Le pape François a été bien accueilli au Bangladesh (Photo d'illustration:Worldfish/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)
International

Birmanie-Bangladesh: l'héritage de paix du pape François

En Birmanie et au Bangladesh, le pape François a laissé un héritage de paix et de concorde, assurent des responsables religieux de ces deux pays. L’agence vaticane Fides a recueilli des témoignages suite à la visite du pontife, du 27 novembre au 2 décembre 2017.

«La petite Eglise birmane s’est sentie véritablement soutenue et encouragée par le successeur de Pierre, qui est arrivé pour rendre visite à une périphérie», affirme Joseph Kung Za Hmung, fondateur du média Gloria TV local. «Les jeunes ont été particulièrement touchés. Ils constituent notre espoir et toute l’Eglise birmane bénéficiera de cet enthousiasme renouvelé pour porter à la nation l’Evangile de la réconciliation, de la guérison et de la paix».

Un deuxième domaine où la visite du pape a donné des fruits est le dialogue interreligieux, note Joseph Kung Za Hmung. «La rencontre avec les responsables bouddhistes au temple de Yangon a marqué l’opinion publique», souligne-t-il. «Les responsables bouddhistes déclarent aujourd’hui avoir beaucoup apprécié son témoignage d’homme de Dieu, d’homme de dialogue et de paix, de responsable spirituel qui reconnaît la dignité de tout être humain».

Un impact politique

«La présence du pape, relève le journaliste birman, a également eu un impact politique, par le fait qu’il ait interpellé les autorités civiles sur l’inclusion des minorités, le processus de paix, la guérison des blessures de la nation […]». Le laïc catholique espère que les paroles du pontife auront un effet concret dans le dialogue entre le gouvernement et les minorités ethniques, la démocratie ou le principe d’égalité.

Outre les affrontements avec l’ethnie des Rohingyas musulmans, au nord-ouest du pays, l’armée birmane est en conflit avec des minorités non bouddhistes, dans lesquelles les chrétiens sont souvent nombreux. Si le processus de paix semble au point mort, la visite papale est un espoir pour ces minorités, affirme Eglises d’Asie (EdA), l’agence d’information des Missions Etrangères de Paris. D’autant que l’énorme couverture médiatique de l’événement offre aux catholiques une plateforme de visibilité inédite dans un pays bouddhiste à près de 90%. «Le problème, c’est que nous les chrétiens, nous sommes mal vus, on dit que nous ne sommes pas de bons patriotes», confie à EdA Ma Schwe, une femme kachin. «Mais avec tous les médias qui sont là, j’ai l’espoir que le reste de la société va changer d’opinion à notre sujet et nous accepter comme des citoyens du même pays, à part entière».

Aung San Suu Kyi sous le feu des critiques

L’approche très diplomatique adoptée par le pape François pourrait influencer favorablement le processus de paix avec les ethnies minoritaires, analyse EdA. Le fait qu’il ait réservé la primeur de sa visite au commandant en chef des forces armées, Min Aung Hlaing, a été une surprise. L’homme est considéré par la communauté internationale comme le «boucher des Rohingyas». La rencontre a été décidée au dernier moment, sur les fortes recommandations du cardinal Charles Bo. «Les généraux birmans ne veulent qu’une chose: être reconnus par l’Occident comme des interlocuteurs légitimes», estime ainsi Yan Myo Thein, analyste politique birman.

L’armée détient toujours 25% de sièges au Parlement. La Constitution stipule clairement qu’elle n’a pas de compte à rendre au gouvernement civil. Ces éléments sont souvent oubliés par la communauté internationale qui vilipende Aung San Suu Kyi pour n’avoir pas su empêcher le massacre des Rohingyas. Par sa présence et plus encore par ses mots, le pape François est venu apporter son soutien à celle qui avait promis de faire de la résolution des conflits ethniques sa première priorité, à un moment où elle est au cœur des critiques internationales, commente EdA.

Signe de l’impact de la visite du pape François: le jour de son arrivée en Birmanie, le gouvernement a  annoncé la troisième session de la Conférence de Panglong, entre le pouvoir et des minorités rebelles, qui aura lieu la dernière semaine de janvier 2018.

Empathie envers les Rohingyas

Au Bangladesh, seconde étape du pape François, le dialogue interreligieux et la réconciliation ont également été des points d’orgue de la visite apostolique.

«Le pape François a montré au Bangladesh, tout comme il l’a fait au Myanmar, ce que veut dire l’amour, en particulier envers les réfugiés mais aussi envers toute la population bangladaise», assure à Fides le responsable islamique Fariduddin Mashud. «Le pape François est arrivé à un moment où nous en avions particulièrement besoin», assure en outre le responsable musulman Anisus Zaman. «Où se trouve le désespoir, il est venu apporter l’espérance. Il a amené l’empathie envers les réfugiés Rohingyas et appelé au respect de leur dignité. Cette visite ouvrira certainement une fenêtre sur notre avenir, permettant de créer une fraternité authentique».

Une trace indélébile

Un certain nombre de commentaires négatifs sur la présence du pape de la part ont été repérés sur les réseaux sociaux de la part de quelques extrémistes. «Mais à part ça, nous pouvons dire avec certitude que l’accueil de la population bangladaise a été excellent», assure le Père Lintu D’Costa, prêtre catholique de Dacca, la capitale. La petite Eglise au Bangladesh, qui ne représente que 0,2% d’une population à majorité musulmane, porte dans son cœur «la bénédiction reçue du pape François». «Son esprit et son témoignage évangélique authentique […] ont frappé tout le monde et laisseront une trace indélébile dans notre vie», conclut le prêtre bangladais. (cath.ch/fides/rz)

 

Le pape François a été bien accueilli au Bangladesh (Photo d'illustration:Worldfish/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)
4 décembre 2017 | 16:59
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 4  min.
Bangladesh (63), Birmanie (89)
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