Philippe Golay

A quoi sert une cathédrale?

Laissant au lecteur le plaisir de découvrir ce que livrent, en réponse à cette question, le Dictionnaire historique de la langue française, Le Culturel ou encore le Brio  (tous trois aux éditions Le Robert) quant à la définition de la cathédrale, il s’agit simplement, pour certains de

  • une grande ou belle église…
  • un lieu de culte de la religion chrétienne…
  • un monument dont l’architecture, les sculptures, les vitraux ont fait l’objet d’ouvrages imprimés, et que l’on visite au cours d’un voyage ou en période de vacances…
  • une Cathédrale n’est rien d’autre qu’un lieu d’enrichissement des connaissances dans le domaine de l’histoire de l’art…
  • je vois dans cet édifice la manifestation des capacités humaines à maintenir debout durant des siècles des tours, façades et autres parties d’une construction…
  • Je pense qu’une cathédrale est le dernier lieu sur terre où l’on peut entrer gratuitement, s’asseoir, passer quelques minutes ou des heures dans le calme, voire s’assoupir sans déranger personne, en tout cas ne pas se faire accoster par des vendeurs de n’importe quoi.
  • La Cathédrale ? Un édifice dont la tâche, en quelque sorte, consiste à édifier l’être humain. Seul un vaste espace silencieux, lumineux, comme échappé du paradis porte à la vertu le visiteur devenu pour un temps, même court, totalement disponible à ce qui se passe là. Et lui apporte de l’énergie morale. (D’aucuns préfèreront parler d’une force d’âme).
  • Des voyageurs : il y a dans la région tant de choses à voir…alors vous comprenez, on n’a pas beaucoup de temps, mais tout de même on peut dire que c’est  beau, pas mal calme, idéal pour retrouver la paix, utile quand on est fatigué.
  • Il se trouve aussi, parmi les visiteurs, des «heureux d’avoir passé un peu de temps à l’intérieur de l’édifice», des «déçus parce qu’on imaginait qu’une cathédrale c’est un lieu vivant alors qu’on l’a trouvé plutôt  glacial.»

Ceci encore :

Une Cathédrale sert à mettre la paix en soi…
C’est l’antichambre du paradis, où l’on peut tout dire au Créateur…
La cathédrale joue le rôle de Maison de tous, vraiment tous les humains, car personne n’est interdit d’entrée, ni obligé de prier, de participer aux cérémonies qui s’y déroulent, de donner de l’argent en sortant, ni de serrer la main du pasteur ou du président du synode.

 

A quoi sert une Cathédrale ? Poser la question

  • au propriétaire : l’Etat de Vaud (en ce qui concerne celle de Lausanne)
  • aux députés du Grand Conseil prenant toute sorte de décisions budgétaires
  • aux bâtisseurs, au personnel qui entretient l’édifice, à l’office du tourisme, aux citoyens, aux ministres du culte, pasteurs, ecclésiastiques, aux enseignants des écoles publiques
  • au directeur du Centre hospitalier universitaire vaudois qui, de son bureau, doit voir la cathédrale
  • à  votre voisin de palier, au facteur, aux membres de votre famille, à vos amis.

 

Hier, aujourd’hui
Une cathédrale, c’était «la maison du Bon Dieu», ouverte à tous, disaient de jeunes Lausannois dans les années 1950-1960.. Que les pasteurs portent, lorsqu’ils officiaient à l’époque, un vêtement noir étonnait, mais l’intérieur et l’extérieur de cet édifice impressionnait davantage. Que s’en dégageait-il, que percevait-on en entrant et, surtout, au fil d’un culte, de cérémonies ? Les jeunes s’intéressaient aussi à l’extérieur (architecture, portes, couleur du bâtiment) et l’intérieur (décoration ou simplicité, ambiance, odeur, calme).

C’était hier, on parlait de la Cathédrale ; protestants de passage, catholiques  allaient respectueusement la visiter en famille.

Aujourd’hui ? Les enfants et plus encore les petits-enfants des préadolescents de l’époque antérieure à «Mai 68» sont-ils à même de dire à quoi sert une cathédrale, une église, un temple, une chapelle ? Les lieux – tel l’Hôtel de Ville – dans lesquels oeuvrent élus, fonctionnaires, tous les chargés du bien public, au singulier comme au pluriel, ont-ils davantage d’importance ?

 

Aujourd’hui, encore, la cathé
La Cathé ? Un lieu, libre d’accès, ouvert à la rencontre, répond une jeune fille, 17 ans, citadine, catholique, demeurant dans l’appartement familial, avec vue sur la partie supérieure du clocher du temple de la paroisse Chailly-La Cathédrale (Eglise évangélique réformée du canton de Vaud). C’est d’abord cela, dit-elle, mais aussi un monument historique, un endroit que tout le monde connaît, un repère, la base de fondation de la ville.

Pour ses parents, rencontrés un peu plus tard, la Cathédrale aujourd’hui sert tout d’abord à élever l’esprit vers Dieu. Puis au rassemblement des gens. Suivent les mots diversité, repos, prière, découverte historique, expression de l’art, réflexion, tourisme, endroit frais, lieu de recueillement et de silence, concerts, partage, paix. Ceci, pour terminer : La cathé, pour exprimer toutes les valeurs fondamentales et positives de l’être humain. Enfin : pour la pratique de la religion.

Un repère, a glissé la jeune fille dans sa brève énumération. Donc, dans l’histoire de ce mot, le retour à un certain point, se dit le chercheur d’avis. Un certain point, dès lors, assurément bien établi (note : cette notion de certain est entrée dans la langue française en 1373, en parlant d’une chose). Aussitôt, deux questions prennent forme: – A quoi servent aujourd’hui les repères ? A quoi pensait la jeune fille ?

La valeur humaine n’est pas cotée en bourse, ni l’objet d’un intérêt soutenu dans la vie quotidienne. On en parle cependant dans les lieux où la spiritualité a toute sa place. Dans un lointain passé, les bâtisseurs de chapelles, temples, églises, cathédrales, disaient combien ils étaient fiers d’édifier une «Maison pour Dieu». Aujourd’hui, il reste probablement quelque chose de cela chez des architectes, ingénieurs, tailleurs de pierre et autres professionnels engagés dans ce qui n’est pas une aventure, mais un acte culturel sociétal. Toute personne engagée dans la construction ou la restauration d’une cathédrale, d’une église, d’un temple, d’une chapelle, donne le meilleur de soi dans son travail. Rien n’est trop beau ? Oui, l’expression demeure vivante dans la langue française.

 

PhilGo

9 juillet 2012 | 21:33
par Philippe Golay
Temps de lecture : env. 4  min.
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