“La découverte du tombeau vide“. Par Fra Angelico, fresque vers 1437-1446, détail. Musée national San Marco, Florence. | Domaine public.
Homélie

Homélie de Pâques 20 avril 2025 (Jn 20, 1-9)

Abbé Thierry Fouet, Eglise Sainte-Thérèse, Genève

Matin de Pâques : rendez-vous au tombeau, il est vide, et jamais vide n’a été aussi plein. «On a enlevé le seigneur» dit Madeleine. Et jamais absence n’aura été autant présence.
L’Eglise du matin de Pâques, c’est d’abord ce petit groupe de femmes qui, parties de grand matin, pour voir un sépulcre et embaumer un cadavre, découvrent soudain qu’elles n’ont plus à chercher parmi les morts celui qui est vivant…. Et s’en retournent à toute vitesse porter la joyeuse nouvelle aux disciples
.

Premières à chercher Jésus après la tragédie du Golgotha, premières à le rencontrer vivant, premières à entendre la parole de paix et l’envoi en mission : ces femmes Apôtres ELLES FORMENT LA PREMIERE COMMUNAUTE PASCALE.
L’Eglise du matin de Pâques, c’est cette pécheresse pardonnée qui pleure au bord d’un tombeau vide parce que quelqu’un, croit-elle, a enlevé le corps crucifié de son bien-aimé Seigneur.

La course des survivants

A l’immobilité apparemment définitive du Christ dans la tombe s’oppose la course des survivants, après Marie-Madeleine, il y a Pierre et Jean. Oui Pierre et Jean à leur tour se mettent à courir. Le plus jeune, Jean, s’efface devant l’ancien : Pierre. Que voit Pierre ? le linge roulé. Sans doute ne comprend-t-il pas ce qui se passe. L’autre disciple, Jean, voit le linge roulé mais pour lui c’est comme si se déroulait le rouleau de l’Ecriture qui annonce que Jésus devait ressusciter. Tout s’éclaire alors. Le jour est levé. Jésus s’est relevé d’entre les morts.

L’Eglise du matin de Pâques, c’est ce groupe d’hommes encore divisés, presque tous sceptiques devant les paroles des femmes : comment pourraient-ils- croire ? Non seulement Celui qu’ils ont suivi est mort mais surtout il est mort désavoué, désavoué par le peuple, par les représentants de Dieu et, en apparence, par Dieu lui-même, les disciples pensent qu’ils se sont trompés sur Jésus.
Depuis le début de la scène, on court beaucoup, on s’agite beaucoup, Dieu vient déranger l’ordre immuable de la mort, il vient arracher comme un voleur, le mort à sa honte. Il vient nous voler notre mort.
DIEU SE FAIT LE PERTURBATEUR DE TOUTES NOS CERTITUDES DONT LA PRINCIPALE :
NOUS SOMMES MORTELS. MAIS LA RESURRECTION NOUS ENLEVE A LA MORT DEFINITIVE.
C’est le Passage, c’est la Pâque.

L’assurance émerge peu à peu du doute

Eglise du matin de Pâques, j’aime tes premiers pas, si timides, si maladroits, combien cela est rassurant pour nous., à l’image du papillon si fragile qui sort de son cocon.
Il faut attendre le vent de la Pentecôte pour prendre ton envol.
En ces premières heures de la semaine pascale nous voyons que l’assurance de cette communauté émerge à peine du doute, sa paix émerge à peine de l’angoisse, et sa joie des larmes, mais c’est déjà l’Eglise de Jésus-Christ ressuscité.

Le croyant essaie sa foi sur tous les terrains

Aussi, je crois d’autant plus en la Résurrection du Christ quand je vois autour de moi des hommes et des femmes qui se lèvent encore pour refuser la fatalité de l’injustice, de la violence et de l’égoïsme.
Je crois d’autant plus en la Résurrection du Christ quand je vois des peuples humiliés se redresser et s’opposer aux forces du mensonge et de la haine.

Je crois d’autant plus en la Résurrection du Christ quand je vois des communautés chrétiennes, anciennes et nouvelles, inventer des nouvelles manières, des nouveaux lieux où chacun est accueilli, aimé, pardonné, écouté.
Je crois d’autant plus en la Résurrection du Christ quand je rencontre des frères et des sœurs visiblement «habités» qui suscitent, qui RE-suscitent tous ceux qui les approchent.
Des mots ? Oui tant que je n’essaie pas ce que la foi rend possible. Le croyant est celui qui essaie sa foi sur tous les terrains. A propos de terrain….
En ce jour de Pâques il est une tradition que j’aime particulièrement et qui a marqué d’émerveillement ma vie de petit garçon. En ce matin particulier, les œufs de Pâques ont été dispersés dans le jardin par une Grand-Mère experte qui sait depuis des années où elle peut les cacher au plus proche, au plus secret.
Dimanche en fin de matinée, tout une bande d’enfants envahit la pelouse. Philippe se précipite sur une des cachettes de l’an passé. Mais cette fois il n’y a rien et il revient tout triste le dire à sa grand-mère. Deux cousines, plus petites, se mettent en quête à leur tour. Nadine trotte en tête ; Annie, de peu son ainée, suit avec prudence.
Sur place elle fouille le feuillage avec méthode. Mais Nadine repart en avant, comprenant qu’il faut chercher plus loin.

Il en va du chemin de la foi comme de la course des petites cousines. Qui croit savoir doit apprendre qu’il ne sait pas et qu’il peut en être tout autrement. Qui s’entête dans sa recherche peut se perdre dans des bandelettes de détails. Mais qui a le cœur assez vif sait ouvrir les yeux et comprendre que le trésor est ailleurs.

Jésus Vivant est toujours présent. Il est un cadeau à découvrir aujourd’hui et c’est sans doute pour cela qu’on appelle ce cadeau « aujourd’hui » : PRESENT.
C’était le premier jour de la semaine. Rien ne semblait avoir changé : les chants des oiseaux, les bourgeons des arbres… tout aurait été comme d’habitude si, dans le silence de la nuit, Dieu n’avait pas fracturé le tombeau.
Ni caméra, ni micro, ni mise en scène, juste un linceul resté là comme un clin d’œil. Nous sommes loin d’un spectacle. DEPUIS CETTE NUIT, LA VIE ETERNELLE EXISTE POUR DE VRAI.

Messe de la Résurrection du Seigneur
Lectures bibliques : Actes 10, 34-43; Psaume 117; Colossiens 3, 1-4; Jean 20, 1-9

«La découverte du tombeau vide». Par Fra Angelico, fresque vers 1437-1446, détail. Musée national San Marco, Florence. | Domaine public.
20 avril 2025 | 09:35
Temps de lecture : env. 4  min.
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