Toujours pas d'ambassadeur de France auprès du Saint-Siège depuis plus de 10 mois
Après plus de 10 mois sans ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, le chargé d’affaires ad interim de cette mission diplomatique a espéré, dans la soirée du 13 janvier 2016, une solution à ce «regrettable problème».
En l’absence d’agrément du Saint-Siège pour le diplomate proposé par Paris il y a un an, François-Xavier Tilliette a ainsi présidé à Rome la traditionnelle cérémonie des vœux à la Villa Bonaparte, saluant toutefois l’existence d’une coopération bilatérale «suivie» et «naturelle».
Le représentant de la France espère une solution
Devant de nombreux membres de la communauté française, dont les cardinaux Paul Poupard et Jean-Louis Tauran, le premier conseiller de l’ambassade de France a particulièrement mentionné la coopération entre Paris et le Saint-Siège sur le sort des chrétiens d’Orient, ou encore la question écologique, à l’occasion de la COP21.
François-Xavier Tilliette a également souligné «l’appui et la compréhension» manifestés par le Saint-Siège lors des différentes attaques terroristes sur le sol français, courant 2015.
Un «regrettable problème»
«On ne peut cependant ignorer que les relations bilatérales connaissent depuis près d’un an un regrettable problème relatif à la nomination de l’ambassadeur de France», a soutenu par ailleurs le premier conseiller, chargé d’affaires ad interim depuis le départ de l’ambassadeur Bruno Joubert, fin février 2015. «Vous comprendrez que je ne puisse pas commenter ce sujet», a poursuivi le diplomate, avant de conclure: «Formons le vœu, puisque c’est le moment d’en faire, qu’une solution soit trouvée».
Près d’un an après le départ de Bruno Joubert, et quelques mois avant la fin probable de la mission de François-Xavier Tilliette, la France n’a donc toujours pas d’ambassadeur auprès du Saint-Siège. Ce dernier n’a en effet pas donné son agrément pour le diplomate proposé par Paris dès janvier 2015, le chef du protocole de l’Elysée Laurent Stefanini.
Inclination homosexuelle
Au mois de décembre dernier, a appris l’agence I.MEDIA, le secrétaire général de la Présidence de la République, Jean-Pierre Jouyet, s’est rendu à la nonciature apostolique à Paris afin de maintenir la candidature de Laurent Stefanini.
L’inclination homosexuelle du candidat proposé par Paris, un catholique pourtant discret sur sa vie privée et un diplomate compétent, n’explique pas tout. Ce fin connaisseur de Rome fut particulièrement apprécié par le Vatican lors de son séjour comme premier conseiller à la Villa Bonaparte, entre 2001 et 2005.
Peu de temps après la légalisation du mariage entre personnes de même sexe en France, d’aucuns avancent que le contexte n’était pas favorable à sa nomination. Alors que la presse s’emparait de l’affaire, le pape a tenu à recevoir en privé le candidat de la France, en avril 2015. Selon l’intéressé, cette rencontre d’une quarantaine de minutes aurait été intense et même marquée par un temps de prière en commun.
D’aucuns jugent par ailleurs que le Saint-Siège n’a pas apprécié que la procédure d’agrément soit éventée dès le choix du candidat en Conseil des ministres, le 5 janvier 2015. Une lutte interne au Quai d’Orsay pour ce poste très convoité pourrait aussi avoir eu des conséquences. La convergence de ces motifs expliquerait le fâcheux blocage.
Une vacance de poste dommageable aux relations bilatérales
Cette vacance de poste est dommageable aux relations bilatérales. Dès lors, les deux parties souhaitent sortir la tête haute de cette impasse mais, à moins d’un geste d’une part ou de l’autre, la situation semble inextricable, au moins jusqu’au prochain scrutin présidentiel en France, au printemps 2017.
Dans le protocole du Saint-Siège, une règle non-écrite veut qu’il n’accorde pas son agrément, d’ordinaire, aux candidats homosexuels notoires ou divorcés remariés. Ainsi, le diplomate Jean-Loup Kuhn-Delforge proposé par Paris en 2008 avait été refusé par le Saint-Siège en raison de son «profil personnel». Secrétaire général adjoint du ministère des Affaires étrangères, il était notoirement homosexuel et pacsé avec son compagnon. La France était alors restée dix mois sans ambassadeur.
Pour autant, cette règle n’avait pas été respectée en 1998 pour un précédent ambassadeur de France, homosexuel discret sur sa vie privée. Le diplomate français avait même été amèrement regretté par le Saint-Siège lorsqu’il avait été rappelé par Paris plus vite que prévu, en plein cœur du Jubilé de l’an 2000. A ce jour, d’autres diplomates sont accrédités auprès du Saint-Siège en dépit de leur orientation homosexuelle. (cath.ch-apic/imedia/ami/be)