Le retour du fils prodigue. Détail d'un vitrail de la basilique du Sacré-Coeur de Paray-le-Monial | © Flickr/Lawrence OP/CC BY-NC-ND 2.0)
Homélie

Homélie du 30 mars 2025 (Lc 15, 1-3. 11-32)

Chanoine Jean-Jacques Martin – Cathédrale Saint-Nicolas, Fribourg

Unissons nos pouvoirs : quelle solidarité ?

Le texte que nous venons d’entendre dans l’évangile et que l’on appelle inopportunément la parabole de l’enfant prodigue est bien connu, tellement connu que ce texte risque de ne plus tellement nous interpeller. Et pourtant c’est peut-être l’une des plus riches paraboles qui nous est donnée pour mieux connaître Dieu notre Père.
En effet, le personnage central de cette parabole c’est le Père, un Père plein d’amour et de tendresse. Alors pourquoi pas nommer cette parabole : le Père qui aime du même amour ses deux fils ?

Mais, au fait, il me semble bien que nous sommes parfois des fils prodigues et des fils ainés, tout à la fois. Finalement, ce n’est pas important puisque, dans les deux cas, nous sommes l’objet du même amour miséricordieux qui remet debout et qui fait grandir.

Nous avons de la peine à nous reconnaître dans le fils cadet

Il est vrai que nous avons de la peine à parfois nous reconnaître dans le fils cadet qui va gaspiller l’argent de son papa pour s’éclater dans une grande ville voisine. Mais interrogeons-nous, si vous le voulez bien : nous sommes parfois comme le fils cadet :

  • Quand nous gaspillons le cadeau de la foi qui nous est donné
  • Quand nous laissons de côté notre maison familiale ou notre Eglise parce que peu moderne et peu sensible aux goûts du jour
  • Quand nous avons de la peine à pratiquer parce que le dimanche, c’est quand même mieux de faire du sport et avec la neige de cette année, il ne faut pas louper cela !
    Sachons cependant que notre indifférence ne rebute pas le Seigneur, qui, un jour ou l’autre, viendra se mettre sur notre route – non pas pour nous faire des reproches – mais pour nous dire au creux de l’oreille : je t’aime !

Le fils ainé semble plus raisonnable

Il est plus facile de se reconnaître dans le fils ainé qui semble plus raisonnable que son frère qui fait prospérer les affaires de son père.
Nous sommes des piliers de la paroisse, des bénévoles qui ne comptent pas leur temps pour être à disposition des uns et des autres, des fervents de groupes de prières. Cependant, ne sommes-nous pas

  • Des déçus parce que l’on ne reconnaît pas suffisamment notre dévouement ?
  • Des irrités des critiques du prêtre qui ne nous comprend pas toujours et qui en demande plus
  • Des mécontents d’un Dieu qui ne répond pas toujours à nos prières
    Et là encore, Dieu notre Père a un regard de bienveillance et nous dit : pourquoi te plaindre ? tout ce qui est à moi est à toi !

Se laisser accueillir et aimer par le Père

J’ai participé la semaine dernière à un groupe biblique qui a bien relevé le fait que le fils cadet est rentré en lui-même pour réfléchir à la situation dans laquelle il se trouvait avant d’aller vers son père sans superbe, sans exigences, sans condition et ce père l’a accueilli les bras ouverts ! Il est fou ce père, fou de joie ! C’est vrai, il faut bien le reconnaître, ce fils cadet avait faim de pain oui, bien sûr, mais surtout faim d’amour. C’est la raison pour laquelle il a décidé de retourner chez son père.
Nous aussi nous sommes appelés à faire cette même démarche : il s’agit de revenir vers celui qui accourt vers nous et nous prend dans ces bras, donc accepter de se laisser accueillir et aimer par le Père quoique nous ayons fait : nous sommes pécheurs et nous avons besoin de revenir vers ce Dieu qui n’a jamais cessé de nous faire confiance.
Voilà un merveilleux cheminement de carême, de conversion.

Aujourd’hui c’est le dimanche « laetare », c’est-à-dire le dimanche de la joie ! Et comme le père de la parabole l’a si bien dit à son fils ainé : « il fallait festoyer et de réjouir, car ton frère que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ».

Devenir des frères et soeurs pour celles et ceux qui ont besoin d’être reconnu pour exister

Voilà bien le visage du Dieu de Jésus-Christ : Dieu est un Père tout puissant en amour et en tendresse. Pour lui, tout pécheur quel qu’il soit, sera toujours un fils. Cela est important pour notre vie chrétienne. Dieu est d’abord un Père que nous côtoyons, quelqu’un qui nous aime toujours quoi qu’il arrive. Il ne tient pas de comptabilité pour nos bonnes ou nos moins bonnes actions. Il nous attend, il nous tend les bras pour nous ouvrir à sa bonté : il faut festoyer et de réjouir !

Nous sommes – en ce dimanche de la joie – au milieu de notre temps de carême et nous pouvons déjà faire un petit bilan puisque c’est un chemin vers plus de fraternité ! Ne pensez-vous pas que nous avons encore besoin d’être réveillés, d’être bousculés !
Alors oui, unissons nos pouvoirs pour plus de solidarité !
Le carême est un temps de conversion, c’est-à-dire un temps de recherches pour découvrir le chemin qui nous conduit vers le partage, la solidarité, la fraternité.
Unissons nos efforts à l’égard de toutes celles et tous ceux qui se croient des fils prodigues, qui attendent notre solidarité. Et alors ce geste n’aura de sens que si, au fond de nous-mêmes nous sommes en révolte devant l’injustice criante et si, au fond de nous-mêmes nous pouvons croire que nous pouvons devenir des frères et sœurs pour celles et ceux qui ont besoin d’être reconnu pour exister !

Vous l’aurez remarqué la parabole ne va pas jusqu’au bout ! Elle s’arrête au seuil de la fête : à nous d’inventer la suite…

Alors, chers amis, à la mi-temps de ce carême, chacun, chacune et en Eglise nous voici devant la même fête et la même invitation à y entrer : goutez et voyez comme est bon le Seigneur ! Quelle sera notre réponse ?
AMEN !

4e dimanche de Carême, de Laetare
Lectures bibliques : Josué 5, 9-12; Psaume 33; 2 Corinthiens 5, 17-21; Luc 15, 1-3. 11-32

Le retour du fils prodigue. Détail d'un vitrail de la basilique du Sacré-Coeur de Paray-le-Monial | © Flickr/Lawrence OP/CC BY-NC-ND 2.0)
30 mars 2025 | 09:35
Temps de lecture : env. 4  min.
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