10'000 signatures en 10 jours pour «Soutenons RTSreligion»
Lancée le 23 novembre, la pétition «Soutenons RTSreligion», contre la suppression annoncée de trois magazines religieux, a atteint en à peine plus de 10 jours les 10’000 signatures. L’intellectuel musulman Hasni Abidi, qui fait partie du comité de soutien, rappelle à cath.ch la nécessité de préserver un programme «citoyen», qui transcende les appartenances religieuses.
Les émissions de RTSreligion s’inscrivent pleinement dans la tâche assignée au service public, martèle Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (CERMAM), basé à Genève. «C’est un programme qui sert la cité dans son ensemble, dans sa diversité», note-t-il. Le fait que RTSreligion soit produit par des chrétiens ne le dérange pas car il s’agit de soutenir une «démarche citoyenne qui transcende les appartenances religieuses». Il souligne ainsi qu’il est lui-même fréquemment invité à s’exprimer sur les plateaux de ces émissions, qui dépassent tout communautarisme. «L’effort de connaissance de l’autre fourni par ces programmes est très important pour le ‘vivre-ensemble’, particulièrement dans la société d’aujourd’hui», remarque-t-il.
Une pétition qui ratisse large
La participation de personnalités non-chrétiennes aux initiatives de soutien de RTSreligion montre l’amplitude de la mobilisation pour ses programmes. La vague d’indignation contre les mesures annoncées pour 2017 par la direction de la RTS en est également un reflet. Les signatures viennent de toute la Suisse romande et de tous les milieux, note dans un communiqué du 4 décembre 2015 Jean-François Mayer, historien des religions, directeur de l’Institut Religioscope, à l’origine de la pétition. Croyants de tous horizons, agnostiques et athées signent cette pétition, assure-t-il. Le point commun des signataires est le désir de voir la RTS maintenir à sa juste place l’analyse et l’information sur les religions, dans le cadre de la production d’émissions de qualité. «Les signataires sont choqués de voir la RTS ignorer les obligations qui découlent de son mandat de service public», lance l’historien.
La RTS doit «sortir de sa bulle»
Hasni Abidi remarque également que ces 10’000 signatures réunies en 10 jours sont «sans précédent». Pour lui, c’est une belle réponse à l’affirmation selon laquelle RTSreligion ne toucherait qu’un public limité, sous-entendu les chrétiens. De tels chiffres montrent que ces programmes touchent au contraire un large spectre du public.
«La direction de la RTS doit sortir de la bulle dans laquelle elle s’est enfermée, qui semble ignorer l’importance d’une information de qualité sur les questions religieuses dans le monde contemporain», renchérit Jean-François Mayer. Pour lui, «les pirouettes de la direction de la RTS, prétendant aborder ces questions dans un cadre général et atteindre ainsi un plus vaste public ne trompent personne, et certainement pas les signataires: il est normal que les questions relatives aux religions soient également traitées dans un cadre généraliste, comme le sont tous les autres sujets, mais cela ne signifie pas qu’il soit légitime de se priver d’une rédaction spécialisée, probablement unique en son genre en Europe francophone, et dont les audiences ne déméritent pas par rapport aux émissions diffusées dans les mêmes créneaux horaires».
Au-delà de la logique économique
La RTS a annoncé la suppression des trois magazines d’information sur le fait religieux et la spiritualité, par suite d’une réduction de 40% de son budget. Ceci alors que la RTS doit réduire de 3% ses dépenses.
Hasni Abidi estime que le service public ne devrait pas obéir à la logique économique ou à celle de l’audimat. «Alors que nous voyons que les citoyens s’approprient ces émissions, ils doivent se mobiliser pour sauvegarder cet important outil de connaissance mutuelle et de paix sociale», lance-t-il.
Pour Jean-François Mayer, «la RTS ne saurait ignorer les attentes de ces milliers de signataires, auxquels de nouveaux viennent s’ajouter chaque jour. La plupart de ces signataires paient la redevance radio-TV: la RTS serait mal avisée de les traiter par le mépris et doit entendre leur voix en revenant sur ses décisions incompréhensibles dans le contexte actuel», conclut-il.
La pétition est soutenue par des personnalités de milieux très divers. Parmi les membres du comité figurent des personnalités politiques telles que l’ex-conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey, le président du PDC Christophe Darbellay ou encore la conseillère nationale Ada Marra (PS/VD). Le nom de Dick Marty, ancien conseiller aux Etats, apparaît également, comme celui de l’islamologue Tariq Ramadan ou de la chroniqueuse Rosette Poletti. (cath.ch-apic/com/rz)