Card Maradiaga: «A la Curie, il y a une grève face à la réforme»

«Devant la réforme portée par la Constitution apostolique Praedicate Evangelium, il y a une grève larvée à la Curie», s’est agacé le cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga, coordinateur du Conseil des cardinaux, alors qu’aucune nomination n’a été publiée, le 5 juin 2022, jour de la Pentecôte depuis l’entrée en vigueur de cette nouvelle organisation de la Curie romaine.

Face à l’inertie de la Curie, le cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga s’est agacé lors d’une réunion en ligne organisée par le site hispanophone Religión Digital et dont un compte rendu a été publié le 3 juin 2022. Le «remaniement gouvernemental», attendu le 6 juin, n’a pas eu lieu. Aucune nomination curiale n’étant apparue dans le bulletin quotidien du Bureau de presse du Saint-Siège.

Ce même jour, l’entretien du pape François avec les responsables du désormais «Dicastère» pour le culte divin, parmi lesquels le futur cardinal Arthur Roche, laisse néanmoins comprendre que les cadres de ce dicastère ont bénéficié d’un renouvellement tacite. Cela sera aussi probablement le cas dans d’autres institutions comme le Dicastère pour le clergé, dont le préfet, Mgr Lazzaro You, sera lui aussi créé cardinal à la fin de l’été.

Le retard pris montre que des blocages persistent

La situation est plus confuse pour des institutions qui sont censées ne plus exister sous leur forme antérieure, comme le Conseil pontifical pour la culture, conduit par le cardinal Ravasi, ou la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, conduite par le cardinal Tagle, qui doit s’intégrer dans le nouveau grand Dicastère pour l’évangélisation, personnellement dirigé par le pape. Les annonces attendues dans les jours à venir seront donc attentivement scrutées.

La retard pris dans l’annonce des nominations et la confusion qui avait entouré la publication d’une version encore provisoire de la Constitution apostolique, le 19 mars dernier, montrent que des blocages persistent. Le cardinal Maradiaga, coordinateur du Conseil des cardinaux, n’a pas caché son impatience lors de son intervention organisée par Religión Digital.

«Le texte est déjà là, mais la traduction officielle n’a pas encore été publiée, ce qui est inquiétant», s’est impatienté le cardinal hondurien, dénonçant une «grève» implicitement menée par des membres de la Curie rétifs à la réforme, qui, tout en évitant d’assumer une opposition frontale, «se la coulent douce, en attendant les calendes grecques». 

Des changements à venir dans le personnel de la Curie

«Avec les mêmes personnes, la Constitution ne peut pas être mise en pratique», a lâché le cardinal Maradiaga, laissant donc entendre qu’un large turn-over se produira à la Curie dans les prochaines semaines. 

Il a reconnu que la concrétisation de la Constitution sera donc plus difficile que sa simple entrée en vigueur, car elle nécessite «un nouvel esprit qui a besoin d’une conversion pastorale et synodale et aussi qu’il imprègne les curies diocésaines. C’est pourquoi le pape a convoqué tous les cardinaux en août», a précisé le coordinateur du Conseil des cardinaux.

«Nous devons nous éloigner du cléricalisme et aller vers une Église de frères», a insisté le cardinal Maradiaga, en soulignant toutefois certains progrès concrets déjà constatés, comme l’augmentation de 17% du nombre de femmes employées au Vatican depuis le début du pontificat.

Le mandat «d’ouvrir la boîte de Pandore»

Le cardinal Maradiaga a rappelé qu’à la suite des réunions de préparation au conclave et de l’élection du pape François, en 2013, le pontife lui avait confié le mandat «d’ouvrir la boîte de Pandore» et donc de mettre en chantier une réforme profonde de la Curie. Certains volets de la réforme ont bien avancé, notamment sur la mise en conformité des normes économiques et financières du Saint-Siège avec le droit international. Mais le changement des mentalités demandera encore du temps, a-t-il reconnu. 

Dans ce dialogue en ligne, la théologienne colombienne Consuelo Vélez a soulevé un autre point, rarement abordé: la protection de certains postes de travail par les lois italiennes, ce qui constitue «un problème supplémentaire étant donné le nombre de personnes employées dans certains dicastères». (cath.ch/imedia/cv/gr)