70 évêques critiquent le synode allemand dans une lettre

Plus de 70 évêques ont signé une lettre ouverte aux évêques d’Allemagne – publiée le 12 avril 2022 sur le média américain conservateur Catholic News Agency – dans laquelle ils expriment leur «inquiétude croissante» concernant l’évolution du Synode allemand.

Parmi les signataires, 48 sont américains, 18 africains (principalement de Tanzanie), contre un seul européen et aucun sud-américain. Quatre cardinaux ont apposé leur signature à cette lettre: le cardinal nigérian Francis Arinze, le cardinal américain Raymond Burke, le cardinal sud-africain Wilfred Napier et le cardinal australien George Pell. 

Sept reproches adressés au synode

Dans cette missive relativement brève, les signataires reconnaissent la nécessité d’un élan synodal, rappelant néanmoins que le «besoin de réforme et de renouveau est aussi vieux que l’Église elle-même». Ils formulent sept reproches à l’encontre de la démarche synodale de l’Église catholique en Allemagne:

En premier lieu, les actions du chemin synodal allemand «sapent la crédibilité de l’autorité de l’Église, y compris celle du pape François» par manque d’écoute de l’Esprit-Saint, estiment les évêques signataires. Ils citent en particulier ses effets nocifs sur «l’anthropologie chrétienne et la moralité sexuelle » ainsi que la remise en cause de la «fiabilité des Écritures».

Le second argument déplore la prédominance d’une analyse sociologique et idéologique sur le spirituel dans la démarche allemande, «y compris en matière de genre». Une réalité qui montre, selon les signataires, qu’elle considère la mission de l’Église «à travers le prisme du monde» plutôt qu’à travers l’Écriture et la Tradition. 

Ensuite, le chemin synodal, diminuerait selon eux le sens de la «liberté chrétienne» en l’assimilant à «l’autonomie». Quatrième argument: l’absence totale de joie dans les discussions et textes du Chemin synodal, «un défaut révélateur» selon les évêques.

Un ton «anti-évangélique»

L’argument suivant remet en cause la dimension synodale de la démarche, dénonçant un «travail d’experts et de comités» qui serait «lourd en bureaucratie, obsessionnellement critique et replié sur lui-même». La signe, considèrent les évêques, d’une forme répandue de «sclérose» marquée par un «ton anti-évangélique» et une «soumission» au monde et aux idéologies.

Les évêques signataires critiquent ensuite l’accent mis sur le «pouvoir» dans l’Église qui la rabaisse au statut d’«institution». «La réforme des structures n’est du tout la même chose que la conversion des cœurs», soulignent-t-ils.

Dernier point: «par son exemple destructeur», le chemin synodal allemand pourrait paradoxalement conduire certains évêques et laïcs «à se méfier de l’idée même de «synodalité»». 

Assurant l’Église en Allemagne de leurs prières, les évêques signataires insistent sur la nécessité d’apporter de la clarté «en ces temps de confusion». 

La démarche des évêques s’inscrit dans la continuité de la critique du chemin synodal allemand publiée par l’actuel archevêque de Denver, Mgr Samuel Aquila le 26 mai 2021.

Troisième lettre depuis le début de l’année

Ce n’est pas la première lettre ouverte envoyée par des évêques à leurs confrères allemands. Récemment, la conférence des évêques de Pologne puis la conférence des évêques d’Europe du Nord ont chacune publié une lettre témoignant de leur inquiétude face aux directions prises par la voie synodale allemande.

Le chemin synodal allemand – «Synodaler Weg” – a été entamé en 2019. La troisième assemblée synodale s’est déroulée du 3 au 5 février dernier.

Cette réunion a abouti à la signature de projets de résolutions demandant l’ordination des femmes, la participation des laïcs dans la nomination des évêques, la bénédiction des unions homosexuelles, la modification du catéchisme sur l’homosexualité et l’ordination des hommes mariés. Deux assemblées synodales supplémentaires sont prévues en septembre 2022 et en mars 2023.

Parallèlement, le Vatican a initié en octobre 2021 un Synode mondial pour explorer la dimension synodale de l’Église en termes de communion, de participation et de mission. Sa phase diocésaine, inédite dans la forme, doit aboutir le 15 août prochain. Elle sera suivie d’une phase continentale puis d’une phase romaine finale en octobre 2023. (cath.ch/imedia/cd/bh)