Accueil des réfugiés en paroisse: Les cœurs sont ouverts, plus que les portes
Lausanne, 07.09.2015 (cath.ch-apic) L’appel du pape à accueillir une famille de réfugiés trouve un écho positif dans les paroisses, les monastères et les sanctuaires romands, mais il est difficile de répondre concrètement à cet appel. Les communautés invoquent le vieillissement de leurs membres, voire le manque de place ou de ressources, comme autant d’obstacles à l’accueil. Une initiative laïque fribourgeoise pourrait se profiler comme une réponse concrète.
«Hier, nous avons reçu cette invitation du pape à cœur ouvert, explique Sœur Louise-Henri, de la communauté d’Ingenbohl, mais malheureusement nous sommes en pleine restauration de notre maison de Fribourg. Tout est plein, regrette la Supérieure de la Province de Suisse romande, sans quoi nous aurions largement ouvert nos portes». La réflexion n’est pas écartée pour autant. «Nous parlons très souvent de ce que nous pourrions faire en communauté, mais nous n’entreprendrons rien avant la fin des travaux, dans une année et trois mois».
«Aucun commentaire», du côté des Sœurs de Sainte-Ursule, «mais la Supérieure affirme qu’elle est en accord avec ce que le pape demande», précise la réceptionniste au téléphone de cath.ch. Les Cisterciennes de Géronde en Valais sont quant à elles plus loquaces que leurs consœurs fribourgeoises. «Nous en avons parlé hier soir, explique Mère Myriam. Nous souhaitons accueillir ces réfugiés, mais comment?», s’interroge la Mère-Abbesse. «Une Sœur évoquait la possibilité de rénover notre grange pour répondre à l’appel du pape. C’est une possibilité, mais il nous faudrait pour cela le soutien de la ville de Sierre», ajoute Mère Myriam, qui relève un autre obstacle, celui du vieillissement de la communauté.
Un appel qui soulève des interrogations
Du côté des paroisses, l’appel lancé par le pape amène son lot de questions. «Le pape énonce des avis généraux, il faut ensuite les concrétiser dans des actes», explique l’abbé Claude Pauli, curé in solidum au sein de l’Unité pastorale Charles Journet à Genève. «Mais nous n’avons pas encore mené de réflexion sur cet appel particulier puisqu’il s’agit ici moins d’une aide d’urgence que d’un accueil à plus long terme».
«C’est beau en théorie, souligne pour sa part l’abbé Daniel Reynard, curé d’Ardon en Valais, mais en pratique, c’est plus compliqué. Actuellement dans la région toutes les chambres sont prises par des ouvriers étrangers qui viennent pour les récoltes de fruits, et bientôt pour les vendanges.» Lorsqu’on lui demande comment il réagirait si une famille syrienne sonnait à sa porte, le prêtre explique n’avoir «pas de chambre pour les accueillir. Mais on trouverait une solution, ajoute-t-il après réflexion. Au fond, on peut trouver de la place pour une famille dans la paroisse, ce n’est pas irréaliste. Cela pourrait même développer une solidarité entre les paroissiens».
«Pas de place»
Dans son interpellation, le pape appelait également les sanctuaires à faire preuve d’une générosité effective envers les migrants, au seuil de l’année de la miséricorde. Qu’en est-il en Suisse romande? «On peut les reconnaître, les respecter, mais pas les accueillir, affirme Sœur Antoinette, à Notre-Dame des Marches, dans le canton de Fribourg. Nous sommes trois et nous avons juste de la place pour nous. Chacune a sa chambre et nous avons juste un petit bureau qui sert pour tout le reste».
Même promiscuité du côté du Vorburg, à Delémont. «C’est impossible, c’est un sanctuaire microscopique, explique le Frère Dominique Stolz. Ma chambre fait la taille d’une cellule, une autre fait office de bureau et la troisième accueille mon confrère. Ceci dit, nous avons régulièrement des contacts avec des réfugiés, dont beaucoup d’Erythréens, qui viennent prier au sanctuaire. On discute avec eux et on accueille leurs inquiétudes».
Une solution du côté des laïcs?
Du côté de l’évêché de Lausanne, Genève et Fribourg, l’appel du pape sera concrètement abordé ce jeudi 10 septembre lors du prochain Conseil épiscopal, explique la Porte-parole du diocèse Laure-Christine Grandjean. Mgr Morerod, poursuit-elle, a rencontré hier un couple de fidèles, à la sortie de la messe qui se disait prêt à apporter leur pierre à l’édifice. «Ma femme et moi allons aménager notre galetas pour y dormir afin de mettre notre à chambre à disposition des requérants d’asile», confiait-il à l’évêque.
La charité des laïcs semble inventive. «Osons l’accueil» est un projet fribourgeois encore embryonnaire qui se développe à l’initiative d’un médecin à la retraite. Il s’agit d’une démarche œcuménique dont l’objectif est d’affirmer concrètement la disponibilité des Eglises à aider l’Etat dans sa mission d’accueil. Le projet, bientôt présenté à la presse, est d’envergure. Il rassemblera un ancien conseiller d’Etat fribourgeois ainsi que quelques membres du clergé. Bien qu’il soit encore appelé à se développer, il se profile déjà comme une réponse concrète à l’appel précis du pape François. (apic/pp)