Abus: le Grand-Saint-Bernard rend les conclusions de son enquête
La congrégation du Grand-Saint-Bernard publie, le 28 octobre 2024, le résultat de l’enquête complémentaire à celle qui concernait les abus sexuels commis par des chanoines sur des mineurs, dénoncés en 2021 et 2022. Le rapport dévoile la totalité des cas conservés dans les archives secrètes de la Congrégation du Grand-Saint-Bernard.
Suite à la dénonciation du cas d’abus du collège de Champittet, le chanoine Jean-Michel Girard avait confié à l’avocat Bernard de Chedid, le 9 décembre 2022, un travail d’enquête extérieure sur d’éventuels abus sexuels commis au Collège Champittet par des chanoines du Grand-Saint-Bernard entre 1951 et 1998. Période durant lesquelles les chanoines étaient responsables de l’établissement.
Les conclusions de cette enquête ont été remises fin mars 2024 au prévôt de la Congrégation, le chanoine Jean-Pierre Voutaz, et n’ont pas révélé d’autres cas d’abus concernant le collège vaudois.
Le rapport remis à Jean-Pierre Voutaz signalait des cas qualifiés de «périphériques», c’est-à-dire commis en dehors du collège par des chanoines qui n’étaient plus à Champittet. Au sujet de ces cas, la Congrégation du Grand-Saint-Bernard avait assuré continuer son propre travail d’enquête «pour faire la lumière sur son passé». Ce sont les conclusions de ce travail que livre la congrégation:
–Abus annoncé en 2021, commis au début des années 1980 par un chanoine sur un élève, au Collège Champittet (Lausanne). Le Ministère public de canton de Vaud a classé le dossier pour prescription. Le jugement ecclésiastique du chanoine a été rendu le 16 décembre 2022, lui interdisant de célébrer les sacrements en public pendant 10 ans.
–Abus annoncé en 2022, commis vers 1976 -1977 par un chanoine, sur une jeune fille, en Valais. Le Ministère public du canton du Valais a classé l’affaire pour prescription. Des mesures canoniques ont été prises dès 2022 par la congrégation à l’égard du chanoine, lui interdisant d’exercer son ministère.
–Abus annoncé en 2023, ayant eu lieu en 1955 – 1956 commis en Valais par un religieux qui n’a pas pu être identifié, sur un enfant de dix ans. Entendue par l’actuel prévôt, la victime a témoigné que «ces entretiens lui ont permis de retrouver une certaine paix». Un candidat chanoine ayant été renvoyé en 1956, il pourrait s’agir de l’agresseur de cet enfant, mais les documents sont trop lacunaires pour en avoir la certitude.
–Abus commis sur un jeune homme en 1983 en Valais. Le chanoine coupable s’est annoncé lui-même à la police cantonale la même année. Les archives montrent que cette affaire a bénéficié d’un classement à la demande des parents de la victime. Ce chanoine est décédé accidentellement, toujours la même année.
–En 1971, un chanoine, curé d’une paroisse du Valais central, est reconnu coupable par la justice pénale valaisanne d’attentats à la pudeur sur au moins dix enfants. Il a été condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis. Le chanoine est décédé en 1996. En 2024, l’une des victimes s’est manifestée; la congrégation a immédiatement constitué une commission d’écoute.
«Il est possible que des victimes non connues soient en souffrance», indique le chanoine Jean-Pierre Voutaz. Il se tient à leur disposition. Il invite également les victimes à se manifester auprès du centre LAVI du Valais, du Sapec ou encore de la CECAR. (cath.ch/com/bh)
En marge du communiqué, Jean-Pierre Voutaz donne quelques précisions à cath.ch
Cette étude des archives secrètes a-t-elle été menée par l’avocat mandaté dans la première partie de l’enquête? Ou bien s’agit-il d’une étude interne?
Il s’agit des cas traités de «périphériques» dans le rapport de Me Bernard de Chedid, qui a mené l’enquête sur les abus au collège de Champittet, dans le sens qu’ils ne concernent pas directement le collège de Champittet, à l’exception du 1er cas cité qui est à l’origine de cette enquête. Tous les cas mentionnés ont été étudiés par Me de Chedid durant son enquête. L’enquête successive faite à l’interne n’a pas trouvé de cas d’abus sur mineur supplémentaire: étant une petite congrégation, presque tout le monde a passé un temps à Champittet!
Y a-t-il eu des difficultés particulière dans ce dernier volet de l’enquête?
Il a été très difficile de trouver pour le dernier cas le jugement de 1971 mentionné dans le communiqué. Il semble que ce document n’a pas été diffusé à son époque. Me de Chedid a continué ses recherches après son mandat pour Champittet jusqu’à ce que la clôture de cette affaire soit trouvée. Personne en congrégation n’avait entendu parler de ce jugement, ni à la paroisse où le chanoine était curé. C’est par ce communiqué que les enfants de 1971 apprennent que leur déposition a été prise au sérieux par la justice pénale valaisanne qui les avait auditionnés.
Ces résultats vont-ils être communiqués à l’équipe de chercheurs de l’Université de Zurich, qui continue à travailler sur les abus en contexte ecclésial en Suisse ces deux prochaines années?
Pour que les résultats soient à disposition de chercheurs, il faut le respect d’une stricte confidentialité des données sur la durée, c’est-à-dire du respect absolu de la vie privée des victimes qui ont déjà assez souffert d’intrusions dans leur intimité. Je devrai faire étudier ce point par des personnes compétentes en droit et en psychologie avant de donner un accès à ces documents. Le communiqué est fait pour aider des victimes à se reconstruire. BH
Contact: Jean-Pierre Voutaz, Prévôt du Grand-Saint-Bernard
congregation@gsbernard.ch – 079 377 68 79