Évangile de dimanche: Tel Berger, telles brebis
Des brebis sans berger? Pourquoi Jésus compare les foules qui l’entourent ou même le précèdent de l’autre côté du lac à des brebis sans berger? Il semblerait au contraire qu’en fait de bergers, elles n’ont que l’embarras du choix.
Elles ont en effet les chefs de la synagogue, les prêtres, les scribes pour les guider vers les pâturages de la Parole de Dieu et de son Alliance. Elles ont aussi et fondamentalement pour guide cette grande espérance de la venue du Messie, portée par les prophéties, relayée parfois par des mouvements zélés voire fébriles qui voudraient en hâter la venue par leur impatience à chasser l’occupant romain. Et bien sûr, elles ont le guide sûr de la Loi: il suffit de s’y conformer scrupuleusement, en ses moindres préceptes, sous la houlette des pharisiens. C’est tout ce qu’on demande au petit peuple.
«Le petit peuple n’a que faire de ces bergers qui entendent le mener par leur frénésie politique…»
Eh bien non. Le petit peuple n’a que faire de ces bergers qui entendent le mener qui par sa frénésie politique, qui par sa rigidité morale, qui par ses beaux discours manipulateurs et assujettissants. Ce qui l’attire, il l’a trouvé en Jésus et ses disciples. C’est pourquoi il ne semble pas disposé à les lâcher.
Et quelles qualités le peuple a-t-il trouvé en Jésus? Il y en a deux. La première nous est donnée par le récit de Marc: «Jésus fut saisi de compassion envers eux». Il faut aimer les brebis. Toutes. Un bon berger a souci de chacune. Il se démène pour lui donner de quoi vivre, être en sécurité et en repos. Jésus, soucieux dans notre récit de procurer le repos à ses disciples en les conduisant à l’écart, ouvre sa compassion à toute la foule assoiffée d’un repos du cœur, de l’esprit, de l’âme. Ce repos c’est la paix, et c’est la deuxième qualité du bon berger.
«Ne procure la paix que celui ou celle qui est en paix»
Or, ne procure la paix que celui ou celle qui est en paix. Jésus la donne car il est lui-même la paix de Dieu. Il la transmet à ceux qui se mettent à sa suite. C’est le cas de la figure si lumineuse de Saint Nicolas de Flue. S’étant retiré à l’écart pour remplir son cœur de la compassion du Christ, il a rayonné la paix auprès de ceux qui venaient le trouver attirés par cette paix qu’il a su transmettre très concrètement aux confédérés divisés venus le consulter en 1481 lors du Convenant de Stans. Son influence fut politiquement décisive et durable. Elle a ouvert l’avenir de la Confédération.
La compassion et la paix ne visent pas en effet à constituer des troupeaux repus et engourdis, bien à l’abri dans l’entre-soi d’un enclos. Elles ouvrent à un dépassement, à une générosité, à une espérance et constituent avec cette dernière ce que l’on appelle le salut.
«Quelles sont les qualités que doivent avoir les brebis pour se laisser attirer par un tel berger?»
Voilà pour les qualités du berger. Mais reste une question: quelles sont les qualités que doivent avoir les brebis pour se laisser attirer par un tel berger? Probablement un cœur libre des influences des faux bergers et un cœur suffisamment dégagé de lui-même, de ses propres passions, intérêts, idées toutes faites, pour se laisser attirer par l’amour et la paix. Bref, elles doivent s’ouvrir à l’image du Berger qu’elles portent en elles et tendre à lui ressembler. Et c’est encore l’amour du Berger qui fait cela.
Sr Anne-Sophie Porret OP | Vendredi 19 juillet 2024
Mc 6, 30-34
En ce temps-là,
après leur première mission,
les Apôtres se réunirent auprès de Jésus,
et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné.
Il leur dit :
« Venez à l’écart dans un endroit désert,
et reposez-vous un peu. »
De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux,
et l’on n’avait même pas le temps de manger.
Alors, ils partirent en barque
pour un endroit désert, à l’écart.
Les gens les virent s’éloigner,
et beaucoup comprirent leur intention.
Alors, à pied, de toutes les villes,
ils coururent là-bas
et arrivèrent avant eux.
En débarquant, Jésus vit une grande foule.
Il fut saisi de compassion envers eux,
parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger.
Alors, il se mit à les enseigner longuement.
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