Pierre Emonet

Évangile de dimanche: Tout est question de regard

Jésus avait bien dit qu’il ressusciterait au troisième jour, mais personne ne l’attendait plus. Les Évangiles montrent une communauté déconcertée, ceux et celles qui avaient misé sur Jésus ne sont plus capables de croire qu’il ait vaincu la mort.

Déçus, rendus amnésiques par le chagrin, ne leur parlez plus de Résurrection. Si le corps de Jésus n’est pas dans la tombe, c’est qu’il en est sorti. Pas de lui-même, évidemment, puisqu’il était mort. Reste une hypothèse plausible : ses ennemis ont dérobé le cadavre pour en finir une bonne fois avec un mort qui les a trop dérangés.

«Contrairement à ce qui se passe lors d’un cambriolage, rien n’est dérangé dans la tombe…»

Alertés par Marie Madeleine, deux disciples se précipitent vers la tombe. L’un court plus vite, l’autre est moins rapide. Diversité des tempéraments sur les chemins de la foi, où chacun avance à son rythme. Le premier arrivé au tombeau s’efface pour laisser entrer Pierre, qui incarne la hiérarchie plus lente. Contrairement à ce qui se passe lors d’un cambriolage, rien n’est dérangé dans la tombe, les linges sont bien rangés, à leur place, mais vides de contenu.

«Tout est donc question de regard. Trois regards: Marie Madeleine, Pierre, l’autre disciple…»

Personne n’y comprend rien, jusqu’au moment où le disciple que Jésus aimait, voit ce qu’il s’est passé. Tout est donc question de regard. Le texte original de l’Évangile le suggère en jouant avec trois verbes grecs différents pour décrire la manière dont chacun des protagonistes a perçu la tombe vide. Trois regards. Marie Madeleine jette un coup d’œil et voit que la tombe a été ouverte et est vide. Pierre pénètre dans le tombeau, regarde attentivement la scène, enregistre tous les détails pour conclure qu’il n’y a pas traces d’une intervention extérieure. Sans trouver d’explication, il en est tout perplexe.

«…On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux»

Finalement, l’autre disciple voit dans le sens de saisir, de quoi il en retourne : la tombe désertée, les linges à leur place mais vides de contenu, ne sont que les signes physiques d’un événement qui n’appartient plus au monde physique. Comme qui dirait je vois bien que si le corps n’est plus là, Jésus ne fait plus partie du monde des morts, il est vivant. L’Évangile se contente de dire : Il vit et il crut. Un poète dira : on ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux.

«Être capable de rejoindre l’étincelle de vie présente au-delà des signes de mort»

Trois regards sont portés sur le tombeau vide : un coup d’œil rapide, une attention plus engagée, une vue éclairée par la foi, capable de voir au-delà des apparences.

Avis au lecteur de l’Évangile : n’importe quelle situation décevante risque bien de n’être qu’un tombeau vide aussi longtemps que le regard n’est pas capable de rejoindre l’étincelle de vie présente au-delà des signes de mort.

Pierre Emonet SJ | 20 avril 2025


Jn 20,1-9

Le premier jour de la semaine,
Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ;
c’était encore les ténèbres.
Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau.
Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple,
celui que Jésus aimait,
et elle leur dit :
« On a enlevé le Seigneur de son tombeau,
et nous ne savons pas où on l’a déposé. »
Pierre partit donc avec l’autre disciple
pour se rendre au tombeau.
Ils couraient tous les deux ensemble,
mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre
et arriva le premier au tombeau.
En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ;
cependant il n’entre pas.
Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour.
Il entre dans le tombeau ;
il aperçoit les linges, posés à plat,
ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus,
non pas posé avec les linges,
mais roulé à part à sa place.
C’est alors qu’entra l’autre disciple,
lui qui était arrivé le premier au tombeau.
Il vit, et il crut.
Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris
que, selon l’Écriture,
il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

«Je sais que vous cherchez Jésus le Crucifié. Il n’est pas ici, car il est ressuscité, comme il l’avait dit.» | DR
18 avril 2025 | 17:00
par Pierre Emonet
Temps de lecture : env. 3  min.
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