Evangile du dimanche : le champ du monde
On aimerait bien que la promesse du Royaume nous garantisse un monde idéal où tout est beau et gentil. Or le monde que nous vivons est marqué, nous en faisons tous l’expérience, par des divisons, et des convoitises qui mènent à la violence. Est-ce pour autant que ce monde est mauvais ?
Non nous dit Jésus ! Le mal n’aura jamais le dessus et ce monde vaut la peine d’être vécu. Avec ses réussites et ses échecs, ses joies et ses peines, ses accords et ses contrariétés.
En venant l’habiter, Jésus a pris le risque de l’assumer tel qu’il est : c’est le mystère de son incarnation qui nous met dans ce monde tourmenté et cependant à aimer. C’est ce monde qu’il est venu sanctifier en le remplissant de sa présence. Ainsi le Royaume de Dieu devient le champ dans lequel grandit notre humanité.
Dans l’évangile de Matthieu quatre paraboles nous sont offertes par Jésus pour nous dévoiler les différentes facettes du mystère du Royaume. Toutes évoquent l’ensemencement du champ du monde pour qu’il porte le fruit de l’amour. Dieu, le semeur ; la semence, la Parole de Dieu ; la nature, la terre et le soleil ; l’humain capable de recevoir le don de Dieu ; tous sont associés pour que le champ du monde devienne le lieu de réalisation de la promesse divine.
«La mauvaise herbe de l’orgueil et de la division viennent perturber ce jardin de nos vies avec Dieu»
Cependant nous observons que la mauvaise herbe de l’orgueil et de la division viennent perturber ce jardin de nos vies avec Dieu. C’est le diable, c’est à dire le diviseur, qui vient semer l’ivraie dans le champ : cette plante herbacée est nuisible aux céréales comme le diable que Jésus nomme l’ennemi est nuisible aux fruits du Royaume. Le mot grec utilisé par Jésus pour traduire l’ivraie est « zizania » !!! Ce terme très ancien désigne en effet une mauvaise herbe parasite du blé. Il n’y rien de tel que quelqu’un qui sème la zizanie pour détruire les liens de notre vie commune. C’est en effet en montant les gens les uns contre les autres que le malin parvient à abattre toute forme de solidarité et d’amour.
«Tant de mauvais prophètes veulent nous faire croire que le monde est divisé entre les bons et les méchants»
Or Jésus vient réduire à néant les forces destructrices des liens humains. Ces liens, nous le croyons, sont profondément enracinés dans l’amour du Père. En tenant d’arracher l’ivraie de son champ, l’homme risque de toucher également à ce qui est bon et prolifique. Tant de mauvais prophètes veulent nous faire croire que le monde est divisé entre les bons et les méchants. En se donnant ainsi de bonnes raisons d’entrer en guerre. Jésus résiste face à ce genre de division. Il manifeste ainsi qu’il croit à l’unité du genre humain, capable de ne pas céder à cette chasse aux sorcières qui consiste à mépriser une partie de l’humanité pour assurer aux plus forts une supériorité illusoire.
Dans la parabole le maître se réserve l’intervention finale : le jugement appartient à Dieu seul. Et quel est ce jugement ? C’est celui de la fraternité. A la fin de ce même évangile Jésus évoque le royaume dans lequel le maître rend son jugement en séparant les brebis et les boucs. Le critère déterminant pour vivre le Royaume de Dieu est l’attitude vis à vis de ces petits qui sont ses frères. Etre juste c’est en effet reconnaître Dieu dans celles et ceux que nous rencontrons et se mettre à leur service comme Jésus lui-même s’y est engagé. Voilà comment Jésus guide les justes dans le Royaume de son Père.
Philippe Matthey
Évangile
« Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson » (Mt 13, 24-43)
En ce temps-là,
Jésus proposa cette parabole à la foule :
« Le royaume des Cieux est comparable
à un homme qui a semé du bon grain dans son champ.
Or, pendant que les gens dormaient,
son ennemi survint ;
il sema de l’ivraie au milieu du blé
et s’en alla.
Quand la tige poussa et produisit l’épi,
alors l’ivraie apparut aussi.
Les serviteurs du maître vinrent lui dire :
›Seigneur, n’est-ce pas du bon grain
que tu as semé dans ton champ ?
D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie ?’
Il leur dit :
›C’est un ennemi qui a fait cela.’
Les serviteurs lui disent :
›Veux-tu donc que nous allions l’enlever ?’
Il répond :
›Non, en enlevant l’ivraie,
vous risquez d’arracher le blé en même temps.
Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson ;
et, au temps de la moisson,
je dirai aux moissonneurs :
Enlevez d’abord l’ivraie,
liez-la en bottes pour la brûler ;
quant au blé, ramassez-le
pour le rentrer dans mon grenier.’ »
Il leur proposa une autre parabole :
« Le royaume des Cieux est comparable
à une graine de moutarde qu’un homme a prise
et qu’il a semée dans son champ.
C’est la plus petite de toutes les semences,
mais, quand elle a poussé,
elle dépasse les autres plantes potagères
et devient un arbre,
si bien que les oiseaux du ciel viennent
et font leurs nids dans ses branches. »
Il leur dit une autre parabole :
« Le royaume des Cieux est comparable
au levain qu’une femme a pris
et qu’elle a enfoui dans trois mesures de farine,
jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. »
Tout cela, Jésus le dit aux foules en paraboles,
et il ne leur disait rien sans parabole,
accomplissant ainsi la parole du prophète :
J’ouvrirai la bouche pour des paraboles,
je publierai ce qui fut caché depuis la fondation du monde.
Alors, laissant les foules, il vint à la maison.
Ses disciples s’approchèrent et lui dirent :
« Explique-nous clairement
la parabole de l’ivraie dans le champ. »
Il leur répondit :
« Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’homme ;
le champ, c’est le monde ;
le bon grain, ce sont les fils du Royaume ;
l’ivraie, ce sont les fils du Mauvais.
L’ennemi qui l’a semée, c’est le diable ;
la moisson, c’est la fin du monde ;
les moissonneurs, ce sont les anges.
De même que l’on enlève l’ivraie
pour la jeter au feu,
ainsi en sera-t-il à la fin du monde.
Le Fils de l’homme enverra ses anges,
et ils enlèveront de son Royaume
toutes les causes de chute
et ceux qui font le mal ;
ils les jetteront dans la fournaise :
là, il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Alors les justes resplendiront comme le soleil
dans le royaume de leur Père.
Celui qui a des oreilles,
qu’il entende ! »
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