Caroline Petitat avec la photo de son fils Jean (Photo:  Jacques Berset)
Suisse

Dans son livre-témoignage, «Le fils rompu», Caroline Petitat salue une jeunesse d'une profonde spiritualité

«La jeunesse d’aujourd’hui, ce n’est pas seulement celle qui va aux JMJ. Il y a beaucoup d’autres jeunes, qui ont aussi de solides valeurs…», confie à cath.ch Caroline Petitat Robet. Cette volontaire permanente du mouvement ATD Quart Monde vivant en Gruyère, à La Tour-de-Trême, publie ces jours-ci un livre-témoignage poignant sur la mort de son fils, «Le fils rompu – Récit d’une mère», aux Editions Salvator à Paris.

Caroline y relate la mort de son fils cadet Jean, décédé à l’âge de 29 ans d’un cancer lié à une néo-mutation de polypose adénomateuse familiale (PAF), une maladie génétique.


Caroline Petitat Robet ‘Le fils rompu – Récit d’une mère’ (Photo: Jacques Berset)

«La maladie réveille les choses les plus profondes en soi»

«Notre fils n’était pas croyant. Il avait été dégoûté par son passage en Arabie Saoudite, la richesse des émirs, l’oppression des femmes, justifiées par une interprétation particulière de la religion. Il avait commencé à douter des religions, sans faire de distinction…»

Caroline avoue ne pas être «catho-catho», bien qu’elle se rende à la messe dominicale avec son mari et participe à la «Prière des Mères», dont le slogan est «L’amour des mamans change le monde». Elle a connu ce réseau international par le biais d’une amie, alors qu’elle était désemparée par la maladie de son fils. «Je priais la Vierge Marie… La maladie réveille les choses les plus profondes en soi».

«La foi n’est pas une simple religiosité, c’est l’ouverture aux autres»

Pour cette Bretonne devenue Suissesse par son mariage avec Jean-Paul, lui aussi volontaire permanent du mouvement ATD Quart Monde, «la foi n’est pas une simple religiosité, mais c’est l’ouverture aux autres, en particulier aux plus pauvres», comme tous deux l’ont découvert avec le Père Joseph Wresinski, fondateur du mouvement ATD Quart Monde.

Caroline prie avant d’écrire (Photo: Jacques Berset)

«Ma foi a aussi été profondément transformée par la maladie de Jean… Après son école de commerce à Rouen, il a habité pendant une dizaine d’années en Finlande Centrale, à Jyväskylä. Il avait fait un stage Erasmus en Finlande, et il avait participé, comme stagiaire, au montage avec un ami d’une boîte d’affiches autocollantes. Et il resté dans ce pays qu’il aimait beaucoup».

Solidaires jusqu’au bout

«Le 29 novembre 2012, ça a été le choc de la nouvelle de sa maladie: des millions de polypes dans ses intestins… Cette maladie, qui n’a pas pu être vaincue par la chimiothérapie, m’a fait découvrir les valeurs de la jeunesse d’aujourd’hui, celle qui ne va pas à la messe, mais qui est solidaire jusqu’au bout. Ainsi les amis de Jean de diverses nationalités l’ont accompagné jusqu’à la fin, en partageant ses rêves…»

Jean aimait faire la fête avec ses amis, partager sa culture, faire connaître dans son entourage la cuisine suisse, notamment la raclette, et les spécialités bretonnes, comme les crêpes. «Il faisait beaucoup de cuisine, pour que les gens se rencontrent, connaissent d’autres cultures, en invitant les étudiants d’Erasmus, des travailleurs immigrés aussi. Il était plein d’énergie, malgré la maladie, et il pensait toujours s’en sortir, sans jamais renoncer, sans jamais se révolter contre le mal qui progressait».

Jean cherchait des moyens de se soigner par la médecine alternative alors que la chimie ne répondait plus. «Jusqu’au bout, Jean était très vivant, il avait retrouvé le sens de sa vie par la maladie, une vie intérieure, une spiritualité, et tout cela, il le transmettait à ses amis. Son père l’y encourageait».

Son projet: faire connaître en France la culture finlandaise

Jean avait des projets qui le faisaient vivre, comme cette ‘caravane sauna’ qu’il avait projetée pour faire connaître en France la culture finlandaise. Quelques mois après sa mort, ses amis de Finlande sont venus concrétiser le projet, en venant en Bretagne participer à deux chantiers, en compagnie d’anciens camarades de classe de Jean de l’époque de l’école de commerce de Rouen.

Caroline raconte que son fils, revenu à Rennes début 2014, a fait appel à ses copains de Finlande, qui sont venus à son chevet à l’hôpital.  «Cinq collègues de nationalités différentes; on a fait un banquet tous ensemble au salon des familles de l’hôpital. Ils ont repris l’avion le lendemain, et le jour suivant, le 17 mars 2014, Jean s’en allait!»

«Mon fils et ses amis m’ont beaucoup appris, parce qu’avant, avec l’éducation de ma génération, j’avais peur de la mort. Mais Jean ne voulait pas qu’on l’enferme dans sa maladie, que je le materne. Ses amis, qui connaissaient le mal dont il souffrait, ont toujours été les mêmes avec lui. Dans les dernières semaines, depuis la Finlande, ils l’accompagnaient sur Skype…»

«Leur sincérité me pointe vers l’évangile»

«Cette jeunesse ne fréquente pas les églises, et pourtant leur sincérité me pointe vers l’évangile. Face au monde qui nous aspire avec sa vitesse de rendement, de compétition, de consommation, de techniques robotiques, de gadgets, ils ne se satisfont pas. En amont de leur goût d’émotions fortes, de liberté, de non-contrainte. Ils cherchent autre chose. Ils savent que le monde est menaçant. Apprécient l’instant présent. Se rapprochent de la nature. Ils suivent le courant, font le tri. Ils guettent l’essentiel à ne pas lâcher: l’humain de l’homme. Ils font le tour du monde, guettent sur internet des personnes, des mouvements, à contre-pied de notre temps. Ces chemins de spiritualité en action, me consolent de la désespérance.  (cath.ch/be)

Caroline Petitat Robet sera présente au Centre spirituel Sainte-Ursule à Fribourg dès 18h00 le mercredi 1er février prochain dans le cadre des soirées «Témoins d’hier et d’aujourd’hui» où elle présentera son livre «Le fils rompu – Récit d’une mère». Elle témoignera également le mercredi 22 février à 20h à Notre-Dame de Compassion, à Bulle.

 

 

 

Caroline Petitat avec la photo de son fils Jean
19 janvier 2017 | 10:25
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 4  min.
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