Centrafrique: Des ONG appellent à l'adoption de la Cour pénale spéciale
Bangui, 20 février 2015 (Apic) Des organisations de lutte pour les droits de l’homme ont exhorté le parlement de transition de République Centrafricaine (RCA) à adopter un projet de loi pour la création d’une Cour pénale spéciale (CPS). Elle serait chargée de juger les auteurs des violations graves des droits humains dans le pays.
La RCA a connu ces deux dernières années, des violences intercommunautaires qui ont fait plus de 1’000 morts. L’appel à l’adoption d’une CPS a été signé par l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture et la peine de mort /section République de Centrafrique (ACAT/RCA), la Commission épiscopale justice et paix et 17 Organisations non gouvernementales (ONG) centrafricaines et internationales. Dans un communiqué publié le 19 février à Banjul, en Gambie, siège de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), les ONG ont indiqué qu’elles demandaient la justice pour les victimes d’atrocités en République Centrafricaine.
Selon le texte, le projet de loi créant la CPS a été préparé par le gouvernement et négocié avec l’ONU. Il prévoit que la Cour sera une juridiction mixte, composée de 27 magistrats nationaux et internationaux. Intégrée dans le système judiciaire centrafricain pour une durée de 5 ans renouvelable, elle sera chargée d’enquêter et de juger les crimes «les plus graves» perpétrés en Centrafrique depuis le 1er janvier 2012.
Le projet de loi a été adopté en conseil des ministres, le 5 février 2015, suite au travail préliminaire d’un comité mixte de rédaction (national et international), complété par le travail du Ministère de la Justice, et en concertation avec la Mission multidimensionnelle de stabilisation des Nations unies en Centrafrique (MINUSCA).
Une étape historique dans la lutte contre l’impunité
«L’adoption par le Conseil national de transition du texte créant la CPS serait une étape historique et sans précédent dans la lutte contre l’impunité en Centrafrique», ont déclaré les organisations. «L’impunité a contribué aux conflits qui ravagent le pays depuis 20 ans, elle doit donc être combattue avec force», ont-elles ajouté.
«La Cour pénale spéciale proposée constitue un projet équilibré et novateur pour soutenir un système judiciaire centrafricain ravagé par le conflit déclenché en 2012 par les groupes armés du Nord du pays et pour poursuivre de façon efficace, indépendante et équitable les auteurs de crimes de guerre et crimes contre l’humanité», estiment les organisations signataires.
Enquêter sur les violations et poursuivre les auteurs
Le projet de Cour pénale spéciale fait suite à la création, en avril 2014, d’une Cellule spéciale d’enquête et d’instruction (CSEI) chargée d’enquêter sur les violations graves des droits humains et poursuivre les responsables de ces crimes. En août 2014, les Nations unies et les autorités centrafricaines de transition avaient conclu un Mémorandum d’entente sur les grands principes de création d’une Cour pénale spéciale intégrant la CSEI mais aussi chargée de juger les présumés auteurs des crimes.
La peine maximale que les magistrats de la future Cour pénale spéciale pourront prononcer sera la prison à perpétuité, conformément aux dispositions du Statut de la Cour pénale internationale (CPI) à laquelle la Centrafrique a adhéré dès 2002. La peine de mort n’est plus appliquée depuis 1981.
La Cour pénale spéciale demeure complémentaire de l’action de la CPI puisque cette dernière a été saisie par les autorités centrafricaines le 30 mai 2014, et que le 24 septembre 2014, la Procureure de la CPI a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les crimes de sa compétence commis depuis le 1er septembre 2012 sur le territoire centrafricain. La CPI privilégiant la poursuite des plus hauts responsables, la Cour pénale spéciale sera chargée d’enquêter et de poursuivre les dizaines d’autres auteurs de graves violations des droits humains commises depuis 2012. (apic/com/ibc/bb)