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Brésil: polémique après qu’un cheikh musulman ait reçu la communion

Lors de la messe d’enterrement du cardinal Geraldo Majella Agnelo, le 28 août 2023 à Londrina (sud du Brésil), un cheikh musulman local a reçu la communion. Un acte qui a provoqué de vives critiques de la part des milieux traditionalistes brésiliens.

La cathédrale de Londrina diffusait en streaming les funérailles du cardinal Agnelo, une figure importante de l’Eglise au Brésil décédé le 26 août 2023. De nombreuses personnes ont ainsi pu voir le cheikh Ahmad Saleh Mahairi, membre éminent de la communauté sunnite brésilienne et ami de longue date d’Agnelo, s’approcher de l’autel pour recevoir la communion, rapporte le site catholique américain Crux. Mgr Geremias Steinmetz, archevêque de Londrina, lui donne l’hostie, qu’Ahmad Mahairi prend dans la main. On le voit ensuite s’éloigner sans mettre l’hostie dans la bouche.

Un «sacrilège»?

La vidéo a été retransmise par des sites internet traditionalistes, qui ont critiqué le geste. L’Institut Plinio Corrêa de Oliveira, connu sous le nom d’IPCO, a notamment relié la décision de Mgr Steinmetz à un «déclin général» de l’Église catholique dans le monde. «Donner la communion à quelqu’un qui n’a pas été baptisé et qui ne croit pas que Notre Seigneur Jésus-Christ est Dieu est un sacrilège», a déclaré Frederico Viotti, membre de l’IPCO.

«Je me demande si ce ‘péché’ est si grand ou si scandaleux»

Mgr Adriano Ciocca Vasino, évêque de São Félix do Araguaia

«Il semble que certains veuillent conformer l’Église à une sorte de fraternité universelle, en établissant un terrain commun pour toutes les religions – et maintenant, même la communion est permise aux non-catholiques», a-t-il fustigé. Des personnes se sont inquiétées du fait que le cheikh ait quitté l’autel avec l’hostie en main. «On ne peut jamais la porter dans sa poche, par exemple, à cause de la présence réelle de Jésus-Christ dans chaque particule de l’hostie», a relevé Frederico Viotti.

Deux jours plus tard, Mgr Steinmetz a affirmé que le responsable musulman «regrettait profondément» ce qui s’est passé, précisant qu’il ne voulait pas manquer de respect à l’Eglise catholique. Il a assuré avoir «reçu Jésus» et avoir consommé l’hostie après s’être rassis sur son banc. L’archevêque a également souligné le fait que Jésus était vénéré comme un prophète par les musulmans, même s’ils ne le considèrent pas comme le fils de Dieu. Il a également mentionné la lettre apostolique du pape François sur la liturgie, Desiderio desideravi, dans laquelle il décrit la véritable signification de l’eucharistie et invite les catholiques à abandonner «les polémiques pour écouter ensemble ce que l’Esprit dit à l’Église».

Les non-musulmans font aussi des erreurs dans les mosquées

Les explications du prélat n’ont cependant pas convaincu certains protestataires et la polémique a continué sur les réseaux sociaux. D’autres ont appelé à relativiser l’affaire. «Bien sûr, selon les lois de l’Église, une telle chose n’est pas possible. Mais je me demande si ce ‘péché’ est si grand ou si scandaleux», a déclaré à Crux Mgr Adriano Ciocca Vasino. L’évêque de São Félix do Araguaia, en Amazonie, a rappelé que Jésus lui-même avait enfreint plusieurs règles de pureté religieuse. Il a relevé que personne n’était «capable de pénétrer dans le cœur du cheikh et d’être concluant sur ce qui s’est passé (…) Je pense que c’est bien pire lorsqu’une personne demande la communion avec un cœur plein de ressentiment.»

Le cheikh Jihad Hammadeh, autre membre éminent de la communauté sunnite du Brésil, a estimé que le cheikh Mahairi n’avait probablement pas compris qu’un tel rituel était réservé aux catholiques et qu’il avait suivi les gens jusqu’à l’autel «en signe de respect». Il a souligné que les non-musulmans commettaient également souvent des erreurs lors des célébrations dans les mosquées. «Je pense que nous manquons de tolérance. Quand quelqu’un ne fait pas partie d’une religion, il peut dans tous les cas faire des erreurs», a-t-il ajouté. (cath.ch/crux/arch/rz)

7 septembre 2023 | 17:32
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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