La coopération internationale victime d’un marchandage en faveur de l’armée

Le Parlement fédéral a bouclé, le 19 décembre 2024, le budget 2025 de la Confédération suisse. L’armée recevra davantage de moyens, une somme compensée notamment par des coupes dans la coopération internationale. La coalition des œuvres d’entraide Alliance Sud dénonce un marchandage basé sur des arguments erronés.

Les avis étaient particulièrement divergents sur la coupe à effectuer dans la coopération internationale. Le Conseil national voulait initialement trancher 250 millions. Le Conseil des Etats avait élaboré un concept de compensation plus large, qui ne prévoyait qu’une coupe de 30 millions de francs dans ce domaine.

Les deux chambres se font finalement accordées sur une coupe de 110 millions, répartie entre la coopération bilatérale (-55 millions), la coopération économique (-25 millions) et les contributions à des organisations internationales (-30 millions).

«Les décisions du Parlement auront des conséquences dramatiques pour les pays les plus pauvres et ont été marquées par de nombreux arguments erronés», a immédiatement critiqué Andreas Missbach, directeur d’Alliance Sud.

«D’une manière générale, les faits n’ont joué aucun rôle dans le débat, déplore-t-il. Par exemple, l’efficacité scientifiquement prouvée de la coopération au développement ou le fait qu’il n’existe aucun domaine de l’administration fédérale plus évalué et où règne une plus grande transparence.»

«On a également jonglé avec des chiffres inventés de toutes pièces sur la coopération internationale (CI), insiste Andreas Missbach. L’affirmation souvent entendue selon laquelle l’armée aurait été ›affamée’ au cours des dernières années au profit de la coopération est ainsi dénuée de fondement. Depuis 2015, la croissance de la CI a toujours été inférieure (1,7% en moyenne) à la croissance du budget fédéral (2,6%), alors que la croissance des dépenses de l’armée était déjà nettement supérieure (3,9%). «Le marchandage pour l’armée a été marqué par des chiffres librement interprétés, des arguments erronés et une astuce procédurale.»

Impact sur les plus pauvres

Pour les plus pauvres, ces décisions auront un impact direct, note Alliance Sud. Les 30 millions de francs qui manquent à l’aide multilatérale correspondent à peu près à l’ensemble de l’engagement de la Suisse dans la lutte contre le sida, la tuberculose et la malaria. L’argent qui manque à la coopération bilatérale (-55 millions) signifie concrètement que moins d’élèves pourront être scolarisés dans les camps de réfugiés, que des familles paysannes ne disposeront pas d’un approvisionnement en eau sûr pour lutter contre la crise climatique, que de nombreux jeunes n’auront pas de place de formation etc.

Outre le budget 2025, les chambres fédérales ont débattu des crédits cadres pour les années 2025-2028. Là aussi la coopération internationale se verra amputée de 151 millions de francs. (cath.ch/com/mp)