17e Pèlerinage aux saints d'Afrique: Saint-Maurice vibre aux sonorités du continent noir

L’église Saint-Sigismond et l’Abbaye de Saint-Maurice, en Valais, ont vibré dimanche 3 juin 2018 aux sonorités de l’Afrique dans une ambiance colorée et festive peu habituelle en ces lieux sacrés. Egayant de leurs chants la Grand-Rue de Saint-Maurice d’Agaune, les pèlerins se sont rendus en procession à la basilique pour assister à la messe présidée par Mgr Pier Giacomo Grampa, évêque émérite de Lugano.

Près de 350 personnes, essentiellement des Africains venus de Romandie et de Suisse alémanique, mais également des Haïtiens de Genève, ont participé à la 17e édition du désormais traditionnel Pèlerinage aux saints d’Afrique. L’événement, intitulé «Le courage d’une foi engagée», était consacré cette année à saint Charles Lwanga et ses 21 compagnons martyrs de l’Ouganda, mis à mort le 3 juin 1886 par le roi Mwanga. Lors de cette persécution des chrétiens ougandais, 22 catholiques et 23 anglicans furent martyrisés pour avoir refusé de renier leur foi.

«Je rêve d’un monde sans guerre et sans frontières…»

Accueillis en matinée par «l’hymne du pèlerinage» – «Je rêve d’un monde, je rêve d’un monde sans guerre et sans frontières… Je marche pour la paix» – les participants ont pu entendre le témoignage du Père Gérard Chabanon, qui fut supérieur général des Pères blancs de 2004 à 2010, mais aussi missionnaire en Tanzanie et en Ouganda. Grand connaisseur de la vie des martyrs ougandais, il a rappelé que «le sang des martyrs est la semence de nouveaux chrétiens», en rappel des paroles de Tertullien, figure emblématique de la communauté chrétienne de Carthage dans les premiers siècles.

Africanum Fribourg Statue de Denis Ssebuggwawo, chrétien ougandais martyrisé par le roi Mwanga II | © Jacques Berset

Le missionnaire a relevé qu’avant l’arrivée des Pères blancs en Ouganda, l’islam était déjà présent dans le pays et que les anglicans venaient d’arriver. Le premier chrétien a été condamné à mort et exécuté en 1885. A environ 25 ans, Charles Lwanga, chef des pages à la cour du roi, a baptisé certains de ses frères, les encourageant à garder leur foi, malgré le sort qui les attendait. Le 3 juin 1886, 32 jeunes hommes, pages de la cour du roi Mwanga II de Buganda, furent brûlés vifs à Namugongo, dans la banlieue de Kampala. «Ils ont ensemencé la foi chrétienne dans toute la région», a-t-il lancé.

Les martyrs d’Ouganda fécondent toute la région

«Ce dimanche 3 juin, il y a au moins un million de pèlerins à Namugongo. La dévotion aux martyrs de l’Ouganda, canonisés par le pape Paul VI le 18 octobre 1964, vers la fin du Concile, ne faiblit pas. Ils viennent de tous les diocèses d’Ouganda, certains de pays voisins. Ils peuvent marcher une semaine, dix jours, quinze jours… Ils font une véritable démarche de pèlerinage, s’avançant en priant vers le lieu du martyre!» Après l’enseignement donné par le Père Chabanon, un bon nombre de pèlerins ont reçu le sacrement de la réconciliation.

Les martyrs de l’Ouganda moins d’un an avant leur mort. Charles Lwanga porte le numéro 13 Source: photothèque des Pères Blancs, Rome

Saluant les pèlerins, Mgr Grampa a su trouver les mots pour les enthousiasmer, lui qui est un grand ami de l’Afrique. Depuis plus de deux décennies, il se rend régulièrement en Ethiopie, où il soutient des projets menés par les salésiens et les capucins. Suscitant les you-you de la foule, il les a incités à continuer à «danser la danse de la vie, en suivant la musique de la vie, qui n’est autre que Jésus!»

«Dansez la danse de la vie!»

Avec son langage imagé et chaleureux, l’évêque émérite de Lugano a souligné que Jésus n’était de loin pas «une antiquité» ou une valeur périmée. Il a alors appelé les fidèles rassemblés près de la chapelle des martyrs qui contient les reliques de saint Maurice – et également celles de Charles Lwanga, qui étaient il y a quelques années dans la chapelle de l’Africanum à Fribourg – à suivre ses commandements faits d’amour, de générosité, de don de soi mais également de sacrifices.

Eglise St-Sigismond Les chorales africaines savent louer le Seigneur dans la joie | © Jacques Berset

Pour la première fois, parmi les chorales africaines de Suisse ayant fait le déplacement en Valais, la chorale africaine Saint-Augustin de Moutier était présente, accompagnant les habitués: la Chorale africaine de Fribourg (CAF), le Cantique des Anges et la Chorale Erythréenne de Fribourg, la Chorale Afrika’s friends of Jesus (Genève), celles de Notre-Dame de Neuchâtel, de Bonne Espérance (des Capverdiens de Romont et Moudon), de la Sainte-Famille (Zurich), de St-Joseph (Jura) et du Sacré-Cœur (Bâle).

Un monde de diversités

Dans l’église, sur la place de pique-nique où se sont échangés les recettes culinaires et les plats régionaux, et dans la rue, alternaient tour à tour des chants en langues bassa et bafang du Cameroun, en créole du Cap Vert, en tigrinya d’Erythrée, puis en kikongo et en tshiluba, de la République démocratique du Congo, en éwé du Togo, et finalement en beti du Cameroun. Au moment de se quitter et de monter dans les bus, les pèlerins s’échangent leurs adresses et se donnent rendez-vous à l’année prochaine, une nouvelle fois sur les lieux du martyre de saint Maurice et de ses compagnons, pour renouveler leur engagement de foi. (cath.ch)

 

Mgr Pier Giacomo Grampa avec le Père Gérard Chabanon à la sortie de la basilique de Saint-Maurice | © Jacques Berset
4 juin 2018 | 13:27
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 4  min.
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