A Moutier, les crèches rappellent que le Christ est universel
Pour sa 14e édition, l’exposition «Monde de la Crèche – Crèches du monde», à Moutier, présente près de 400 œuvres. Giovanni Resta, l’initiateur de la démarche, y voit l’occasion de rappeler la beauté de la famille et l’universalité de Jésus.
«Cette crèche m’a été offerte par le pape François.» Giovanni Resta n’est pas peu fier de présenter à cath.ch l’une des pièces maîtresses de l’exposition. Elle a été envoyée par le pontife en 2015, suite à une lettre du Prévôtois d’origine italienne présentant son activité.
La Nativité venant de Rome, en pierre blanche, très sobre, se trouve parmi 380 autres crèches exposées dans le pavillon 16 du quartier des Laives, dans la zone industrielle de Moutier. Des structures très diverses, composées de plus de 5000 personnages, qui viennent de tous les pays du monde, assure Giovanni Resta. «Où peut-être m’en manque-t-il une d’Afghanistan», admet-il.
Un trésor qui ne cesse de grandir
Un assemblage des plus hétéroclite et coloré qui va de minuscules statuettes (la plus petite crèche a 1cm de haut) à des personnages à taille quasi réelle. L’une des structures les plus impressionnantes est une série de vitrines (dioramas) qui déclinent l’histoire de la Nativité. L’installation était à l’origine à Lourdes. Elle a été achetée par l’exposition de Moutier en 2014, après la fermeture du Musée de la Nativité suite aux inondations dévastatrices de cette année-là.
Malgré un grand nombre d’œuvres très artistiques et spectaculaires, les crèches les plus chères au cœur de Giovanni Resta sont celles confectionnées par des enfants ou des handicapés, parce qu’elles sont les plus «authentiques».
Si le Prévôtois ne possède pas encore la plus grande collection de crèches au monde (peu s’en faut), il s’enorgueillit tout de même d’en conserver près de 500 en tout. Celles présentées dans le pavillon ne constituent ainsi qu’une sélection, pour une exposition qui change chaque année de visage. Le trésor de Giovanni Resta ne cesse de s’étoffer par des dons, surtout de particuliers, ainsi que par des acquisitions.
Collection à prendre
Cette aventure a commencé il y a près de 15 ans. Giovanni Resta est arrivé du sud de l’Italie à Moutier en 1967. Il a alors tout juste 20 ans. Il travaille tout d’abord dans la ville de Moutier comme mécanicien auto, avant d’être recruté par les Chemins de fer fédéraux (CFF). C’est également à Moutier qu’il rencontre son épouse. Il commence aussi rapidement à s’engager pour la paroisse. Dans le cadre de ses activités au sein de l’Église, il fait la connaissance, en 2010, d’un missionnaire italien basé à Winterthour (ZH).
Le prêtre lui apprend qu’il rapporte des crèches de tous les pays où il se rend, qu’il en possède une huitantaine dans la ville zurichoise, et que Giovanni peut les prendre s’il le veut. «Moi, j’ai toujours aimé les crèches, confie-t-il Quand j’étais petit, nous en faisions toujours une dans la famille, ce qui me remplissait de joie.»
Encouragements du pape
Ni une, ni deux, le Prévôtois prend quelques amis et une camionnette pour se rendre à Winterthour et rapatrier les crèches vers Moutier. Giovanni Resta est à ce moment-là au Conseil pastoral de la communauté italienne. Sous son impulsion, se tient une première exposition en 2010, tout d’abord dans des locaux paroissiaux. Le succès est tel que la manifestation est reconduite l’année suivante. Elle présente alors 110 crèches. En 2012, le nombre d’œuvres est si important que l’exposition se déplace au Forum de l’Arc, une grande salle en périphérie de Moutier.
Depuis lors, «Monde de la Crèche – Crèches du monde» n’a raté qu’un rendez-vous annuel, en 2020, pour cause de pandémie. Un épisode qui a cependant mis à mal les finances de l’association et qui a obligé l’exposition à trouver, dès 2021, refuge dans un pavillon de la zone industrielle, au loyer moins élevé.
Mais, cette année-là également, Giovanni Resta réalise un rêve: il est reçu en audience privée par le pape François, à qui il remet l’album de l’exposition 2019. «Il faut continuer», lui dit le pontife.
Appel aux bénévoles
Ce que le Prévôtois s’efforce de faire avec toute l’énergie dont il dispose encore à l’âge de 78 ans. «L’exposition me prend presque tout mon temps. Heureusement que je suis aidé par des bénévoles qui eux non plus ne comptent pas leurs heures.» Mais l’engagement assidu des volontaires ne suffit pas à mener à bien toutes les tâches nécessaires, et l’association cherche continuellement de nouveaux bénévoles.
L’argent aussi vient à manquer, alors que la vente d’un billet d’entrée n’est pas à l’ordre du jour. «Nous voulons réellement faire quelque chose de gratuit et ouvert à tous. Je ne voudrais pas que des familles renoncent à venir pour des raisons économiques», martèle Giovanni Resta.
Plus qu’une expo
Car l’exposition est aussi le prétexte à faire passer un message, note l’Italien d’origine. Pour lui, il s’agit tout d’abord de rappeler aux visiteurs à quel point la famille est une belle chose, qu’il faut préserver. «Aujourd’hui, la moindre difficulté fait que les couples se séparent. Je pense que nous pouvons tous ressentir l’harmonie et la tendresse qui se dégagent d’une crèche, et j’espère que cela inspire les familles qui viennent ensemble voir l’exposition. On y voit toutes les générations réunies, des grands-parents aux petits enfants.»
Car la manifestation prévôtoise se veut plus qu’un «musée de la crèche«, où les gens regardent et repartent. Le lieu veut favoriser les rencontres et le lâcher-prise face à la frénésie du quotidien. Un important coin café est ainsi disposé avec tables et chaises, sous une grande photographie de la rencontre entre Giovanni Resta et Jorge Mario Bergoglio. «Les visiteurs se posent ici, discutent un peu. Il y a des rencontres chaleureuses et touchantes.»
Unité dans la diversité
Dans un coin du pavillon, un grand globe terrestre dans lequel se niche une crèche illustre un autre message porté par l’exposition : l’universalité du Christ. «En voyant une crèche malgache entre une guatémaltèque et une hongroise, on se rend compte à quel point la figure de Jésus trouve sa place dans toutes les cultures. Cela va dans le sens de l’Église unie dans la diversité, telle que voulue par le pape François. Ce message est d’autant plus important à notre époque, où la reconnaissance que nous sommes tous frères en humanité est mise à mal.»
Giovanni Resta espère pouvoir encore longtemps émouvoir et inspirer les quelque 4000 visiteurs annuels, dont seulement environ 20% viennent de Moutier. Une tradition rendue possible par les sponsors qui tiennent encore à flot l’association. Le laïc prévôtois entretient également le rêve de créer un jour, avec les crèches, en Suisse romande mais pas forcément à Moutier, un musée, qui rappellerait en permanence le lumineux message de la Nativité. (cath.ch/rz)
Exposition «Monde de la crèche-crèches du monde», jusqu’au 12 janvier 2025, à Moutier (BE)