Les Etats-Unis dirigent des opérations depuis le Pérou et l’Equateur

Amérique latine: Bruits de bottes nord-américaines aux frontières de la Colombie

Iquitos, 16 août 1999 (APIC) Des militaires américains dotés d’un matériel de guerre hautement technologique sont actuellement mobilisés dans la base navale péruvienne d’Iquitos, en Amazonie, ainsi que dans la garnison de l’Ecole de brousse «Coca», sur territoire équatorien. Les militaires américains, se trouvent à une encablure de la Colombie, indique une dépêche de l’Agence «International Press Service», à Quito (Equateur), reprise lundi 16 août par le quotidien péruvien «La Republica» et confirmée par plusieurs sources.

Depuis plusieurs semaines, des nouvelles contradictoires circulent sur une possible intervention des Etats-Unis en Colombie. Ces rumeurs sont à la fois amplifiées par les milieux de la guérilla et par les secteurs civils de la société colombienne. Récemment encore, Washington assurait que les Etats-Unis n’interviendront pas dans cette guerre civile qui n’en finit pas de durer, avec ses quelques 30’000 morts annuellement, victimes des affrontements.

Les informations, non démenties jusqu’à présent par l’Equateur et le Pérou, précisent que le contingent des «Forces spéciales opérationnelles du Commandement sud des Etats-Unis», formées d’au moins une centaine d’homme d’élite, calcule-t-on ont été placées dans ces endroits frontaliers stratégiques afin de «neutraliser les incursions de la guérilla colombiennes et les narcotrafiquants».

Les deux bases américaines, financées par le Département de défense des Etats-Unis, ont commencé à être opérationnelles en mars déjà, au moment où les forces armées péruviennes et équatoriennes ont déplacé leurs effectifs jusqu’alors utilisés dans le conflit territorial les opposant. En avril, le Département de la défense du Congrès des Etats-Unis admettait les faits, en indiquant toutefois que ces forces spéciales assistaient pour une durée limitée les forces armées péruviennes et équatoriennes dans des opérations combinées et avec un matériel d’entraînement adéquat.

Le général Barry McCaffrey, directeur du Bureau de la Politique nationale pour le contrôle de la drogue, aux Etats-Unis, a indirectement admis l’existence de ces deux bases, en réaffirmant la semaine dernière depuis l’Equateur que Washington n’interviendra pas militairement en Colombie.

Avions américains performants

Le fonctionnaire nord-américain n’a cependant pas voulu répondre en conférence de presse à la question de savoir si la chute de l’avion militaire américain RC-7B, il y a une vingtaine de jours à la frontière colombiano-équatorienne, ne cachait pas en réalité les préparatifs d’une intervention camouflée des Etats-Unis en Colombie. Une intervention officiellement souhaitée par le président péruvien Alberto Fujimori, mais sur laquelle l’Equateur demeure discret à ce jour.

Selon les observateurs en Equateur et au Pérou, l’accident du RC-7B a surtout mis en évidence la capacité opérationnelle des Etats-Unis dans la région. En peu d’heures, sitôt la nouvelle de la chute de l’avion connue, une mobilisation des forces armées américaines sans précédent pour ce type d’incident dans la région a été mise en place. Selon le quotidien «The Miami Herald», 24 avions militaires nord-américains du même type ont en effet participé aux recherches pour localiser le lieu de chute.

Pour le général Barry McCaffrey, les opérations ont effectivement pour but d’intercepter les communications des narcotrafiquants, mais aussi celles des forces de gauche de la guérilla en Colombie, et notamment les FARC.

Pilotes hautement qualifiés

La majorité des effectifs nord-américains basés en Equateur et au Pérou sont des pilotes hautement qualifiés pour manœuvrer des stations de radar et interpréter les images de caméras du type de celles produites par l’avions RC-7B, capables d’identifier n’importe quel objet dans la forêt amazonienne.

Récemment encore, un expert américain du Département de défense des Etats-Unis, James Zackrison, cité par la revue colombienne «Cambio 16», estimait que Washington devra sans doute un jour penser à la possibilité d’envoyer des troupes en Colombie, parce que «Les Etats-Unis ne peuvent pas se permettre de perdre».

Forces armées et contradictions

La semaine dernière, répondant à des questions insistantes, le général Carlos Mendoza, chef du commandement de l’ensemble des Forces armées équatoriennes a déclaré que son pays ne participait pas à des opérations militaires contre la guérilla colombienne. Il avouait toutefois que 5’000 soldats étaient stationnés à la frontière de la Colombie pour «empêcher l’arrivée de rebelles». Il n’en demeure pas moins, assure encore «La Republica» que des troupes de l’Equateur et des Etats-Unis ont participé ensemble, une vingtaine de jours avant l’accident du RC-7B, à l’opération dite «Sucumbios», pour «éliminer» deux campements d’entraînement des FARC, supposés se trouver en territoire équatorien.

Le major nord-américain Bernard Sparrow, commandant de la compagnie C du troisième bataillon du septième groupe des Forces spéciales stationnées au Panama, dirigeait les opérations. Ce bataillon, a été détaché pour servir en Colombie, peut-on lire dans une note datée de mai 99, dans une publication interne du Commandement sud des Etats-Unis.

Bases d’entraînement pour troupes d’élite

Une information du reste confirmée la semaine passée par «El Espectador» (Bogota), qui révèle que la dernière mission des «commandos de selva» (brousse) a été l’occupation de nouvelles bases d’entraînement des FARC sur sol équatorien. Le quotidien colombien s’appuie sur les propos tenus en la circonstance par le colonel Ivan Borja, porte-parole du ministère de la Défense de l’Equateur.

Quant à la base péruvienne d’Iquitos, elle a reçu le 14 juin des mains de l’ambassadeur des Etats-Unis à Lima, Dennis Jett, des vedettes de guerre. Cette base abrite à elle seule 33 «conseillers militaires» nord-américains, remplacés tous les 90 jours par une nouvelle équipe, écrit encore «El Espectador».

Des troupes d’élite colombiennes, brésiliennes, équatoriennes et sans doute péruviennes s’initient en outre quotidiennement aux techniques de combat en forêt vierge, à la base militaire de l’Ecole de brousse «Coca», grâce à un programme mis au point par le Département de Défense des Etats-Unis. Un autre programme se développe également à Iquitos, liés à des opérations navales, celui-là.

Cadeau sous forme de vedettes de guerre

Selon le ministre de la Défense de l’Equateur, le général José Gallardo, la base de «Coca» ne sert pas de plate-forme à une éventuelle intervention militaire en Colombie. Il y a là, admet-il, des officiers de beaucoup de pays qui s’entraînent «pour le prestige international de ce centre. Des officiers d’autres pays arrivent, de la même manière que des officiers équatoriens vont à l’extérieur. Il s’agit d’un échange commun entre forces armées de plusieurs pays».

Il n’en demeure pas moins que l’an dernier, le Département de Défense des Etats-Unis a programmé 186 opérations – dont 21 en Equateur – dans cette région de l’Amazonie, aux frontières de la Colombie, du Pérou, de l’Equateur, et, un peu plus loin, du Brésil. (apic/pr)

16 août 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 5  min.
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