Volonté de rapprochement avec les fidèles attachés au rite ancien
Rome: Le cardinal Castrillon Hoyos célèbre une messe tridentine à Sainte- Marie-Majeure
Rome, 25 mai 2003 (Apic) Des centaines de fidèles venus de plusieurs continents, des évêques et des cardinaux ont participé le 24 mai à une messe en rite tridentin (aussi appelé saint Pie V) dans la basilique romaine de Sainte-Marie-Majeure. Ils répondaient à l’appel de l’association traditionaliste «Una Voce», à l’origine de l’événement. «L’ancien rite romain conserve dans l’Eglise son droit de citoyenneté», a précisé le cardinal Dario Castrillon Hoyos, qui présidait la célébration de samedi.
Le cardinal Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé, préside depuis avril de l’an 2000 la Commission pontificale «Ecclesia Dei», chargée de ramener au bercail romain les traditionalistes qui ont suivi le schisme de Mgr Lefebvre en 1988. Ce geste rarissime effectué par un cardinal de la curie romaine, traduit selon les observateurs une volonté de rapprochement avec les fidèles attachés au rite qui prévalait avant 1969 et qui se sont divisés depuis l’acte schismatique provoqué par l’évêque traditionaliste français Marcel Lefebvre en 1988.
Mgr Fellay, Supérieur général de la Fraternité St Pie X, nie toute réconciliation
Le mois dernier, dans un communiqué, Mgr Bernard Fellay, Supérieur général de la Fraternité St Pie X – qui a suivi Mgr Lefebvre dans son schisme – apportait un cinglant démenti aux bruits d’une «prétendue réconciliation de trois évêques de la Fraternité avec Rome». Cette réconciliation aurait dû être annoncée à l’occasion de la célébration de cette messe selon le rite tridentin présidée samedi par le cardinal Castrillon Hoyos dans la basilique romaine de Santa Maria Maggiore. «Les quatre évêques, et non seulement trois, sont bien unis dans leur position inchangée pour la défense de la Tradition catholique dans la lignée de Mgr Marcel Lefebvre», peut-on lire dans le communiqué de la Fraternité.
Le pape Jean Paul II s’est «uni spirituellement» | Le pape Jean Paul II s’est «uni spirituellement» aux fidèles qui ont assisté à la messe selon le rite tridentin. Dans un message lu par le cardinal Secrétaire d’Etat Angelo Sodano, il a dit reconnaître le geste filial et s’unir spirituellement «à cet hommage plein de dévotion à la très sainte Vierge Marie».
Pour le 25e anniversaire du pontificat de Jean Paul II
Dans un communiqué publié quelques jours auparavant, la Commission pontificale «Ecclesia Dei» avait souligné que cette liturgie célébrée le jour de la fête de Marie Auxiliatrice, voulue par saint Pie V, avait pour objectif de «rendre un hommage au Saint-Père dans l’année du 25e anniversaire de son pontificat». Ces fidèles ont souhaité, en outre, remercier Jean Paul II pour le ’Motu Proprio’ «Ecclesia Dei», qui demande une «ample et généreuse application» des directives sur l’usage du missel romain dans son édition de 1962.
Dans son homélie, le cardinal Castrillon Hoyos a particulièrement insisté sur les figures du Successeur de Pierre et de saint Pie V.
Le président de la Commission Ecclesia Dei, chargée du lien avec les fidèles attachés au rite tridentin, s’est ainsi longuement arrêté sur le successeur de Pierre qui, «au milieu des flots de l’histoire, est le roc». «Le concept de Pierre, a-t-il ajouté, contient celui de consistance, de résistance, de cohésion, de fermeté, de solidité et de force». «C’est à Jean Paul II, notre pape bien aimé, que vont notre pensée, notre prière et notre profond et affectueux sens de la communion ecclésiale».
Pour lui, «sa vie et son ministère apostolique suprême sont caractérisés par la défense infatigable de la vérité, par le dévouement total à la cause de l’unité de l’Eglise et par l’oeuvre pastorale prophétique et courageuse pour la promotion de la vraie et juste paix entre les peuples et entre tous les hommes». «Plus sa personne physique semble fragile, a-t-il ajouté, et plus fort se dresse son rôle moral et spirituel devant l’humanité».
«Nous sommes plus que jamais conscients des orages et des défis qui se présentent pour le corps mystique du Christ», a précisé le cardinal. «Tel est le sort de l’Eglise, divine dans son essence et humaine dans ses membres. Nous souffrons de tant de contradictions, que la nature humaine et le péché peuvent infliger à l’histoire tourmentée de notre humanité et à la marche de l’Eglise, en pèlerinage vers la Patrie définitive. Nous sommes tous invités à renouveler constamment notre confiance au Seigneur de l’histoire».
La liturgie dite «de saint Pie V»
Le cardinal Castrillon Hoyos a alors invité les fidèles présents, dont de très nombreux Français, à avoir confiance en l’Eglise victorieuse ; «Victorieuse parce que construite sur le roc de Pierre (.). Victorieuse parce que la communion avec les pasteurs légitimes garantit cette note de catholicité, indispensable pour rester dans la société mystique du corps du Christ».
Le cardinal colombien s’est ensuite arrêté sur la liturgie dite «de saint Pie V», qui a constitué pendant des siècles la forme officielle de la liturgie romaine. «On ne peut pas considérer que le rite dit de saint Pie V soit éteint», a-t-il affirmé, «l’ancien rite romain conserve donc dans l’Eglise son droit de citoyenneté au sein de la multiformité des rites catholiques tant latins qu’orientaux. Ce qu’unit la diversité de ces rites, c’est la même foi dans le mystère eucharistique, dont la profession a toujours assuré l’unité de l’Eglise Sainte, Catholique et Apostolique».
Cinq cardinaux au premier rang
La liturgie a été animée par deux choeurs, l’un venu d’une paroisse parisienne, l’autre grégorien, animé par un moine bénédictin du Barroux, où vit une communauté traditionaliste rattachée à Rome. De nombreuses familles étaient présentes et beaucoup étaient venues de loin pour l’occasion. Au premier rang, se tenaient cinq cardinaux dont l’ex-cardinal de Boston, Bernard Francis Law. Ce dernier a plusieurs fois célébré selon ce rite qu’il «estime» dans son diocèse. Se trouvant à Rome pour des assemblées de congrégations, il a souhaité se rendre à Sainte-Marie-Majeure avec le cardinal William Wakefield Baum.
Aux Etats-Unis, la présence des traditionalistes est importante et EWTN, le célèbre canal télévisé de Mother Angelica a retransmis la messe à leur intention. Marygold Turner, une anglaise habitant le Kent était venue avec un groupe d’une vingtaine de personnes appartenant à l’association «Latin Mass». Elle s’est réjouie de cette messe, considérée comme «un geste d’ouverture, une pleine reconnaissance de ce rite au sein de l’Eglise catholique».
Avec leur aumônier appartenant à la Fraternité Saint-Pierre, le Père Andrew Southwell, ils ont pu célébrer, le 23 mai, une messe privée dans une petite chapelle de la basilique Saint-Pierre. En effet, depuis quelques mois, la Secrétairerie d’Etat et la Commission «Ecclesia Dei» ont établi les conditions précises, permettant l’usage – limité – de ce rite dans la basilique du successeur de Pierre. (apic/imedia/sr/be)