L'Eglise en France est dans un processus de prévention et de réparation face au fléau des abus sexuels | © Jon Evans/Flickr/CC BY 2.0
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Abus sexuels: les cellules diocésaines d’écoute s’harmonisent

La Conférence des évêques de France a présenté début décembre 2023 les conclusions d’un rapport d’audit sur les cellules diocésaines chargées d’accueillir les victimes d’abus sexuels. Le document révèle la nécessité d’un cadre harmonisé pour aller plus loin.  

Une ›photographie’ de la qualité des structures existantes et beaucoup de préconisations: voilà à quoi ressemble, sur une trentaine de pages, le rapport d’audit que la Conférence des évêques de France (CEF), rapporte l’hebdomadaire La Vie. Les organes d’écoute des victimes de violences sexuelles sur mineurs constituaient l’une des premières réponses des évêques quand les affaires de pédophilie dans l’Église ont été révélées au grand jour. À partir de 2016,  les ›cellules d’accueil et d’écoute’ se ont multipliées pour être aujourd’hui 95, couvrant tout le territoire français. Après un pic lié à la publication du rapport de la CIASE en 2021, les cellules font aujourd’hui face à une relative stabilisation du nombre de sollicitations. Ces tendances comprennent toutefois de forts écarts locaux.

Mais depuis leur naissance, elles sont sous le feu des critiques. « On a toujours dû faire face à un procès d’intention qui consistait à nous dépeindre comme des bénévoles gentils (au mieux) qui faisaient un peu n’importe quoi dans des structures sans cadre », souligne une responsable de la CEF. D’où cet audit, préconisé en 2021 par le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase).

Lacunes et maladresses

L’audit se base sur un questionnaire envoyé à toutes les structures, avec un taux de réponse de plus de 83 %, et des entretiens avec des membres, des évêques, des victimes et collectifs de victimes ainsi que l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et réparation (Inirr).

Les cellules diocésaines, parfois interdiocésaines, sont composées d’un à dix membres, qui sont à 76% des laïcs bénévoles, avec en moyenne un clerc ou religieux par cellule. Ces groupes rassemblent des personnes avec des compétences professionnelles spécifiques psychologiques, juridiques, médicales, théologiques, éducatives ou sociales. Le rapport pointe néanmoins des lacunes dans la formation. La présence de spécialistes ne prémunit pas systématiquement contre les maladresses au cours des échanges ou les contacts difficiles.

Peu de règles claires

En outre le périmètre des sollicitations des cellules s’élargit: en plus des abus sur mineurs, les cellules sont sollicitées par des personnes majeures au moment des faits, des témoins, des proches, des auteurs, ou encore des personnes dénonçant des faits commis hors du cadre ecclésial.

Le cadre et le fonctionnement des cellules reste assez flou, déplore l’audit. Elles ont peu de règles en matière de formalisation des échanges. Les rencontres de coordination avec l’évêque sont irrégulières. Beaucoup ne fournissent pas de bilan annuel. Il n’est ainsi pas possible de tenir des statistiques globales. Les deux tiers des cellules n’ont jamais mis en place de supervision médicale ou psychologique pour leurs membres.

Le rapport signale cependant que depuis janvier 2022, la création d’un «référentiel de bonnes pratiques» diffusé nationalement, tend à renforcer le fonctionnement des cellules.

Des chantiers en cours

Les résultats de l’audit ont été présentés lors d’une journée d’études tenue le 2 décembre à la CEF à Paris. Plusieurs chantiers, en cours et à venir, ont été détaillés. La création d’un ›protocole d’écoute’ depuis le premier contact avec la victime jusqu’à la fin de la relation, doit fourni un cadre plus clair à tous les acteurs.

Deux autres chantiers concernent l’articulation entre l’évêque et sa cellule, et les  partenariats et collaborations avec les autres acteurs ecclésiaux ou non. L’accessibilité et la visibilité de cellules doit également être développée. S’y ajoutent encore le respect des règles d’archivage et sur la formation à l’écoute ›traumatique’. Enfin la communication des cellules avec l’Inirr chargée de verser les indemnisations doit être renforcée. (cath.ch/lv/mp)  

L'Eglise en France est dans un processus de prévention et de réparation face au fléau des abus sexuels | © Jon Evans/Flickr/CC BY 2.0
10 décembre 2023 | 11:32
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 3  min.
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