Abus sexuels: «C'est accablant pour l'Église!», déplore Mgr Lovey
Mgr Jean-Marie Lovey a déploré, le 13 septembre 2023, le nombre «effarant» de victimes d’abus sexuels dans l’Eglise en Suisse révélé par le projet pilote de l’Université de Zurich, rendu publique le 12 septembre. L’évêque de Sion a informé d’une procédure canonique en cours contre un prêtre incardiné dans le diocèse. Au sujet de l’enquête lancée par Rome sur des membres de la Conférence des évêques suisses (CES), dont lui-même, Mgr Lovey a affirmé qu’il se mettrait en retrait durant l’enquête «si les faits objectifs venaient à le mettre en cause durant l’enquête préliminaire».
«En regardant la conférence de presse (à l’occasion de la présentation du projet pilote sur les abus sexuels en Eglise, le 12 septembre à Zurich, ndlr), j’avais à côté de moi les noms des victimes», indique Mgr Lovey en ouvrant la conférence de presse donnée à Sion avec les abbés Pierre-Yves Maillard et Richard Lehner, vicaires généraux du diocèse, ainsi que l’abbé Paul Martone.
Des chiffres «effarants»
«C’est accablant pour l’Église et j’en suis accablé! On ne peut qu’être accablé par le nombre de victimes», a déploré l’évêque de Sion en évoquant le nombre «effarant» cité par le rapport des chercheurs de l’Université de Zurich (1002 cas d’abus sexuels sur 921 victimes pour 510 auteurs, ndlr).
Mgr Lovey a souligné la qualité de l’enquête, «ce travail remarquable de par sa qualité de structure». Mgr Lovey s’est engagé à donner suite aux recommandations émises en conclusion du rapport. Il a particulièrement insisté sur la promesse de ne plus détruire les documents d’archives relatifs aux cas d’abus sexuels traités par le diocèse. Un geste autorisé par le droit canon, mais vu comme un des «obstacles» à la recherche des cas d’abus cités dans le projet pilote.
Aucun document détruit depuis 2015
L’évêque de Sion a affirmé ne pas avoir détruit de documents d’archive depuis son arrivée à la tête du diocèse. Une démarche cependant réalisée par son prédécesseur: «Mgr Norbert Brunner m’a remis la clé des archives secrètes et un document mentionnant ce qu’il avait détruit et ce qu’il restait», a détaillé l’actuel évêque de Sion. Interpellé sur les sanctions à appliquer aux personnes qui ont détruit les archives, Mgr Lovey a expliqué qu’il était difficile de sanctionner des personnes qui n’ont fait qu’appliquer le droit canon.
Mgr Lovey a signalé qu’une procédure canonique était actuellement en cours sur un prêtre incardiné dans le diocèse. Le prêtre est retraité et accusé de faits prescrits sur le plan pénal. Il a déposé un deuxième recours à Rome dont l’évêché attend le retour. «Des mesures provisionnelles ont été prises à l’encontre du prêtre», précise Mgr Lovey. Il affirme que 19 cas d’abus ont été traités depuis 2015 dans le diocèse de Sion dont quatre ou cinq concernent des prêtres venus d’autres pays ou ayant transité par le diocèse.
Mesures dans le diocèse
En termes de prévention des abus sexuels, l’abbé Pierre-Yves Maillard a rappelé les mesures déjà mises en place dans le diocèse. Notamment la participation obligatoire pour les agents pastoraux aux cours de prévention «ESPAS» depuis 2019 dans la partie francophone du diocèse. Une participation rendue également obligatoire dans la partie germanophone du diocèse concernant le cours «LIMITA» depuis 2022. Les agents pastoraux ont dû également fournir un extrait de casier judiciaire et un «extrait spécial du casier judiciaire».
«Je serai clair, net»
Interpelé au sujet de l’enquête préliminaire ordonnée par Rome suite à des soupçons d’abus sexuels et de dissimulation par des membres de la CES, Mgr Lovey a répondu «qu’il s’engageait à être clair, net». Il a assuré qu’il transmettrait tous les documents concernant le cas suivi. Il ne s’est pas prononcé sur son degré d’implication, disant «qu’il laissait le travail se faire, par respect de la procédure en cours». Si les faits objectifs venaient à faire état d’une dissimulation volontaire de sa part durant l’enquête préliminaire, l’évêque a annoncé qu’il «se mettrait en retrait durant l’enquête», mais qu’il ne démissionnerait pas. (cath.ch/bh)
Le rapport du projet pilote sur l’histoire des abus sexuels dans l’Eglise suisse a permis de dénombrer, entre 1950 et 2022, 1’002 cas d’abus sexuels sur 921 victimes pour 510 auteurs. Selon les historiens, il ne pourrait s’agir là que de la partie émergée de l’iceberg. La faillite de l’institution et les négligences des évêques dans la gestion des abus sont pointées du doigt.