Centrafrique: Les évêques dénoncent la mainmise des groupes rebelles
Les évêques de République Centrafricaine (RCA) ont dénoncé le 6 septembre 2020, les exactions des groupes armés sur les populations, et leur mainmise sur le pays dont ils contrôlent de 70 à 80%, du territoire depuis 2012.
Les évêques de Centrafrique ont publié le 6 septembre 2020 une lettre pastorale commune. Dans cette déclaration en 70 points sur 18 pages, ils condamnent l’impunité des dirigeants des groupes rebelles, qui «jouissent de tous les privilèges, en particulier la pleine liberté de mouvement et l’impunité malgré la poursuite continue des exactions sur le terrain.» «L’accès aux autorités leur est garanti. Ils se plaisent dans le business de la guerre, érigé en modèle économique du sang humain», a poursuivi la Conférence épiscopale centrafricaine (CECA).
«Beaucoup d’armes sont en circulation, et le processus du DDRR (Désarmement-Démobilisation-Réintégration-Rapatriement) tarde à se mettre en place. «L’impunité accumulée ne présage d’aucune sécurité immédiate pour la population, livrée à la merci des crimes humains de tous genres», dénonce la lettre.
Stratégie de colonisation des terres
«Sûrs de la protection de leurs parrains, ils soutiennent, organisent, installent et enracinent partout dans le pays la transhumance armée et tiennent une administration parallèle. Ils s’opposent à la restauration effective de l’autorité de l’Etat» fustigent les évêques. Selon eux, «cette technique n’est rien d’autre qu’une cynique stratégie de colonisation des terres au détriment des populations évincées de leurs biens et contraintes aux déplacements forcés et dont les droits sont impunément bafoués.»
Le commerce de bétail sur pied, que les évêques qualifient de ‘transhumance armée’ est une des principales causes des conflits en Centrafrique. En effet, les grands éleveurs des pays du nord, Cameroun, Tchad et Soudan, exportent leurs troupeaux à travers la Centrafrique vers les marchés du sud à Bangui, Brazzaville ou Kinshasa. Lors de cette transhumance, il n’est pas rare que les troupeaux broutent ou saccagent les champs des cultivateurs locaux. Pour assurer que leurs troupeaux puissent circuler sans entrave, les éleveurs n’ont pas hésité à armer de kalachnikovs, les pasteurs chargés de convoyer le bétail. En face les agriculteurs restent le plus souvent démunis et subissent des exactions constantes.
Un conflit dont on ne voit pas l’issue
La prise de pouvoir en mars 2013 de la Séléka, une coalition, composée principalement de groupes armés musulmans venus du nord-est du pays, a ouvert une nouvelle période de violences en République centrafricaine. Aux exactions des membres de la Séléka, ont suivi les atrocités commises par les groupes anti-balakas, des milices dites d’autodéfense majoritairement chrétiennes. Les populations civiles ont été assimilées à l’une ou l’autre des factions et persécutées pour leur appartenance ethnique ou religieuse.
Les violences entre groupes armés et à l’encontre des civils ont poussé à l’exode un quart de la population centrafricaine soit 1,3 million de personnes. Elles se sont réfugiées dans des endroits plus sûrs à l’intérieur du pays ou dans les pays voisins, indique, un rapport de l’Union européenne de juillet 2020
Un accord signé en 2019
En février 2019, le président centrafricain, Faustin Archange Touadèra et les 14 groupes armés ont signé à Khartoum, un nouvel accord de paix censé mettre fin au conflit. Il s’agissait alors du huitième accord de paix du genre, depuis 2013. La situation du terrain n’a guère changé depuis. (cath.ch/ibc/mp)