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Homélie

Homélie du 28 juillet 2024 ( Jn 6, 1-15)

Chanoine Raphaël Duchoud – Hospice du Grand-Saint-Bernard, VS

II R 4, 42-44: Ils mangeront et il en restera.
Ep 4, 1-6 : Un seul corps, un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême.
Jn 6, 1-15 : Il distribua à ceux qui étaient là autant qu’ils en voulurent.

Chers Pèlerins ici présents dans cette église de l’Hospice du Grand-Saint-Bernard, chers frères et sœurs dans le Christ qui vous vous unissez à notre célébration par l’intermédiaire des ondes de la Radio romande, nous voici rassemblés en ce matin et unis dans la prière pour célébrer le Seigneur ressuscité. Ce rendez-vous hebdomadaire rappelle à chacun que notre vie en ce monde, nos activités très variées au quotidien, n’ont pas une fin en elles-mêmes, mais qu’elles sont orientées vers une réalité qui nous dépasse et qui transcende l’espace et le temps.

Une disposition intérieure favorable à l’écoute

Cette année, le thème des pèlerinages alpins organisés par l’Hospice du Grand-Saint-Bernard se polarise autour de cette exhortation de Jésus à ses disciples après une longue et intense journée de ministère durant laquelle, et l’évangéliste Marc le souligne, ils n’avaient même pas le temps de manger: « Venez à l’écart et reposez-vous un peu ! » En ce temps de vacances, nous pouvons accueillir cette invitation de Jésus avec joie au point même de croire que nous pouvons vivre ce temps de repos en nous donnant uniquement à notre soif continue de plaisirs dans un divertissement qui nous éloigne de l’essentiel. Quand Jésus invite et prend quelqu’un à l’écart, cela veut dire qu’il a une parole, un message de vie à donner, et il veut de notre part une disposition intérieure favorable à l’écoute et à l’intériorisation.

L’évangile de ce dimanche nous présente Jésus qui monte sur la montagne, à l’écart, pour enseigner ses disciples et les foules, un Jésus qui reste attentif à toute la dimension humaine de ces personnes qui le suivent pour l’écouter et combler leur attente. L’évangéliste Jean place cette rencontre de Jésus à l’écart sous le signe du pain de vie. Et si le récit de la multiplication des pains est présenté à notre méditation, un message est donné pour que, dans un temps de repos et de relâche, nous soyons capables d’accueillir une parole qui nous aide à découvrir l’identité d’un Dieu qui se révèle et se donne par son Fils Jésus qui nous révèle son visage.

Dieu continue de se révéler afin que nous mettions nos propres qualités au service du Royaume

Quelqu’un pourra dire : « Je connais, je sais ; on nous répète cela depuis le catéchisme. » Armons-nous de courage et laissons-nous interroger par saint Jean qui nous fait une série d’affirmations déconcertantes dans ce long discours du pain de vie. Le contexte nous présente Jésus comme le charpentier de Nazareth qui a laissé sa boutique pour passer de village en village avec un petit groupe de disciples afin parler du Règne de Dieu. Et jusqu’ici, rien de plus extraordinaire pour un pays comme Israël qui, de tout temps, considère l’événement religieux comme déterminant sa propre histoire. Les foules sont attirées par ce Rabbi un peu par ses paroles mais surtout aux vues des signes et miracles qu’il accomplit. Tout le contexte souligne l’éventualité d’une brillante carrière politique possible, mais Jésus y mettra une fin rapide par le discours sur le pain de vie, difficile à comprendre de la part de ses auditeurs. La plupart s’en iront en disant : « Cette parole est trop dure, qui peut la comprendre ». Jésus respectera leur liberté et dira même à ses propres apôtres : « Voulez-vous vous en aller vous aussi ? », demande à laquelle Pierre répondra au nom des Douze : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. ». Le fait de rester avec Jésus pour écouter sa parole, la laisser pénétrer au fond de soi-même permet de reconnaître qu’au delà des simples apparences, Dieu continue de se révéler pour faire grandir en chacun la conscience de sa propre valeur et des possibilités de mettre ses propres qualités au service du Royaume.

Aujourd’hui, le long passage sur le pain de vie commence par la description d’un miracle : celui de la multiplication des pains. Au moins cinq mille personnes sont présentes, qui n’ont pas de provisions ni de pique-nique et qui risquent de défaillir en route si elles n’ont rien à manger. Jésus reste très concret et très attentif aux besoins tout humains de ceux qui le suivent, même s’il est conscient que le signe qu’il va opérer va être interprété d’une façon pas ajustée par rapport au message de vie qu’il annonce.

Du peu surgit l’inattendu

En nous mettant à l’écart, à l’écoute de la parole, nous pouvons être sensibilisés par certains détails qui ont une importance peu négligeable dans la compréhension du message évangélique ; c’est souvent comme ça dans l’Evangile. Dans le texte qui nous intéresse, Jésus demande d’abord à Philippe de lui dire où se serait possible d’acheter du pain pour toute cette foule ; il veut impliquer le groupe des disciples, il veut impliquer chacun de nous pour que nous soyons actifs pour la réalisation du signe de vie, porteur d’espérance et aucun de nous n’a le droit de dire qu’il n’a pas de qualités pour devenir actifs pour hâter la venue du règne de l’Amour. Dans le texte, c’est un petit enfant qui a cinq pains d’orge et deux poissons qui sera mis en avant. Et de ce peu surgira l’inattendu : tous auront mangé et il en restera.

Osons risquer, osons croire

Voici quelques réflexions qui s’imposent : il peut arriver des moments où l’on se retrouve comme à Capharnaüm : c’est beau d’écouter Jésus et d’apprécier ses gestes de salut. Mais à un moment donné, Jésus interpelle, il demande, peu, très peu mais il demande. Il demande d’abandonner nos propres sécurités et de nous laisser impliquer. Il nous demande de nous engager et de partager le peu que nous sommes, mais de le partager. Il y a des moments dans notre histoire personnelle où Jésus demande la foi, de s’abandonner, de le croire, de donner du sien et Lui fera le miracle. C’est lui qui nous rassasiera ainsi que les autres, qui multipliera le peu d’enthousiasme de notre cœur. Il veut le peu que nous avons, mais notre participation : « Dieu qui t’a créé sans toi ne veut pas te sauver sans toi » rappelle saint Augustin. Il n’y a rien d’autre à ajouter, sinon cette exhortation : abandonnez-vous. N’ayez pas peur de faire le saut : renoncez à vos doutes, à vouloir conserver avec jalousie vos petites choses, mais jetez-les dans l’assiette de la générosité pour vous les revoir rendues mille fois plus. Osons risquer, osons croire, osons orienter notre vie sur la voie du don, du désir de partager et le miracle s’accomplira.

17ème dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : 2 Rois 4, 42-44 ; Psaume 144 ; Ephésiens 4, 1-6 ; Jean 6, 1-15

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28 juillet 2024 | 09:35
Temps de lecture : env. 5  min.
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