Suisse : Bertrand Lüthi explique le 125e anniversaire de l’Armée du Salut
Apic Interview
Plus de 10’000 personnes répondent à l’invitation des salutistes
Déo Negamiyimana, Apic
Morges, 18 mars 2007 (Apic) L’Armée du Salut a fêté son 125e anniversaire dans toute la Suisse. Chaque poste et institution salutiste a offert, le 17 mars, un brunch à la population. Histoire d’exprimer sa reconnaissance au public, aux donateurs et aux diverses autorités. Interview du capitaine Bertrand Lüthi, officier attaché au poste de Morges, qui retrace l’histoire du mouvement en Suisse romande, depuis 1882.
Apic: L’Armée du Salut, est-ce un mouvement ou une Eglise ?
Bertrand Lüthi: Nous sommes un mouvement international qui fait partie de l’Eglise chrétienne universelle. Nous sommes un mouvement parce que notre communauté ne connaît pas de sacrement. Certains l’appellent d’ailleurs communauté spirituelle, tandis que le fondateur William Booth l’appelait Eglise de la rue.
Apic: Pourquoi continuez-vous à vous appeler armée alors que ce terme fait référence à la guerre?
Bertrand Lüthi: Nous adoptons le terme armée pour pouvoir communiquer facilement dans nos différentes structures, calquées sur celles de l’armée. D’où d’ailleurs nos titres de Général, colonel, capitaine, lieutenant, etc. Nous n’avons jamais voulu faire la guerre! Il s’agit d’une recherche d’efficacité, afin de pouvoir apporter le salut à ceux qui souffrent. Au début du mouvement à Londres, notre aide consistait à distribuer aux personnes démunies d’abord de la soupe, du savon, ensuite et si possible, le Salut à travers une aide spirituelle. Telle a toujours été notre démarche, même si l’aide matérielle que nous offrons aujourd’hui a considérablement changé, tout comme notre public cible d’ailleurs.
Apic: Quel fut l’accueil des Suisses à l’arrivée du mouvement ?
Bertrand Lüthi: Les débuts furent difficiles. Quand Catherine Booth, fille du fondateur, initie le mouvement en 1882 à Genève, il y a une grande intolérance religieuse qui va jusqu’à des troubles et des violences. L’Armée du Salut est déclarée illégale jusqu’à ce que le Tribunal fédéral la reconnaisse comme association religieuse en 1889. Les décrets d’exception cantonaux qui interdisaient ses activités sont abrogés. En 1890, le Conseil fédéral accorde son soutien de principe au mouvement qui commence dès lors à se développer dans les autres cantons. En Suisse romande, Vaud et Neuchâtel sont les premiers cantons à accueillir le mouvement qui, progressivement commence même à faire des exploitations agricoles. C’est dans ce cadre que nous avons aussi crée le journal «Cri de guerre» pour la Suisse romande.
Apic: Encore un nom au ton guerrier?
Bertrand Lüthi: Oui mais.une guerre pour sauver les gens. En 2003, justement à cause des interprétations divergentes, le journal a changé de nom. Il s’appelle aujourd’hui, Espoir.
Apic: Le mouvement existe-t-il actuellement dans tous les cantons romands?
Bertrand Lüthi: Le mouvement s’est implanté surtout dans les cantons traditionnellement protestants, où il joue un rôle très important auprès des personnes en situation difficile. S’il commence à prendre racine en Valais, il n’y a rien de tel à Fribourg, pourtant aussi canton catholique.
Apic: Votre mouvement exclut-il les catholiques ?
Bertrand Lüthi: Pour notre part, nous sommes ouverts à tous, mais comme chacun fait ses choix, certains cantons sont moins accueillants que d’autres.
L’armée du salut en chiffres
125 ans après son arrivée en Suisse, l’Armée du Salut compte actuellement 4 divisions (directions régionales), 66 Postes (communautés avec mission de diaconat social). Il faut aussi compter 8 crèches et foyers pour enfants, 9 foyers de réinsertion et 7 foyers pour hommes et femmes et 24 brocantes (centre de tri et de ramassage). La coordination nationale dépend de la direction générale sise à Berne. Le mouvement compte 443 officiers, dont 243 sont des retraités. Le grand défi consiste désormais à intégrer les jeunes dans les formes d’adhésion qui leur conviennent mieux. Mais ce n’est pas facile à y arriver.
D’après le capitaine Bertrand Luthi, porter l’uniforme de l’Armée du Salut ne semble pas séduire les jeunes suisses. A la rentrée de l’automne 2007, l’Ecole d’officiers de ce mouvement évangélique à Bâle n’accueillera qu’un seul élève. Ils étaient moins d’une dizaine l’an dernier à entamer cette formation de 3 ans afin de servir l’organisation de manière professionnelle. Un chiffre qui décline irrémédiablement. Pour pallier ce problème, l’organisation propose un grand éventail d’événements destinés à ses 800 jeunes et 1200 enfants. Parmi celles-ci, des camps de ski, des concerts, des tournois de sport, etc. Depuis 2005, le mouvement chrétien a décidé de mettre en place une stratégie à l’intention de son oeuvre de jeunesse au nom évocateur de «rEVOLution». Un mot dont on peut aussi lire les majuscules à l’envers. Dng
Mobilisation générale à l’Armée du Salut
En guise de bilan du grand brunch du 17 mars, selon le siège de l’Armée du salut à Berne, plus de treize mille personnes ont répondu à l’invitation culinaire des salutistes. De Genève à Kreuzlingen, les membres de l’Armée du Salut avaient préparé avec enthousiasme toutes sortes de plats, dans plus de cent lieux de Suisse. Les visiteurs ont trouvé des buffets richement garnis. L’offre était variée et adaptée aux coutumes locales: différentes sortes de pain, de la tresse, des gaufres, du bircher-muesli, des salades de fruits et même des röstis. Le public mélangé et de tout âge, reflétait l’ancrage de l’Armée du Salut dans toutes les couches sociales, rappelle l’Armée du Salut : des représentants des autorités et des personnes de la rue, des amis de membres salutistes , des parents de pensionnaires hébergés par l’Armée du salut, des donateurs. Par cette invitation de «gratitude envers le population, fidèle depuis 125 ans», l’Armée du Salut a également démontré qu’elle était prête à relever le défi et à poursuivre sa mission au service de la société. Photos: www.armeedusalut.ch/medias VB/Com
(apic/dng/com/vb)