scrutin multipartite. Mais ce résultat est d’ores et déjà contesté.
Son rival de l’opposition, Martin Fayulu, deuxième avec 34,8 %, conteste en effet le résultat, tandis qu’Emmanuel Ramazani Shadary, le dauphin du président sortant Joseph Kabila, n’a réuni que 23,8 % des suffrages. Pour la première fois depuis l’indépendance du pays en 1960, la République démocratique du Congo (RDC) connaît une alternance politique par le biais des urnes.
Les doutes des évêques
Alors que le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian affirmait le 10 janvier que les résultats des élections en République Démocratique du Congo (RDC) ne semblaient «pas conformes aux résultats que l’on a pu constater ici ou là», les évêques catholiques de la RDC étaient également circonspects.
La Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) avait déployé plus de 40’000 observateurs dans tous les centres de vote du pays et s’est dotée d’un Call Center composé de 408 agents. Elle déclare «prendre acte de la publication des résultats provisoires de l’élection présidentielle qui, pour la première fois dans l’histoire récente de notre pays, ouvre la voie à l’alternance au sommet de l’Etat».
Eviter la violence
Cependant, ajoute-t-elle dans un communiqué publié le 10 janvier, [étant donné] «l’analyse des éléments observés par cette mission, nous constatons que les résultats de l’élection présidentielle tels que publiés par la CENI [Commission électorale nationale indépendante, ndlr] ne correspondent pas aux données collectées par notre mission d’observation à partir des bureaux de vote et de dépouillement».
Au lendemain de la publication des résultats provisoires, «nous exhortons tout le monde à faire preuve de maturité civique et surtout à éviter tout recours à la violence. En cas d’une éventuelle contestation de ces résultats provisoires par une partie, nous l’exhortons à user des moyens de droit conformément à la Constitution et à la loi électorale», peut-on lire dans le communiqué signé par le président de la CENCO, Mgr Marcel Utembi, archevêque de Kisangani, et les autres évêques de la RDC.
Résultats provisoires
Félix Tshisekedi, père de 4 enfants, dont le père Etienne Tshisekedi (1932-2017) a combattu les différents régimes du pays, de 1982 à son décès le 1er février 2017, l’a remporté selon les résultats provisoires annoncés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Celle-ci est chargée d’organiser les élections dans le pays.
Environ 40 millions d’électeurs congolais ont participé à cette élection présidentielle à laquelle se présentaient 21 candidats de partis ou coalitions de partis. La victoire de Tshisekedi, si elle était confirmée par le Conseil constitutionnel – au plus tard le 15 janvier prochain -, marquerait la fin d’une période de transition de deux ans, depuis la fin du mandat du président Joseph Kabila, en novembre 2016.
Accord de la Saint-Sylvestre
Kabila avait été maintenu au pouvoir pour diriger cette transition, jusqu’à l’installation de son successeur à l’issue de la présidentielle. Il a pu le faire à la faveur d’un accord politique inter-congolais, signé le 31 décembre 2016 sous les auspices de l’Eglise catholique. Cet «Accord de la Saint-Sylvestre» a permis de sauver le pays d’une situation chaotique. Il a maintenu une «stabilité relative», en dépit de troubles parfois violents liés au processus électoral.
Sur la BBC, Félix Tshisekedi a déclaré rendre hommage au président Joseph Kabila. «Aujourd’hui, nous ne devons plus le considérer comme un adversaire, mais plutôt comme un partenaire de l’alternance démocratique dans notre pays». Il s’adressait à une foule immense de militants de son parti, l’UDPS (Union pour la démocratique et le progrès social), créé par son défunt père, en 1982, peu après l’annonce de sa victoire par la CENI.
Dans un communiqué publié, mercredi 9 janvier au siège de la CENCO, les évêques avaient appelé les divers candidats à «la sagesse» et au «fair-play électoral pour les perdants». «Nous les invitons à ne pas inciter à la violence et à recourir aux voies de droit pour toute contestation éventuelle des résultats provisoires publiés par la CENI». (cath.ch/ibc/be)