Jérôme Jean Hauswirth

Pour mettre le feu, il faut être un peu allumé! Homélie du 20e dimanche C (Lc 12, 49 – 53)

Qu’est-ce que ce feu dont parle Jésus, puisque ce n’est pas celui qui va consumer nos frères monothéistes musulmans? Qu’est-ce que ce feu que Jésus doit mettre sur la terre et qui n’est pourtant pas allumé?

 

Comme les paroles de Jésus sont déroutantes et assez effrayantes: «Je suis venu apporter un feu sur la terre… Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde? Non, je vous le dis, plutôt la division.»

Qu’il est difficile d’accueillir ce texte, en contradiction avec ce que l’on dit d’ordinaire de Jésus, le prince de la paix venu apporter l’amour et le pardon. Et voilà que l’on nous parle de feu. D’un feu brûlant et consumant. Est-ce que la religion amène avec elle essentiellement la violence d’un feu dévorant, brûlant l’impie et le pécheur?

 

Ceux qui se font une opinion en tenant compte uniquement des extrémistes religieux pensent en tous cas en ce sens et disent clairement que «les religions n’apportent que fanatisme, guerre et violence.»

Encaissons la critique, mais réagissons tout de même! Il est vrai, qu’au nom de la foi, des atrocités ont été commises. Cependant la foi n’est pas en cause; celle que l’on condame est une foi dévoyée, pervertie et instrumentalisée au service du pouvoir et de l’oppression. Les deux guerres mondiales l’illustrent bien, elles ne sont pas le fruit de conflits religieux, mais idéologiques. Les responsables en sont les adhérents aux théories communistes athées et nazies néo-païennes. Les deux plus grandes guerres de tous les temps eurent pour cause des idéologies, et non la religion. Ce n’est pas la foi qui est en cause, mais les déviations de la foi en idéologies athées et païennes.

 

La question de la relation entre la foi fervente et violence se pose encore. Le pape Benoît XVI y avait répondu en son temps, dans un célèbre discours à l’université de Ratisbonne. Au-delà de la polémique, le pape désirait souligner que «la raison doit présider à la transmission de la foi»…  «ce ne sont pas la religion et la violence qui vont de pair, mais bien la religion et la raison».
A l’époque, une terrible polémique était lancée par des journalistes incultes, n’ayant rien compris. Ils s’imaginaient à tort un pape antimusulman. alors que son intention n’a jamais été de dire que Mahomet «diffusait par l’épée la foi qu’il prêchait», malgré les affirmations de nombreux médias anti-catholiques. L’intention du pape était au contraire d’avertir l’Occident d’un danger. Le pape voulait éviter «le mépris de Dieu, la dérision du sacré au nom de la liberté». Pour Benoît XVI, en excluant le divin de nos réflexions économiques et politiques, l’on se rend incapables de dialoguer avec des cultures différentes, et incapables d’appréhender la Vérité.
Le pape ne voulait donc pas dire que l’Islam est source de violence. Le pape ne voulait pas dire non plus que la religion est source de violence. Le pape voulait dire au contraire que, sans Dieu, nous sommes incapables de nous comprendre et incapables de connaître la Vérité. Car notre raison doit être éclairée par la lumière divine, à elle seule, elle ne se suffit pas. Alors seulement pourrons-nous dialoguer entre cultures différentes dans le respect sincère et la vraie tolérance.
Et le pape de nous dire: «Le thème (de ma leçon) était bel et bien le lien entre la foi et la raison. En cela, je voulais inviter au dialogue entre la foi chrétienne et le monde moderne, ainsi qu’avec toutes les cultures et religions […] j’ai souligné l’importance de respecter ce qui est sacré pour autrui, on aura perçu mon profond respect pour les grandes religions, et notamment pour les Musulmans qui adorent le Dieu unique et avec lesquels les Catholiques se sont engagés à défendre et promouvoir de concert la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté pour tous les hommes.»

Revenons à l’Evangile; qu’est-ce donc que ce feu dont parle Jésus, puisque il n’est pas celui devant consumer nos frères monothéistes musulmans? Qu’est-ce que ce feu que Jésus doit mettre sur la terre et qui n’est pourtant pas allumé?

Dans la tradition biblique, le feu est à la fois ce qui détruit et ce qui purifie. Ce n’est pas le feu de la guerre, ni celui de l’incendie, ni encore le feu des bûchers, mais bien plutôt le feu de l’Esprit Saint. Un feu qui brûle nos péchés et allume en nous l’étincelle de l’Amour. Un feu qui nous embrase et que nous sommes appelés à diffuser. St Jean de la Croix écrivait en ce sens: comme le feu transforme toute chose en lui-même, de même l’amour de Dieu pour qui se laisse embraser.

 

Voilà le désir ardent de Jésus, que ce feu brûle en nous!

Vous le savez bien, Jésus a opéré sans épée. Le baptême qu’il désire nous donner, c’est un baptême de feu, un feu purifiant des péchés, un feu d’amour qui nous transforme et nous embrase de charité, pour la gloire de Dieu et notre salut.

Merci Seigneur pour ton amour qui est de toujours et pour toujours.
Seigneur, tu veux la paix et le dialogue entre les hommes.
Aide-nous à être respectueux avec ceux qui nous sont si différents.
Allume en nous le feu de ton amour, pour que nous puissions embraser le monde de ta charité.

Amen.

 

Père Jérôme Jean

16 août 2013 | 13:59
par Jérôme Jean Hauswirth
Temps de lecture : env. 4  min.
Partagez!